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    Le lendemain, Eva se dépêche de téléphoner à sa meilleure amie dès son réveil pour lui raconter sa fin de soirée : l'étrange appel de son Raphaël, et ce que la jeune fille avait surpris derrière la porte de la chambre de son binôme.

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    Oh, bien évidemment, Paula en rougit très vite de gêne et s'excuse honteusement d'avoir ainsi lâché son amie en plein milieu de la soirée pour se jeter dans les bras de celui qui a bien été, pour elle, la veille, le meilleur « coup » de sa vie toute entière ! -avant son Wilfrid, mais chut! Ne le répétez pas! Cela reste entre elle et vous.-

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    Eva rit très vite des folies de son amie, innocemment amusée.

    Avant de lui conseiller avec inquiétudes qu'il faudrait qu'elle appelle son Wilfrid. Par simples précautions. La brunette est anxieuse. Son Roméo à elle avait l'air bien sceptique à l'autre bout du fil la veille et tout cela ne lui dit rien qui vaille.

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    Sitôt conseillée, Paula n'attend alors pas pour tenter d'appeler son guitariste préféré, dès sa conversation avec sa meilleure amie achevée.

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    Une sonnerie dans le vide. Une, puis deux, puis trois...

    Puis quatre...

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    Un répondeur qui se déclenche. Rien de plus agaçant.

    La jeune fille relance l'appel.

    Le même scénario se reproduit une dizaine de fois.

    La demoiselle perd patience et commence s'angoisser terriblement.

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    Pourquoi ne répond-il pas?!

    Elle n'ose cependant pas laisser de messages sur sa messagerie.

    Dehors, derrière les volets, on peut constater que le ciel est gris et nuageux.

    Tout comme le coeur de la jeune fille en ce moment précis.

    Les souvenirs de la veille ne lui procurent soudain plus le même enthousiasme...

    Simple coïncidence ou prise de conscience...?

     

     

    *     *

    *

     

     

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    Quelques jours plus tard, les TroubleMakers sont enfin de retour de tournée et à un moment où Wilfrid se retrouve seul dans le petit local de son groupe, parce que tous ses amis vaquent à des occupations diverses et variées, la porte d'entrée s'ouvre doucement...

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    Paula Lehnard.

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    La jeune fille dont il ignore les appels depuis trois jours maintenant.

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    À un moment, elle avait même tenté de l'appeler en anonyme.

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    Mais il lui a raccroché au nez dès qu'il a reconnu sa voix à l'autre bout du combiné.

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    Alors aujourd'hui elle vient en fourbe et discrètement ici car elle était persuadée de le trouver seul en ces lieux en ce moment précis. Une intuition, pourrait-on dire.. Et de nombreuses prières pour l'espérer.

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    — Wil'...? Qu'elle ose timidement en pénétrant dans la pièce, le coeur serré. Évidemment, elle n'est pas idiote et se doute bien qu'il se trame ici quelque chose de très mauvais pour son couple, au vu de l'indifférence que lui a montré son amour ces derniers jours.

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    Oh, mais bien évidemment, qu'elle avait bien entendu tenté d'en parler à son amie Eva, pour que celle-ci se renseigne auprès de son roméo Raphaël, pour que lui la renseigne sur le fait que son comparse guitariste ne prenait plus aucune communication de sa petite amie... Seulement, le jeune Bauer semblait lui aussi jouer un bien désagréable petit jeu :

    « Je n'en sais rien. Peut-être est-il mal luné! Je ne suis pas dans sa tête... » qu'il haussait toujours les épaules à sa moitié.

    Pour que les filles, Paula et Eva, songent en retour et entre elles, « — mouais, mon oeil, oui... », plus sceptiques que jamais.

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    Oui, les deux jeunes filles le savaient, s'en doutaient, l'avaient deviné, que quelque chose se tramait au sein de la petite bande de leurs garçons. On leur cachait quelque chose... au sujet de Wilfrid.

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    — Qu'est-ce que tu fais ici, toi? Se contente de soupirer avec désintérêt le brun à la jeune fille, sans même prendre la peine de lever le regard vers elle. Elle ne mérite pas cette courtoisie... 

