*

 

 

 Si Vanessa est désormais des plus méfiantes envers les comportements de certains de ses proches, on ne peut pas dire que ce soit la même pour Yann et Tania, qui, désormais mis en confiance sur leur couple, enchaînent les erreurs au niveau de la discrétion?

   

 

Aujourd’hui, alors que les deux amoureux se sont retrouvés isolés dans le petit local de répétitions, avant de se mettre à s’embrasser à pleine bouche, il semblerait que quelqu’un ait brusquement décidé de tomber nez à nez sur le spectacle de leur amour étalé au grand jour. 

Ce quelqu’un n’est autre que Lisa qui se rendait tranquillement ici afin de retrouver ce vieil ami, pour tenter un nouveau et subtil rapprochement.

Évidemment, la surprise est de taille pour la jeune femme et elle en sursaute d’effroi derrière cette fenêtre aux volets à moitié ouverts.

 Ils n’ont clairement pas encore remarqué qu’elle est en train de les espionner avec haine, en méprisant leurs jeux de langues du plus profond de son âme.  

Tant mieux.

Qu’ils ignorent tout de sa présence ici.

Qu’ils ignorent tout de ses connaissances sur leurs faits et gestes.

Qu’ils ignorent tout et continuent de jouer cet étrange double jeu, fourbe et hypocrite, envers leur ami bassiste.

   

Tant mieux.

 Tant mieux.

 

Ainsi, sa vengeance n’en sera que plus délicieuse.

 

 

 

 

*

 

 

 

 

 

Désormais réconciliés, Tiphanie et Peter font en sorte de tourner la page sur les jours récents qui ont secoués leur amitié. 

Tiphanie veut récupérer son ami, tandis que Peter... Y croit peut-être encore un peu.

 

 

 

 

*

 

 

 

Aujourd’hui, Lisa décide de mettre enfin en œuvre son plan des plus fourbes et diabolique, en se dirigeant d’un pas rapide vers la cité universitaire d’une petite bande de jeunes hommes qu’elle connait bien désormais.

Le premier qu’elle aperçoit ici est Gérald, qui semble occupé à évacuer son énergie en faisant quelques paniers de basket-ball. 

Rapidement, elle lui signale alors sa présence en le saluant amicalement, pour qu’il lui rende un bref

— Yop Lisa. Ça va ?

— Très bien. Et toi ?

— Tranquille, comme d’hab ! 

— Tu es au courant pour Yann et Tania ?

— De quoi ?

— Et bien, ils sont ensemble. Tu n’étais pas au courant ? Enfin, c’est pas étonnant, puisqu'ils ont l’air de se cacher des regards indiscrèts. Peut-être de ceux de Romu d’ailleurs... Qu’est-ce que tu en penses ? 

— Je m’en fous, soupire simplement Gérald en réponse, en agrippant de toutes ses forces ce ballon orange qu’il tient maintenant contre sa cuisse droite.

— Comment ça, « tu t’en fous » ?? lui répète alors Lisa, surprise et déçue par sa réaction — cela ne te fait rien de les voir se moquer de vous ? 

— Au revoir Lisa. Si tu n’as rien d’autre à ajouter... Va t’en maintenant... Arrête d'essayer de foutre la merde dans le groupe !

 

D’accord.

 

Elle a perdu une bataille, mais certainement pas la guerre.

Et puis elle aurait dû se douter qu’elle ne pourrait rien à tirer de ce fichu poil de carotte.

 

 

*

 

 

Cette nuit, et pendant que son épouse se pomponne longuement dans leur salle de bain, Kurt se sent soudain assailli par de nombreux doutes.

Pour cette raison, il se dépêche d’aller toquer à la porte de la salle d’eau, pour demander d’une voix anxieuse

— Qu’est-ce que tu fais ?

— J’ai fini dans deux minutes ! lui répond à peine son interlocutrice, comme si cette information était ce qui l’importait.

— Je peux entrer ? ose-t-il alors, trop anxieux pour rester a patienter sagement derrière sa porte.

— Oui, oui, n’hésite pas à lui faire Tiphanie.

 

 

Ce n’est pas la première fois qu’ils partagent la pièce et sa présence derrière elle, pendant qu’elle finit de s’admirer dans le miroir, ne la dérange absolument pas.

 

 

— Comment est-ce que tu me trouves ? lui fait-elle à nouveau, dès qu’elle le voit pousser la porte dans le reflet du miroir.

 

 

— Eeeuh.... Sublime.. Mais c’est pour ? Arrive à peine à déglutir Kurt devant ce spectacle des plus sexys et délicieux. Décidément, cette robe moulante qu’il lui avait offerte lors d’un anniversaire lui va à ravir... 

