*

 

Quelques heures plus tard et alors qu'il fait déjà nuit noire, les deux tourtereaux incestueux se jouent une nouvelle fois de la morale en profitant pleinement de la vie, de leur amour, dans le petit appartement qu'ils habitent ensemble...

Jusqu'à ce que soudain, Eva se décide à freiner gentiment les ardeurs de son compagnon devenu en quelques minutes à peine brulant de désir...

— Raph', stp.. Non, qu'elle lui susurre timidement et avec gêne alors qu'il se préparait à lui descendre son boxer en soie, — je, je... je ne me sens pas très bien, excuse-moi.. Qu'elle ajoute, honteuse, complètement terrifiée par l'idée même de refaire cette chose, là..

Cette chose immonde et douloureuse que l'on appelle le sexe... Cet acte qu'elle ne se sent pas encore capable de faire de son plein gré.

Oui, impossible. Et ce, même si elle tente désespérément de se rappeler à quel point avoir des rapports sexuels avec son Roméo pouvait pourtant être délicieux... L'idée même d'une pénétration la terrifiant et la répugnant complètement aujourd'hui.

— Pas de soucis, ma puce, abdique sans difficulté Raphaël avec un doux sourire, tout en se laissant retomber sur le lit aux côtés de sa petite amie qu'il enlace très vite avec tendresse.

— Tu me fais ta petite bouille déçue! Tu m'en veux... lui bougonne Eva, gênée ; et pour cause.. Les deux jeunes gens étaient encore chauds comme de la braise il y a même pas deux minutes et rien qu'en une phrase, elle a tout gâché...pour des flashs de souvenirs des plus horribles qu'elle ne se sort plus de l'esprit. Tout ce qu'elle a pu subir là-bas.. Tous ces sévices qui l'obligent à visualiser aujourd'hui le sexe comme une source absolue de souffrance et désespoir.

— Mais non, la contredit affectueusement Raphaël en la rapprochant un peu plus de lui afin de l'enlacer avec toute l'affection du monde, lui déposant ensuite une pluie de légers baisers humides sur le cou puis le visage, avant de s'emparer purement et simplement de ses lèvres pour un long et langoureux baiser.

Évidemment, le pauvre ne sait pas. Évidemment, le pauvre ne se doute pas. Évidemment, le pauvre ne peut pas imaginer... L'angoisse et la terreur qui figent depuis quelques semaines sa petite amie dès qu'il a le malheur de poser le moindre doigt sur elle. Dans ces moments-là, elle fait cependant bonne figure : elle est amoureuse et passionnée et les bras de son Raphaël ne sont ni malsains, ni dangereux, ni méprisables....

Mais malgré toutes ces bonnes pensées, rien n'y fait. Trop de souvenirs. Trop de flashs. Sans parler de ce corps immonde que la jeune fille a bien du mal à supporter aujourd'hui. Parce qu'il ne devait être qu'à lui... son Raphaël. L'amour de sa vie avec qui elle l'avait fait la première fois... Et au lieu de cela, il est tout simplement passé sous de nombreux hommes. À la queue leu leu, presque. Tel un vulgaire objet dont l'on se sert pour s'offrir quelques instants de plaisir, avant de le jeter aux ordures.

Voilà ce qu'elle est aujourd'hui, finalement, cette idiote de brunasse qui se la joue sereine et épanouie devant tous. Voilà ce qu'elle est, finalement.. en réalité, qu'elle réalise toujours avec désespoir. Un pauvre jouet usé. Un pauvre jouet usé, cassé, et désormais inutilisable ; car irréparable.... Un jouet qui fait honte. Parce que si son Roméo savait.. Que penserait-il d'elle?

Il serait répugné. Il aurait pitié.

Et ça.. Elle préfèrerait mourir que de le voir se produire.

Alors, et il n'y a pas d'autre alternative, c'est seule et toujours seule qu'elle portera sa lourde croix.

 

 

*     *

*

 

 

Depuis son incarcération, les journées sont longues pour Kurt Cobain.

Très, très, longue. Et ce, même si sa vie ici n'est pas des plus désagréables. Enfin, des pires, disons plutôt. Parce que la vie en prison n'est jamais amusante, bien entendu... Par contre, il aurait pu être beaucoup plus mal loti qu'il ne l'est. Être un souffre-douleur, par exemple.. Un pauvre type qui ne servirait que de défouloir à ses compagnons de cellules. Car au lieu de ça il est plutôt respecté ici. Très vite, il a su se lier avec les noms les plus craints afin de s'assurer une certaine sécurité pour les semaines, mois, années à venir...