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    — Tu.. Tu peux m'expliquer ce qu'il se passe...? Ne se démonte pas Paula d'une voix tremblante pourtant en se rapprochement doucement de son interlocuteur, le coeur serré, tandis que celui-ci se met à fouiller nerveusement l'une des poches de son Jean pour en extraire son téléphone portable afin de se dépêcher de filer dans la rubrique de ses SMS reçus pour... et d'un geste vif et assuré, lui brandir soudain son cellulaire sous le nez. Évidemment, Paula reconnaît aussitôt la poignée de photos immondes qui lui est montrée et..

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    ...Elle en tombe aussitôt sur le sol, à genoux de stupeur, de honte, et d'effroi. Ses yeux s'emplissent de larmes en moins de deux et c'est en portant une main à son coeur qu'elle se justifie très vite, bégayant à moitié et tremblant de tous ses membres,

    — Je, je.. Attends!!! Je peux tout t'expliquer!!! C'est...C'est pas ce que tu crois, Wil...!!! C'est, c'est, c'est...

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    — Y a rien à expliquer et je me demande vraiment si le pire est ce que tu as fait ce soir-là, ou plutôt le fait que tu oses encore te présenter devant moi.

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    — Dégage de mon local, Paula. Disparais de ma vie, de ma vue. À tout jamais. Je ne ressens plus rien pour toi, à part peut-être un profond dégoût et une amère lassitude de t'avoir consacré autant de temps...Tu n'es plus rien, tu ne vaux plus rien, tu n'as aucune personnalité, tu n'évolues pas, mais stagne dans la bêtise, tu n'as finalement vraiment rien pour toi et plus j'y réfléchis, plus je me demande ce que j'ai pu un jour te trouver. L'amour rend bel et bien aveugle et désormais que je suis plus lucide que jamais, tout tes défauts s'affichent brutalement devant ma gueule, à tel point que je ne sais même plus si je pourrais encore te citer rien qu'une seule qualité ! En avais-tu seulement une seule ? À part peut-être d'être un bon coup, et encore... Non, vraiment, sincèrement, tu n'es vraiment plus rien à mes yeux, Paula Lehnard... Et tu peux me détester, me haïr, me mépriser pour ces paroles, m'insulter, jurer, cracher sur mon nom! Hurler ta haine et tout tenter pour te venger! Je m'en bats les couilles. J'en ai rien à cirer. J'm'en branle. J'm'en fous de tout. De toi. De nous. Tout est fini. Alors va pourrir dans le caniveau le plus proche et oublie moi, moi et mes potes. Tu n'existes plus, dans ce local. 

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    Ces phrases, coupées en tirades si posées, sont prononcées de façon si glaciale et impassible que la jeune fille ne trouve rien à y répondre,

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    ...Préférant à la place se lever brusquement pour se jeter en courant vers la sortie de la pièce, le coeur en miettes, le visage trempé par un torrent de larmes, et une main sur la bouche pour s'empêcher de hurler dans la rue ; ses yeux sont si embués de larmes que c'est bien entendu par chance qu'elle ne fonce pas tête baissée dans tout les passants qui croisent son chemin.

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    C'est chez elle qu'elle se précipite ainsi, pour hurler à sa mère avec désespoir et rage que celle-ci est forcément au courant de la mésaventure qui lui arrive avec son petit ami !

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    — Tu n'as que ce que tu mérites, mon ange, que son unité maternelle lui répondra simplement, dans un haussement d'épaules des plus lasses et indifférents.

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    Oui, indifférente, c'est bien ce qu'est cette mère de famille blasée, aujourd'hui.

    Elle qui a surpris il y a quelques jours son propre enfant, la chair de sa chair, en train de se comporter telle une trainée, sous son propre toit. Une image qui a marqué la femme d'âge mûr...

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    Une image qui l'a choqué. Elle qui respectait pourtant encore sa fille malgré le fait qu'elle sache bien que sa progéniture n'avait jamais été la pudeur incarnée.

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    Une image des plus répugnantes qui ne la quitte plus aujourd'hui et qui l'empêche, en ce moment précis, de se précipiter consoler l'amour de sa vie qui s'écroule désormais au sol, en larmes, le coeur en miettes à cause d'un amour réel et profond, mais malheureusement perdu...

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    - Qu'est-ce que je vais devenir sans lui...

     

     

    *

     

     

    Only One - Alex Band ♪

     

     

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    De son côté, Wilfrid est lui aussi en train de crever de douleur tout en marchant, ou plutôt en titubant, dans la rue, mp3 sur les oreilles. Il avait besoin de prendre l'air et juste après que son ex-petite amie se soit jetée hors de son local, il en a fait de même pour marcher le nez au vent, tel un pantin désarticulé et animé par des fils invisibles et inconnus.