— On va grignoter un truc au fast-food du coin, avant d’aller au ciné, avec Hanz. Mais il me semble que je t’en avais déjà parlé ! Rappelle toi, quand tu m’as annoncé ta soirée étudiante de ce soir...

 

— Elle est annulée ! Se dépêche d’interrompre Kurt, avant de proposer de sa voix la plus douce et séductrice, 

— Alors si tu veux... On se fait un chinois, rien que tous les deux?

 

 

— Hummmm, je sais paaas, le taquine avec ironie Tiphanie en se retournant vivement pour le dévisager d’un air amusé — que vais-je bien pouvoir choisir, entre un fast-food avec mon meilleur ami, et un chinois avec l’homme de ma vie... Je sais pas.. Vraiment pas !! Tu as une idée toi ?!

— Oui... Et dans deux minutes, je te bâillonne si tu continues de te moquer de moi !!

 

 

— Hummmm... Tu oserai, me bâillonner... Moi ? lui susurre-t-elle alors avec sensualité, tout en se lovant contre lui jusqu’à ce que ses formes épousent les siennes.

 

 

— Je resterai impassible face a tout tes stratagèmes, diablesse, se contente de lui répondre Kurt avec un petit sourire en coin, — sinon... On va devoir faire une escale par la chambre et on devra dire au revoir au restau !

 

 

 

*

 

 

 

 

Trois jours plus tard, Lisa revient à la charge pour sa terrible vengeance, en réussissant enfin à coincer Romuald dans sa chambre universitaire.

Rapidement, et sans prendre de gants, elle lui dépêche alors de lui annoncer tout ce qu’elle a appris récemment sur un petit couple de l’ombre pas très discrète, pour que le visage du blondinet s’assombrisse aussitôt après son annonce. 

— Je suis vraiment désolée, s’excuse-t-elle tout de même, pour se donner un air gentil et inoffensif, — je me doute que ça doit te faire un choc, mais.. 

— Mais rien du tout, l’interrompt son interlocuteur d’une voix grave, — je ne te crois pas Lisa. Je ne veux pas te croire.

— Je comprends Romu.. 

— Tu es furieuse contre lui parce qu’il ne fait pas attention à tes avances, n’est-ce pas ? Alors tu es prête à tout pour lui ruiner ses amitiés... 

— Non Romu... Mais si ça te fais moins mal de le croire... s’innocente avec mensonges la jeune fille, de sa voix la plus suave et hypocrite.

— Je vais me renseigner Lisa. Je vais me renseigner... mais si je découvre que tu m’as menti, dans l’unique but de nous faire du mal, alors là... 

— Je regrette déjà de t’avoir mis au courant d’une chose pareille Romu. Et je m’excuse par avance de ce que tu vas aller te confirmer.

— On verra Lisa. On verra... 

— Sur ce, je dois te laisser. Je dois aller voir une amie pour réviser notre futur contrôle de maths !

— Bien. À plus tard alors.

— À plus tard alors, p’tit blond, sourit affectueusement la jeune fille, avant de sortir de la pièce, avec une expression qui ne plaît vraiment pas a son interlocuteur.

 

Elle est sûre d’elle. Vraiment trop sûre d’elle...

 

 

*

 

 

Ainsi, quelques minutes plus tard, le jeune bassiste se met en route en direction de la chambre de son collègue guitariste.

Arrivé à destination, il toque à la porte avec frénésie pour faire réagir le propriétaire des lieux,

— Ouai ?

 

Ouf. Il est là. Le blondinet s’annonce alors,

— C’est Romu. J’entre ?

— Humm, qu’est-ce que tu me veux ? Lui fait rapidement Yann, avec une hésitation des plus troublantes. 

— Rien. Juste squatter un peu. 

— Vas-y, entre, on regardait un film qui vient de se terminer, mais tu peux venir t’enfiler le suivant avec nous, si tu veux.

 

« On » ?

 

Ce terme surprend évidemment le jeune bassiste qui se dépêche d’entrer dans la chambre de son camarade, pour y découvrir... assise et vautrée sur l’unique lit de la pièce... son ex-petite amie. 

Yann quant à lui, est apparemment en train de se laver les mains en sifflotant, tandis que Tania, toute souriante, tapote d’une main sur le lit.

Sans doute pour faire comprendre au nouvel arrivant sceptique de venir s’asseoir a ses côtés.

 

— Y’a assez de places pour trois ! informe-t-elle rapidement, avec trop de gentillesse pour être honnête.

 

Le cœur du blondinet saigne désormais.

Il commence à comprendre.

À y croire.

À les haïr.

 

— Y’a Die Hard 4 qui passe maintenant, l’informe tranquillement Yann en savonnant les mains, — ce film, c’est de la pure bombe ! 