C'est donc d'un pas nonchalant et plutôt tranquille qu'il se rend dans les douches, ce soir.. Pour constater très vite en pénétrant dans la pièce qu'un pauvre gamin est actuellement en train de prendre cher par un autre détenu qui le pénètre sans ménagement contre un mur.

— Hey ! Ne peut alors pas s'empêcher d'intervenir Kurt, brusquement choqué, — fous-lui la paix !

Oh certes, l'époux Cobain a bien tort d'agir ainsi. Oh, certes, qu'il a bien conscience que cet ordre qu'il vient de donner pourrait bien lui couter très, très cher dans les minutes qui vont suivre...

 

 

*

 

 

Retour dans le passé, ou simple nouveau départ avec de meilleures volontés?

Ce sont les deux questions que l'on pourrait éventuellement se poser lorsque l'on voit Eva revenir dans ce local là. Ce vieux, vieux, local.. Celui où tout a commencé. Ce vieux, très vieux, local...que les Troublemaker ne voudraient quitter pour rien au monde. Et ce même s'ils auraient bien les moyens aujourd'hui de s'en prendre un plus spacieux! Mais non, au lieu de cela, les jeunes hommes préfèrent rester ici. Entre ces quatre murs qui les ont vu  débuter de rien pour finir par se hisser tout de même au rang des petits groupes montants.

— Woé, tu dois bénir l'installation récente de l'ascenseur toi ! Fait amicalement Terry à son ex-petite amie, — ça va, toi, sinon ? T'es toute belle aujourd'hui, dit donc! Comme d'hab', tu me diras, qu’il poursuit, chaleureux.

— Eheh, merci!! T'es pas mal non plus, pour tout te dire!! sourit à son tour Eva avec un malicieux petit clin d'oeil, avant d'enchainer, joyeuse — et pour te répondre, oui, en effet, je bénis cet ascenseur ! Sans lui, j'aurais vraiment été dans la merde !

— Woé, toujours aussi gracieuse, ma brunette ! En rit Terry, amusé.

— On se refait pas, hein !

— Je suppose que tu es là pour assister à la répétition exceptionnelle du nouvel album ?! Raph' te fait des fleurs, dis donc.. Parce qu'il y a des morceaux vraiment exclusifs à travailler aujourd'hui et personne d'autre à part nous ne devait les connaître !! petite veinarde... taquine le blondinet.

— Genre ! Tu insinues que vous me cacheriez quelque chose à moi, votre première fan ?! Je suis choquée, saleté !

— Le business ma poule, le business, woé...!

Eh oui, c'est un fait. Terry et Eva sont redevenus aujourd'hui plutôt bons amis. Eh oui, c'est évident, nous assistons ici a une sorte de retour dans le passé... voir peut-être a un come-back amélioré ?

C'est ce que l'on pouvait penser lorsque Raphaël, accompagné de sa petite amie, demie-soeur, a remis les pieds ici la dernière fois. Il revenait pour rejoindre son premier groupe. Ses premiers amis...

Acolytes de toujours et d'enfance....

Il revenait et tous le saluaient chaleureusement.

Même Terry Dreher.

Pour quelque chose de nouveau..

Pour quelque chose de plus beau.

Tous l'espéraient du fond du coeur.

Encore une fois... Ils voulaient y croire.

— Woé, mais comment ça se fait que tu n'arrives pas en même temps que Raph, toi? Se renseigne subtilement Terry auprès de sa comparse déjà assise sur le grand canapé de la pièce.

— Je suis venue ici direct après ma réeduc', c'est à deux minutes en bagnole et j'avais le chauffeur, alors j'en ai profité !

— Ah, j'aurais pensé que Raph' t'accompagnait à tes cours de rééducation, moi! Woé, sinon, ton frère, ça va mieux? Il paraît qu'il a eu très chaud.. Raph nous en a légèrement parlé...

— En effet, il a eu très, très, chaud!! Mais il va beaucoup mieux aujourd'hui!

— Je me souviens, à l'époque, il pouvait pas me blairer, ce salaud, reprend Terry d'un air mi-amusé, mi-aigri, tout en reposant doucement sa guitare sur son maintien.