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    Soudain, tout à coup, une chanson aléatoire vient lui titiller les oreilles pour le faire soudain se figer sur place...

    Une chanson d'amour.

    ...To forgive, forget, move on!
    Cause
    we've got...

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    One life to live!
    One love to give!
    One chance to keep from falling!

    Qui au fil des paroles le fait rire jaune.

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    One heart to break!
    One soul to take us!
    Not forsake us!

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    Se prendre la tête entre les mains.

    Only One!
    Only One!

    Rire aux éclats et bruyamment.

    Se moquant intérieurement de ces paroles si niaises et peu réalistes !

    Just you and I!
    Under one sky!


    Les détestant du plus profond de son âme...

    ..

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    One life to live! - mais plus avec elle!
    One love to give! - mais plus à elle!
    One chance to keep from falling! - mais plus avec elle!
    One heart to break!
    One soul to take us!
    Not forsake us!

    Parce qu'à une époque, il y croyait lui aussi, à toutes ces conneries!

    Only One! - Only two!

    Il y croyait lui aussi, comme un gros niais attardé! Que sa Paula était sa only one! Qu'il était sans doute venu sur terre pour la rencontrer elle et pas une autre! Que leurs destins étaient liés et que ce n'était qu'ensemble qu'ils vieilliraient! Deviendraient de vieux croûtons! Feraient peut-être une clique de gosses! Voire simplement un ou deux! Se chamailleraient ensuite devant un Scrabble dans une maison de retraite... Oh que oui, qu'il y croyait, à tout cela! À toutes ces conneries! Il lui avait même offert cette bague... ! Cette bague qui symbolisait une promesse de mariage! Il voulait l'épouser, un jour! Vraiment! Il voulait faire sa vie avec elle! Et rien qu'avec elle! Elle était la femme de sa vie! Elle, et rien qu'elle...!!! Ils se seraient mariés un jour, c'était décidé! C'était prévu! Il lui en avait fait la promesse! Il lui aurait tout donné! Parce que tous les deux ne formaient qu'un! Parce que tous les deux étaient un couple hors-norme! Uniques! Qui pouvait presque se moquer des autres histoires qui foirent, elles!

    Mais quelle bonne blague. Toutes ces conneries! Mais quelles bonnes blagues! Aucun couple n'est différent des autres. Aucune histoire n'est différente des autres.

    Et le monde entier doit vraiment se rendre à l'évidence. Le monde, et surtout tout ces chanteurs idiots et à côté de la plaque qui clament partout l'intensité et la débilité de l'amour!

    L'amour, quelle merde! La fidélité n'existe pas! Ou que dans les contes de fée! (et encore! Il faudrait savoir ce qu'il se passe après le « The End! »)

    Non, il n'y a pas d'amour en ce monde!

    Non!

    Il n'y en a aucun!

    Ou alors avec une date d'expiration! De péremption!

    Parce que lui ne l'aime plus, sa soi-disante « Only One! » Il ne l'aime plus! Il en est certain! Il n'éprouve plus rien pour elle! Que du dégoût! De l'indifférence! Alors, quoi?! Que peut donc lui en déduire l'autre chanteur qui lui beugle dans les oreilles là?! Il lui dit déjà?! Une seule! Une seule! Only Oneeee!

    Et ces conneries des premiers amours qui resteront toujours les derniers...

    Wilfrid s'en paie un nouveau fou rire!

    Mensonges!

    Foutaises!

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    Les premiers amours ne servent éventuellement qu'à rendre les suivants plus forts!

    Qu'il se grommelle à lui-même avec certitude.


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    Presque une semaine de séparation à cause de la tournée des TroubleMaker, cela donne envie de faire des folies lorsque les couples se retrouvent enfin!

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    Raphaël et Eva illustrent bien cette réalité, ce soir. 

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    L'ambiance est chaude dans leur appartement. Chaude, voire ardente, même!

    Raphaël n'en peut plus.

    Et c'est tout à coup, après une longue série de baisers enflammés avec sa moitié, et alors qu'il se préparait à lui écarter les cuisses afin de lui faire un doux et sensuel cunnilingus, qu'elle le repousse soudain, brusquement terrifiée par le fait qu'il lui ait baissé sa culotte d'un geste un peu trop rapide à son goût.