— Yann... ose enfin déglutir avec douleur Romuald, en se figeant en plein milieu de la pièce — tu... Tu..

 — « Je » quoi ? Tu as besoin de quelque chose ?

— La vérité Yann. Je veux la vérité.

 

Dans un même mouvement ; et une même brise d’incompréhension ; Yann et Tania dirigent tous deux leurs regards respectifs vers leur interlocuteur commun.

Serait-il en train de leur faire comprendre qu’il sait tout de leur relation cachée ?

 

Non... c’est impossible !

 

— Mais « la vérité » sur quoi ? Fais alors semblant d’ignorer Yann, en prenant son air bêta des grands jours.

— Sur vous Yann, sur vous.

— On est amis désormais, oui, se lance alors Tania pour venir a la rescousse de son petit-ami qui semble avoir perdu ses mots dans les méandres de l’anxiété, — je sais que ça peut surprendre que le macaque et moi, on puisse être amis, mais on a fini par trouver un terrain d’entendre. Voilà. 

— On est ensemble, oui, avoue brutalement Yann, sans aucune honte, et malgré le vil mensonge que vient de lancer la demoiselle toujours assise sur son lit. 

— Merci d’avoir été honnête, j’en attendais pas moins de toi, réussi à faire le blondinet sans un sourire, ni un regard vers la jeune fille qui a tenté de l’induire, une fois encore, en erreur.

— J’ai plus envie de te mentir Romu... Tu sais que tu es mon meilleur ami, et... 

— Je descends, on se voit plus tard, préfère l’interrompre Romuald, encore complètement chamboulé par la cruelle découverte, avant de reprendre, dans une tentative d’humour et de dérision, 

— Quel boulet n’empêche... Tu as trouvé le moyen de niquer ton lavabo ! 

— Boulet toi-même, fais mine de se vexer Yann avec ironie, — Tu vois pas que c’est fait exprès ? Je prends ma douche du jour là !

— Eh eh.. Tu m’en diras tant, lui sourit difficilement son ami, avant de tourner les talons pour s’en aller, sans un mot de plus.

 

— Et merde ! Lance furieusement Yann, une fois que le blondinet a quitté les lieux — putain de merde ! Putain de merde !

— Putain de merde, comme tu dis... vient répéter Tania, dans un soupir qui en dit long sur son incompréhension de la situation.

— Il y’a une taupe dans le groupe Tania, se met à accuser férocement Yann, en commençant à faire le trajet des cent pas dans la pièce — une taupe... Une taupe... Ness ?

— Non, pas Vanessa, défend immédiatement la jeune fille, — ce n’est pas elle. J’en suis certaine.

— Mais c’est forcément elle, merde ! Elle a la bouche bien pendue et on le sait tous, alors ça ne m’étonne même pas ! Elle a parlé à Kyle, qui s’est empressé de jouer les bons toutous auprès de Romu, voilà tout !

— Ce n’est pas elle. J’en suis persuadée, alors cherche ton coupable ailleurs !

— Erwan ? Il s’en bat la race de notre vie sexuelle ! C’est à peine s’il calcule notre existence ! Gérald ? Pareil ! Il s’en bat les couilles des vies amoureuses des uns et des autres ! Et tu le sais bien en plus ! Kyle ? C’est monsieur je-me-mêle de tout, parce qu’il est le bienfaiteur de l’humanité, investi de la mission de sauver le monde ! Vanessa ? C’est miss monde qui fourre son museau de truie puante partout !

— Attention à ce que tu dis... commence à s’agacer Tania, en tentant la fusillade du regard, celle qui aimerait tuer rien qu’en une demi-seconde.

— OK, j’y vais un peu fort. Je m’excuse pour la truie puante...

— J’aime mieux ça.

— Je veux trouver le coupable !! JE LE VEUX !!!

— Et s’il n’y en avait pas ?

— Impossible. Romu a toujours eu une immense confiance en moi, alors il ne pouvait pas imaginer que...

Finir sa phrase ferait terriblement mal au jeune homme, surtout que son cœur se serre déjà avec violence.

— Il n’avait pas l’air si ébranlé que ça.. Il nous a même souri avec de partir...

— Évidemment. Parce que tu pensais qu’il se serait jeté au sol en pleurant ?

— Non, bien sûr que non.. Mais il aurait pu nous lancer des trucs salaces..

— C’est pas le genre de Romu d’être con à ce point. Il a un cerveau en bon état de marche ! C’est pas un boulet qui peut avoir de telles réactions excessives.

— Dans ce cas, il ne nous en tiendra pas rigueur. Il a bon fond Romu...

— Ouais, je sais. Mais je lui ai fait mal, très mal. Et pour ça, tu peux être certaine que je vais massacrer la taupe qui nous a balancés.