— C'est un frérot très protecteur, rien de plus, sourit Eva en retour avec émotion, tandis que son interlocuteur se rapproche d'elle, l'air de rien.

— Et tu penses qu'il avait raison, toi? De te protéger de moi.. ? Tu penses que tu avais besoin d'être... protégée de moi?

— Hein? S'intrigue très vite Eva, gênée, alors que le visage de son ex-amant se rapproche dangereusement du sien et qu'il la pousse doucement pour la faire basculer sur le canapé, afin de se placer à califourchon au dessus d'elle...

— Euh, Terry... ne comprend pas la jeune fille, sceptique et rougissante, maudissant tellement sa condition d'handicapée.

— Woé, tu rougis encore quand tu es dans mes bras... lui susurre Terry avec sensualité.

— Normal, dans cette position... Mais recule, maintenant. Où on va avoir des soucis si les autres arrivent..! Allez, zou! File! Debout!

— Un baiser et je me lève aussi sec qu'un clown à ressorts !

— Gnéééé ? Non ! Arrête, t'es lourd maintenant, maugrée la brunette en essayant de repousser de ses petites mains ce grand corps masculin qui trône fièrement sur le sien, — s.t.p., Terry, bouge !

— Putain, t'es toujours aussi conne décidément ! T'as encore rien compris, ou quoi?!? s'énerve brusquement le blondinet en se relevant vivement, enchainant aussitôt avec rage, — tu comprendras décidément jamais que ton avenir, c'est MOI ?!?

— Hein?! Pfff, mais comment t'es décevant toi ! Moi qui pensais que tu avais changé, en fait que dalle! en râle de surprise et dépit la jeune fille en se rasseyant ensuite, boudeuse, vexée, terriblement déçue par l'attitude de celui qu'elle pensait être un ami aujourd'hui.

— Je suis décevant, moi?! Moi, je suis décevant? Moi, je te déçois ?! MOI ?! MOI ?! Moi, je te déçois ?! C'est la meilleure, celle là !!! S'emporte d'un coup le musicien en revenant avec hargne vers son ex-petite amie pour l'attraper furieusement par le col et la soulever d'un coup brusque, tout en continuant de l'incendier, mais avec haine désormais,

— MOI, MOI, MOI, je te déçois ??? MOIIII ?! MOIIIIIIIIII ?! Et TOIII, tu ne penses pas que TOIII, tu me déçois, peut-être ?! qu'il lui braille, les larmes aux yeux, en la secouant vivement dans les airs telle une poupée de chiffon.

— Lâche moi Terry, tu es complètement cinglé, putain!!! le sermonne Eva avec colère, avant que dans un soudain excès de colère, il ne la jette furieusement contre le meuble le plus proche pour qu'elle s'écrase dessus dans un bruit sourd.

C'est inerte qu'elle retombe lourdement au sol. 

— Merde!!! Eva!!!!!! réagit aussôt Terry, réalisant brusquement son geste et se précipitant immédiatement auprès de sa victime pour la prendre délicatement dans ses bras et la secouer, — meeeeeerde, désolé, je voulais pas! Je voulais paaaaaas!!! Excuse moiiii!!! Evaaaaaaaaa!!! Diis moi quelque choseeee!! Putaiiiiiiiiiin, Evaaaa! Ma puuuuceee! Diis moi quelque choooose!!! qu'il supplie désespérément, câlinant tendrement son interlocutrice qui vient de rouvrir enfin les yeux pour laisser échapper un faible gémissement,

- Hmmm... Je..

Et c'est à ce moment-là que la porte de la pièce s'ouvre soudain, tranquillement poussée par deux autres membres du groupe...

Tobias et... Raphaël.

— Qu'est-ce que...? grommelle immédiatement le jeune Bauer, fusillant du regard la scène qui se déroule en ce moment sous ses yeux ; une scène qui prête à confusion, c'est certain, lorsque l'on constate avec quelle tendresse son comparse Terry tient sa petite amie dans ses bras...

— ça va, je me suis juste cassé la figure!! intervient brusquement Eva en pivotant la tête en direction de son Roméo, reprenant vivement ses esprits et repoussant légèrement son sauveur et agresseur blond, réalisant bien évidemment sa position actuelle et pas vraiment désireuse de semer le trouble entre deux hommes redevenus aujourd'hui amis, pour un simple petit... « Accident involontaire », — je faisais quelques exercices et il m'aidait pour que je m'entraine, c'est moi qui le lui avais demandé, et.. Bon ben comme tu peux le constater au vu de la gamelle, c'était un essai infructueux! Qu'elle tente ensuite d'expliquer maladroitement à un Roméo de plus en plus stressé, sceptique.