    — Arrête, non, qu'elle lui marmonne dans un bégaiement anxieux et désespéré tout en se reculant de son amant pour remonter d'une main fébrile le maigre bout de tissu qui recouvre ses parties intimes,

     

    — Je ne veux pas, s.t.p., excuse-moi, qu'elle enchaine ensuite maladroitement, honteusement, tout en tremblant de tout ses membres.

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    — J'ai fait quelque chose de mal ? Ne comprends évidemment pas Raphaël dont l'égo vient de dégringoler tout au fond des chaussettes qu'il n'a pas, 

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    — C'est quoi ton problème, en fait? À me repousser tout le temps ? Je ne te plais plus? Qu'il poursuit très vite, dans plusieurs tirades stressées, tel un automate, une mitraillette balançant mot après mot sans interruption et sans les peser, — non, mais faut que tu me dises ce qu'il y a maintenant, hein, parce que je veux bien être gentil, mais y'a des limites ! Tu veux plus coucher avec moi, c'est ça ? Tu me trompes ? Préfère la masturbation ?

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    — Arrête ! L'interrompt son interlocutrice dans un ravalement de sanglots, — ça n'a rien à voir..Je, je...

    — Si, ça a forcément « à voir » avec quelque chose ! Commence à grogner Raphaël en serrant les dents, — tu ne me désires plus, en fait. J'suis juste un copain pour toi, simplement là pour te câliner et te faire des bisous, quoi ! Qu'il finit par ironiser avec aigreur en se relevant du lit d'un bond nerveux, pour se poster debout et dos à sa petite amie, l'air blasé, boudeur, agacé, anxieux, blessé, désespéré...

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    — Lorsque j'ai été enlevée.. Raph'... Je.. tente de reprendre Eva dans un faible sanglotement, les yeux humides et la tête baissée de honte pour ne pas avoir à croiser l'éventuel regard de son interlocuteur,

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    — Je, je.. Enfin... je, je..

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    — enfin voilà quoi.. Je..Je.. Il y a des types qui.. qui.. Qu'elle poursuit, avec une difficulté palpable, avant de s'interrompre elle-même, totalement incapable de continuer son début de phrase.

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    Une continuation bien inutile de toute manière.

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    Parce que Raphaël vient soudain de tout réaliser.

    En une fraction de seconde, il vient soudain, de tout réaliser...Un déclic.

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    Mais il reste cependant figé.

    Debout, le dos tourné à sa petite amie, il reste bêtement figé, comme un con totalement impuissant et inapte à prononcer le moindre mot.

    Il aimerait réagir, pourtant. En prononcer quelques-uns, des réconfortants, des chaleureux, peut-être... Mais il n'en trouve aucun. Ses lèvres semblent scellées. Fermement cousues par quelque chose qu'il ignore lui-même...

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    Ses yeux par contre, eux, sont plus expressifs et s'humidifient lentement. Puis il se mord les lèvres, en sentant son estomac se nouer dans tout les sens. Puis, Et sans qu'il s'en rende compte, il se met à serrer les poings de rage.

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    Il aimerait cogner dans quelque chose. Laisse son regard bifurquer nerveusement de droite à gauche... N'osant pas encore se retourner vers sa petite amie.

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    Le silence de la pièce devient de plus en plus pesant...

    Les minutes s'écoulent lentement.

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    — Pa..Pardonne-moi.. Ose soudain et timidement Eva entre deux hoquets, sanglots, les lèvres tremblotantes.

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    — Qu'ai-je à te pardonner..? Se retourne enfin et vivement Raphaël vers son interlocutrice en larmes, — c'est, c'est moi... c'est moi ne suis qu'un connard qui.. qui...

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    Le jeune homme laisse désormais échapper de ses yeux les nombreuses larmes qu'il retenait pourtant désespérément. Parce qu'il ne voulait pas s'effondrer ainsi. Devant elle. Non, il ne voulait pas s'effondrer ainsi...

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    — N'importe quoi, tu, tu es fou de dire ça.. Le contredit Eva en n'osant pas encore revenir affronter son regard pourtant affectueux : elle affronterait son désespoir de la réaliser souillée... elle en est certaine et cette douloureuse honte qui la ronge l'en empêche.

    — Il fallait me le dire avant, Eva.. Reprends Raphaël toujours d'une voix tremblante, mais en revenant cette fois sur le lit qu'il venait de quitter, — Pa..Pardonne-moi, toi.. Toi, pardonne-moi... c'est toi qui dois me pardonner... qu'il fait à nouveau en allant se placer derrière sa petite amie afin de s'asseoir derrière elle pour l'enlacer avec toute la tendresse du monde, — Pa.. Pardonne-moi... j'aurais dû le voir avant, j'aurais dû... Je ne suis qu'un gros connard...

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    — Mais arrête, ce n'est pas vrai, et ce n'est rien, tente de lui sourire timidement sa petite amie, le regard toujours baissé de honte face à ce qu'elle est aujourd'hui dans les bras de cet homme merveilleux qui semble pourtant décidé à l'accepter pour ce qu'elle est aujourd'hui, tout en lui demandant, lui, « — pardon ».

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    Mais qu'elle blague, qu'elle songe tristement... Comme si lui devait s'excuser de quelque chose face à elle...

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    — Je comprends tout, maintenant.. la.. la salle de bain, et tout... N'est-ce pas...? Poursuis Raphaël en enfouissant sa tête dans le cou de sa moitié, — et malgré tout cela, je n'avais rien vu... Pardon, pardon, pardon...

    — Mais ça va, Raph'! S.t.p., arrête d'en parler... Je.. Je...

    — Mais si, mon ange.. Il.. Il faut en parler, de ça... Et toi, tu, tu en as parlé à quelqu'un...? à ta psy, peut-être, avant d'arrêter les consultations...?

    — Non, rougit honteusement Eva en tordant le drap du lit dans ses petites mains, — mais ça va, Raph', alors s.t.p...

    — Non, ça ne va pas. Ça ne peut pas aller, Eva. Alors, pour une fois, arrête de faire ta fière et grande, s.t.p...

    — Je te dis que ça va. Il faut juste que tu me laisses du temps, s.t.p., Raph'... tout ce que je te demande, c'est du temps... Et ça va aller, je te le promets, que ça va aller... balance d'une traite la jeune fille en se mordant nerveusement la lèvre inférieure, — je te demande juste du temps, que tu sois patient avec ce que tu sais... s.t.p...  

    — Ok. Réponds alors et simplement Raphaël en resserrant un peu plus son emprise autour de sa petite amie ; laissant ensuite le silence reprendre possession des lieux. Parce qu'il n'a tout simplement plus rien à ajouter. 

    Et elle non plus, d'ailleurs...

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    Alors, ils resteront tout deux ainsi, tendrement enserrés dans les bras l'un de l'autre, tout en se déposant parfois, de temps en temps, de doux et chastes baisers sur le bout des lèvres.

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    Ils n'ont besoin de rien d'autre après tout... Puisque rien qu'ainsi, ils se rappellent mutuellement de la force de leurs sentiments respectifs qu'ils éprouvent l'un envers l'autre.

     

     

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    Sous la protection tout d'abord de Kurt Cobain, puis ensuite de proches de celui-ci encore plus influent que lui dans la prison, le jeune Jonas Dietz fini, au fil des jours, par acquérir une certaine personnalité et aisance au sein de l'établissement carcéral.

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    En effet, sa position de « petit protégé des grands » l'incite de plus en plus à se sentir supérieur aux plus faibles, à son tour....

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    Cette fameuse loi du Talion. « Oeil pour oeil, dent pour dent! ». Qui ne l'a jamais marmonné au moins une fois dans sa vie? Personne. Et certainement pas ce jeune adolescent qui en a trop vécu, ici, dans cette prison malfamée où les gardes se comptent sur les doigts d'une main et sont plus corrompus qu'une clique de mafieux.

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    Il était jeune, faible et innocent...avec un look de poupon qui ne faisait pas peur à une mouche. Oui, ces petites oreilles de chat qu'il s'obstinait à porter... Combien de fois certains ont pu les montrer du doigt en pouffant de rire, voir en se léchant les babines.

    «  — Tu vas prendre cher, p'tit Pd.. » qu'il se répétait souvent dans les couloirs.

    « — Oh, oui, tu vas voir, ton p'tit cul, c'qu'il va prendre, tu vas voir...!!! »

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    Presque tous abusaient de lui jusqu'à le faire saigner et pleurer de douleur...

    Jusqu'à lui faire redouter la position assise pour de nombreuses heures.

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    Jusqu'à lui faire détester la vie, les trois quarts du temps.

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    Alors aujourd'hui il rend la pareille.

    Aux plus faibles. Aux nouveaux.

    Aux discrets qui eux n'ont jamais eu la chance d'être pris sous l'aile d'un détenu respecté.