— Tu te fous de moi, là? Qu'il lui grogne d'ailleurs pour preuve, agacé.

— Elle dit la vérité, je te le promets, appuie timidement Terry quand soudain...

...sa brunette d'ex-petite amie fait un sursaut sur elle-même, marquant ainsi une évidente surprise, tout en lui attrapant soudain et vivement son tee-shirt pour lui signaler, dans un vif et strident cri de douleur,

— Terry, je...Aïïïeee... Mais, maiiiis... aaaahhh, regarde, Terry!! Regarde!!!

x

Tous les regards se dirigent évidemment et dans la seconde vers la jeune fille, ou plutôt vers... son pied gauche qui est en train de pivoter lentement de gauche à droite.

— Oh putainnnnnn!! réagit en premier Terry dans une explosion de joie, un large sourire dessiné sur le visage, en se retournant vivement vers son interlocutrice qui elle, à l'aide de ses deux mains, tend ses jambes afin que les deux autres hommes de la pièce constatent eux aussi la raison de son étonnement.

Raphaël quant à lui en reste bouche bée, cruellement réduit au silence par le fait que sa petite amie est en train de vivre un bien magique moment aux côtés de son plus grand rival, tout en le calculant à peine...

Il a évidemment bien conscience de la jalousie immonde dont il fait preuve en ce moment et au fond de lui il n'en est pas fier, c'est certain, mais... cet événement-là, jamais il n'aurait pensé que son amour le vivrait en plongeant son regard pétillant dans les yeux d'un autre. Jamais..

— C'est énorme!! vient se joindre à la fête Tobias, se rapprochant très vite des deux ex-amants encore au sol et fou de joie, — et le droit ? Tu peux bouger le pied droit, Eva ?! Et est-ce que ça fait mal?!

— Un peu, oui, mais ça va, se presse de sourire Eva, les yeux humidifiés par ce grand bonheur qu''elle est en train de vivre, — ils bougent, tous les deux!! Vous avez vu?? qu'elle reprend, heureuse, le regard rivé sur ses deux pieds qu'elle s'amuse à faire bouger encore et encore, de gauche à droite, de haut en bas.. Et ce, même si ces mouvements restent très douloureux. Peu importe! Ils bougent! Ils ont retrouvé leurs mobilités, tous les deux...

C'est un miracle...

Tout simplement.

Un miracle du à la maladresse de son ex-petit ami qui l'a brusquement jeté contre une commode?

Une amusante et miraculeuse maladresse...qui à sans aucun doute joué dans le retour de la mobilité de ses doigts de pied.

Elle en laisse échapper quelques larmes de bonheur en plongeant son regard dans les yeux de son blondinet d'ex-petit ami, les yeux pétillants. « Merci d'être un miracle... » qu'elle songe inconsciemment, tandis que Raphaël craque soudain en voyant Terry avancer subtilement sa main pour lui caresser délicatement la joue. Sans réfléchir, le jeune Bauer s'avance alors furieusement vers son comparse musicien pour l'attraper avec rage et le forcer à se relever.

— Heeey, mais ça va pas la tête, toi ?! réagit bien évidemment le jeune homme blond, hagard, observant son presque agresseur récupérer très vite la femme de sa vie toujours assise au sol pour la prendre dans ses bras et la ramener vers sa chaise roulante. Le tout dans un silence des plus pesants.

— Félicitations, c'est merveilleux ce que tu es arrivé à faire.. Lui murmure ensuite tendrement Raphaël en lui déposant un doux baiser sur le bout des lèvres, une fois celle-ci assise sur son moyen de locomotion personnel.

Terry assiste à la scène. Vert de rage, mais en faisant toutefois bonne figure.

Tranquillement, il se retourne alors vers sa guitare et se prépare à l'attraper, quand tout à coup, Raphaël revient d'un pas rapide vers lui, après avoir tendrement câliné sa moitié qui lui a rendu son affection avec tout l'amour du monde, pour l'agripper furieusement et le forcer à se retourner vers lui. 

Le regard du jeune Bauer est désormais plus noir que jamais et c'est sans prévenir qu'il se précipite donner un violent coup de poing dans l'abdomen de celui qui a osé penser rien qu'une seule seconde qu'il pourrait de nouveau jouer les perturbateurs au sein de son idylle...

— Raph'!! le gronde aussitôt sa petite amie dans un sursaut d'effroi, blasée de voir se produire justement la scène qu'elle redoutait plus que tout, — putain, mais arrête! Qu'elle enchaine juste après, agacée, déçue, mais aussi terriblement honteuse.

Tobias quant à lui, craignant un évident début de bagarre -inévitable, d'après lui-, se précipite vers son meilleur ami pour tenter d'intervenir et l'empêcher de donner un nouveau coup à son comparse.

— Tu te comportes encore une fois comme ça avec MA copine, et je t'arrache la tête, Terry, souffle simplement Raphaël d'une voix glaciale au concerné, juste après son attaque, tandis que celui qu'il vient d'agresser feint une indifférence totale pour ce qu'il vient de se produire, en se tournant à nouveau vers sa guitare pour l'attraper avec nonchalance, marmonnant d'un air serein et paisible,

— La jalousie est un très vilain défaut. Je ne faisais rien de mal, mais l'aidais et la félicitais juste. Eva est mon amie.

— Et moi, c'est ma copine, retiens bien ça, et...

— On commence l'entrainement sans les autres ?! Intervient Tobias d'une voix forte, — ou vous continuez à faire vos petits duels de « coqs » à la con, comme à l'époque ??? TROUBLEMAKER les mecs, TROUBLEMAKER avant tout!

— C'est quoi le titre de ce nouveau morceau que vous allez travailler, alors ?!? fait soudain Eva pour appuyer le batteur du groupe dans cette conversation des plus houleuses.

— Flower for a ghost, écrite par le blond weak ! Lui répond d'une traite Tobias en sautant sur sa batterie, enchainant juste après tandis que ses deux autres comparses l'imitent en attrapant leurs instruments respectifs, — c'est qu'il devient productif, presque plus que les deux autres laids!

— Crève, ironise amicalement Raphaël avec un clin d'oeil amusé, alors qu'en fait s'entrainer sur ce nouveau morceau de son comparse blond l'horripile souvent au plus au point.

Et pour cause.. Il ne sait pas vraiment comment interpréter le lyric de son collègue, mais il n'en touche pas un mot à ses amis.

Après tout, le précédent titre de son ami Terry -Hey Lady-, avait eu un succès fou et il se doit de penser avant tout au bien de leur groupe...

Et puis il est vrai que la jalousie est un très vilain défaut et Raphaël, même sous ses airs possessifs et insupportables, parfois, à pleinement confiance en sa petite amie.

Enfin, il essaie, du moins...

You disappear with all your good intentions
And all I am is all I could not mention 

Et Eva de son côté meurt peu à peu de honte dès les premières paroles chantées par son ex-petit ami, toujours de cette voix à la fois grave, mais suave et délicieuse. En effet, la jeune Beckers sent bien évidemment son coeur se serrer et une gêne indéchiffrable l'envahir. 

Like who will bring me flowers when it's over 
And who will give me comfort when it's cold 

Parce qu'elle n'est pas idiote et sait bien que la première fois que son ex-petit ami avait pris la plume pour écrire une chanson, ce n'était que pour elle. Pour la séduire plus précisément...

She took a plane to somewhere out in space 
To start a life and maybe change the world 
See I never meant for you to have to crawl 
No I never meant to let you go at all 

Et désormais, il la reprendrait donc, pour...

Oh no, Oh no
Don't ever say goodbye 

...Peut-être, crier un désespoir palpable de l'avoir perdue?

En plus, elle remarque bien les quelques regards qu'il lui lance parfois, discrètement cela dit... Car évidemment le jeune blond ne veut pas être remarqué par Raphaël lorsqu'il tente d'en exprimer un peu plus que prévu, à une certaine jeune fille...

See my head aches from all this thinkin' 
Feels like a ship God, God knows I'm sinkin' 
Wonder what you do and where it is you stay 
These questions like a whirlwind, they carry me away

La brunette est plus que perplexe et sceptique. Parce qu'il se peut qu'elle se fasse des films ridicules, bien entendu...

Après tout, pourquoi se dédierait-elle cette chanson elle-même, voyons...Elle n'est pas égocentrique à ce point, tout de même, qu'elle se persuade fermement.

And I said
Who will bring me flowers when it's over 
And who will give me comfort when it's cold 
And who will I belong to when the day just won't give in 
And who will tell me how it ends and how it all begins 

Alors, elle décide de jouer le simple et lâche jeu de l'indifférence, considérant cette chanson uniquement pour ce qu'elle est, une mélodie délicieuse accompagnée de suaves et talentueuses paroles. Parce qu'à la limite, admettons que ce lyric lui soit dédié... Elle ne peut après tout qu'être flattée par son auteur, en espérant qu'il ne tente désormais plus rien pour nuire à son histoire avec son Raphaël... Oui, « à son histoire avec son Roméo ». Qu'elle ne veut mettre en péril pour rien au monde.

Oh, oh no, yeah
Don't ever say goodbye 

Mais bien évidemment, la jeune fille a bien conscience qu'encore une fois, il se peut qu'elle se montre bien naïve et laxiste face aux actes de son ex-petit ami...

Et cela la perdra sans doute, peut-être un jour. Qui sait...

And I'm only human
I said I'm only human
I'm only human
I said I'm only human
I'm only human
I said I'm only human, I'm human, I'm human

Oh....

Yeah...

 

 

*

 

 

Une demie-heure de coups et blessures plus tard, Kurt Cobain se remet difficilement assis même le sol dans les douches communes de la prison où il a été incarcéré il y a quelques mois.

Tous ses membres le font souffrir et c'est avec grande difficulté qu'il respire désormais ; surement une ou deux côtes cassées, il en est certain et en grimace de douleur.

— M.. Merci... lui fait soudain et timidement le jeune homme qu'il était venu sauver tout à l'heure, — je.. je... mais vous n'auriez pas dû..

— Coucou, toi. Mais il n'y a pas de quoi. Il n'avait pas à te faire subir tout ça, répond très amicalement Kurt, toujours adossé contre son mur de douche et haletant péniblement, — comment tu t'appelles, toi, sinon ? Et quel âge as-tu ? Je t'ai déjà vu trainer à plusieurs reprises dans la cour, qu'il reprend pour poursuivre la conversation avec son jeune comparse qui ne doit pas avoir plus de 25 printemps selon lui.

— Je m'appelle Jonas Dietz, et j'ai 22 ans. Et vous? Répond le jeune prisonnier en s'asseyant aux côtés de son sauveur, étrangement apaisé et rassuré par sa seule présence.

— Kurt cobain, 42 ans! Enchanté, p'tit gars, sourit Kurt en retour tandis que son jeune ami s'adosse confortablement contre le mur, — et pourquoi es-tu là? Si ce n'est pas trop indiscret, bien sûr... qu'il lui ajoute ensuite avec intérêt.

— Je... J'ai tué un homme, répond le jeune adulte.

 — Ah... soupire Kurt en réponse, baissant les yeux pour observer l'eau sale des douches qui s'écoule lentement en direction des trous d 'évacuation.

— Il me faisait du mal... se justifie avec aigreur le gamin presque adulte, comme s'il se sentait jugé par son interlocuteur, — il, il..

— Il faut que tu fasses attention à toi, ici, se contente de faire Kurt d'un air sérieux, dévisageant désormais et de haut en bas son comparse, — tu peux rester près de moi si tu as peur des autres, hein, qu'il propose ensuite, amical, ayant très vite cerné l'orientation sexuelle de son jeune compagnon de cellule, — je te protègerais de tous ces porcs, je te le promets.

— Je...Je.. Oh.. Merci.. Mais je ne veux plus qu'ils vous fassent du mal, comme là...

— Je préfère quelques coups de poings dans ma gueule au fait qu'ils...

— Hey Jonas, t'es là! Je te cherchais partout!! interpelle soudain une voix forte et horriblement rauque à destination du concerné qui s'en fige aussitôt de terreur, — ramène ton cul ici!!! que l'homme reprend, avançant vers le concerné d'un pas rapide.

— Il n'ira nulle part, maugrée Kurt à destination du nouvel arrivant, d'un air mauvais.

 

 

*

 

  

Pendant ce temps, Jeffrey Beckers est au téléphone avec un vieux comparse parisien pour recevoir de sa part une sorte de proposition.. En effet, le brun aux cheveux mi-longs n'a pas l'intention de laisser disparaître ce nom de gang auquel son chef et mentor tenait tant.

C'est donc pour cette raison qu'en cette fin d'après-midi plutôt froide -début d'hiver glacé oblige- il vient de proposer l'éventualité que les « Shinings » soient remontés dans leur intégralité.

Jeffrey reste sceptique. Comment son vieil acolyte compte réellement s'y prendre pour remonter un gang agonisant ?!

Shawn lui répond très vite. Lui serait le dirigeant des Shining Parisiens et son idiot de comparse berlinois de celui basé sur.. Berlin. Ils seraient donc tous deux les dirigeants des nouveaux « Shinings ».

Après tout, ils lui doivent bien ça, à leur ancien leader et ami... Ne pas laisser les « Shining » mourir et disparaître de la rue, puisque c'est ce pour quoi s'était toujours battu leur bien-aimé Darius.

C'est donc sans grandes hésitations que Jeffrey accepte la proposition de son interlocuteur parisien. Et il doit bien avouer qu'il est même très flatté de la confiance que son vieux collègue peut lui porter aujourd'hui. Parce que tout de même.. Lui confier ainsi les rennes de leur futur gang berlinois. Le jeune Beckers en est plus que surpris, sachant que tout deux n'ont jamais été « copain comme cochons », par le passé.

 

 

*

 

 

 

De retour chez eux, le jeune couple incestueux se crêpe une nouvelle fois le chignon sur un sujet puéril et pourtant si insignifiant... aux yeux d'Eva. Mais absolument pas à ceux de Raphaël, qui est profondément vexé et blessé, ce soir.

En effet, le sujet de conversation tourne une nouvelle fois autour de Terry Deher, en effet...

— Non, mais tu faisais tout ça pourquoi, au fond? Tu cherchais à m'énerver, non? Continue encore et encore Raphaël, boudeur, tandis que sa petite amie s'installe sur leur lit pour se préparer à faire quelques exercices de rééducation ; en effet, ses pieds bougeant désormais presque à volonté, elle est des plus motivées pour travailler encore et encore ses mouvements afin d'accroitre toujours plus sa nouvelle mobilité.

— Mais je te le redis, je n'ai rien fait, Raph', se défend simplement la brunette en haussant les épaules, — c'est toi qui paniques et te fais des films tout seul, là!

— Arrête de te foutre de moi ou ça va très mal aller!! la façon dont tu le regardais était tout sauf innocente, et tu le sais!!! Et ta façon de t'accrocher à lui, lààà, « regaaaaarde, mon Terry d'amouuur, il bougeee mon pied, il bouuuuge!!!! ».

— N'importe quoi! Tu peux encore extrapoler, ou tu es au max, là?! Je n'ai strictement RIEN fait ! J'étais heureuse de voir mon pied bouger et je me suis tournée vers la première personne qui était devant moi, c'est tout ! Alors, arrête, putain ! Tu avais qu'à venir près de moi à ce moment-là, toi, comme lui, au lieu de nous faire ta petite crise d'hystérie ! Parce que tu râles, tu râles, mais je pourrais presque en faire autant, quand on voit la scène que tu as faite, POUR RIEN, alors que tu aurais plutôt dû être fou de joie pour moi !

— J'avais pas envie d'être heureux quand toi tu t'amusais à me faire crever de jalousie, bougonne Raphaël.

— Tu es jaloux dans le vent aussi, parce que c'est Terry, quoi ! Sérieux...

— Justement ! C'est Terry ! Ton ex !

— L'ex que j'ai toujours largué pour TOI ! Comment peux-tu encore être jaloux de LUI ?! Certes c'est un bon ami aujourd'hui, mais je ne l'aime pas ! Je t'aime, TOI ! Et tu le sais, en plus.

— Mais lui, il t'aime... maugrée de plus en plus bas Raphaël en ne voulant pas encore abdiquer, mais en se sentant de plus en plus ridicule, — lui, il t'aime, Eva.. Et tu le sais...!

— Je crois que oui, mais je ne l'aime pas, moi! Et je crois que c'est le plus important, non ?! 

— Tu as faim ? Fait d'un coup Raphaël en se dirigeant vers la cuisine pour ouvrir la porte du réfrigérateur et détailler son contenu, reprenant ensuite avec une sérénité mensongère, — hmmmm.. Moi j'ai un petit creux!

— Pourquoi as-tu si peu confiance en moi, Raph' ?? continue Eva, désormais profondément vexée, — comment peux-tu être jaloux de Terry, alors que tu sais que c'est toi que j'aime ?! Après tout ce qu'on a vécu et affronté pour être ensemble, comment peux-tu, douter de moi, comme ça ?!

— La jalousie est la plus belle preuve d'amour...se justifie, Raphaël en sortant du frigo de quoi faire quelques sandwichs.

— Non, c'est la confiance qui est la plus belle preuve d'amour !

— Oui, mais il faut une part de jalousie en amour ! C'est normal que je sois jaloux d'un pauvre mec qui lorgne sur ma copine depuis des lustres !

— Certes, mais toi tu n'es pas jaloux, tu crains carrément quelque chose ! Comme si toi, tu pouvais craindre quelque chose venant de mes sentiments... Alors que tu as toujours été le seul !

— Tu en as pour longtemps avec ton débat stérile ? Commence à s'agacer Raphaël en remplissant désormais et nerveusement, son sandwich au jambon.

— C'est toi qui l'a commencé ce débat, « stérile », je te signales !

— Peut-être, parce que je suis jaloux, oui.. Pas envers n'importe qui, mais envers ce connard, oui, logique. Parce que je sais qu'il t'aime encore ! Et toi tu le sais aussi, mais tu aimes ça, faire ta petite courtisée qui a du succès ! Puisque tu ne te comportes pas avec lui comme tu te comportes avec les autres gars du groupe, étrange, n'est-ce pas ?! Mais bon logique après tout, c'est Terry... Teeeeerry !

— N'importe quoi ! Arrête d'insinuer de la merde ! C'est normal que je sois plus proche de lui, je le connais beaucoup plus que les autres, putain ! En plus ta crise elle me fait bien rire parce que je ne suis pas connue pour être infidèle, MOI !

Ouch. Ressortir les vieux dossiers en pleine dispute n'a jamais été une bonne chose en amour.

Jamais...

Et c'est pour cette raison que Raphaël ne répondra rien à cette dernière phrase des plus blessantes, préférant aller s'enfuir dans la salle de bain en claquant vivement la porte. Il a besoin de méditer, déglutir de rage, cogner dans un mur ou deux, voire peut-être se mordre furieusement les lèvres.... Tandis que sa petite amie se morfondra et le maudira, seule assise sur leur grand lit. Furieuse et blessée qu'il doute autant de sa fidélité pourtant sans faille.

...

...

...

— Je m'excuse, reviens maintenant!!!! PARDONNNN je retire ce que j'ai diiis! qu'elle craquera finalement la première et d'une voix forte pour qu'il l'entende de la salle d'eau, — allez reviens, reviens, reviennnnnnns!!!!!!!!!!

— C'était la plus grosse erreur de ma vie, et ce n'était pas avec toi, surgit enfin et vivement Raphaël de la salle de bain, le visage crispé par la colère et la détresse, pour que son interlocutrice lui ajoute immédiatement,

— Je sais, excuse-moi! Maintenant viens près de moi!! ça me gonfle qu'on se dispute pour lui, c'est débile!! jamais il ne te fera d'ombre en plus, c'est impossible, ça, et tu le sais!!

— Oui, mais s'il recommence ses petits jeux de séduction, qui en sont, ne le nie pas, je lui casserai la gueule et ça sera beaucoup plus violent que le petit coup dans le bide, Eva, je te préviens!! Qu'il ose reposer sa main de merde sur ton visage et ses propres parents ne le reconnaitront pas!!!!

— T'es trop sexy quand tu parles comme ça, tu sais ?! Aaaahhh...

— Arrête de te moquer de moi, je ne plaisante pas!!! bougonne Raphaël en sentant sa colère disparaître peu à peu, lentement remplacée par une honte infinie de se réaliser si pathétique.

— Mais moi non plus, je ne plaisante pas! ♪ Raphaël, est un dieuuu de l'amouur, ouh ouh ouuuhhh.. ♪  Lui minaude en chantonnant et avec sensualité sa petite amie, en lui tendant ses bras pour l'inciter à la rejoindre au plus vite.

Chose qu'il fait d'ailleurs avec hâte, et sans réfléchir au final, afin d'entamer avec sa moitié une longue série de baisers tendres et passionnés...