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    La roue tourne, n'est-ce pas?

    C'est ce qu'il se dit pour se justifier ses actes.

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    Oh, bien sur, son mentor, Kurt Cobain, ignore tout de ses faits et agissements plutôt honteux. Parce que l'adolescent sait bien que celui-ci n'apprécierait pas. Voire serait très, très, choqué, et aussi déçu.

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    Alors devant celui qu'il surnomme affectueusement «Senseï », pour rire, se montrer amical, l'adolescent devenu mauvais reste toujours le même. Le gentil, fragile, et doux Jonas.

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    Il ne veut décevoir cet homme auquel il tient tant pour rien au monde...

    Et pourquoi donc?

    Une question pour l'instant sans réponse...

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    Parce qu'une réponse à laquelle l'adolescent ne saurait répondre sans se mettre à rougir aussitôt en moins de deux.


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    *     *

    *

     

    Les jours s'écoulent et la douleur de Paula ne s'atténue pas. Bien au contraire... Elle ne fait que s'amplifier avec le temps. Son ex-petit ami ne fait que la hanter et l'oublier lui est totalement impossible. Tirer un trait. Déchirer une page. Crayonner le passé à l'aide d'un feutre indélébile... qu'ils disent tous bien souvent. Qu'ils conseillent tous, bien souvent! Mais ont-ils tous déjà vécu une vraie rupture amoureuse pour oser en balancer d'aussi bonne? Ces conseils ridicules... Paula ne peut pas l'oublier.

    Et comment le pourrait-elle, d'ailleurs? Le sortir de sa vie, lui? Son Wilfrid qu'elle aimait tant? Impossible. Oui parce qu'elle l'aimait plus que tout au monde, même si elle n'avait jamais été capable de le lui faire réaliser. Oh que oui qu'elle était prête, elle aussi, à faire sa vie avec lui, oh que oui! Mais avant ça, elle voulait vivre un peu sa jeunesse et peut-être faire des bêtises. Elle en avait besoin. Elle n'est qu'une sale gamine, après tout. Elle est immature et stupide et le reconnait. Elle s'avoue aussi jalouse, de temps en temps. De lui. De tout ce qu'il est, de son évolution... De sa maturité qu'il a gagné au fil des mois, passant du "mauvais garçon", au "gars bien".

    Oui elle le détestait un peu pour tout cela. Parce que lui évoluait et elle stagnait... Sans parler de cette nouvelle année qu'ils commençaient tout deux séparés dans deux établissements différents. Cela la rendait folle, elle ! Et comment cela aurait pu en être autrement, d'ailleurs ? Sachant que lâché tout seul dans sa faculté, elle ne pouvait pas le surveiller ! Il pouvait se rapprocher d'autres filles... Les apprécier, peut-être. Un peu, beaucoup, c'était possible...! Elle en devenait dingue de frustration ! Il n'était qu'à elle...!! Il n'était que son "mauvais garçon" rien qu'à elle, son huître, qui ne s'était ouvert réellement qu'à ses côtés. Et elle était fière de ça. Elle l'avait changé ! Ce n'était qu'elle qui avait réussi cet exploit et pour cette raison, il ne l'abandonnerait jamais, puisqu'elle avait réussi l'impossible, elle scellait le fait que tous les deux étaient âmes soeurs... Elle avait été la seule à percer la carapace du "bad boy" pour réussir à se faire aimer réellement de lui. C'était un signe, tout de même. Un signe qui la rendait fière et plus que certaine de la solidité de son couple.

    Et aujourd'hui voilà qu'elle se casse les dents en le découvrant juste blasé et lassé, même pas furieux. Le pire, pour la jeune fille. Se rendre compte que plus aucun de ses actes ne pourrait désormais l'atteindre. Réaliser que quoiqu'elle fasse, elle ne saura plus jamais l'énerver, le blesser, ou le faire réagir comme avant... Comme la dernière fois, ou après qu'il ait réalisé qu'elle séduisait le beau Vick, il s'était précipité lui passer une bague de fiançailles au doigt...

    L'amour n'est un jeu des plus cruels. On joue, on tente, et on séduit... Des fois ça passe. Parfois ça casse. Souvent ça lasse...

    Et après il faut tenter de recoller les morceaux. La jeune fille serait prête à tout pour ça. Si seulement cela était possible...parce que cela fait maintenant quelques jours que tout est terminé entre eux et elle ne reçoit pas vraiment les échos qu'elle attendait sur sa vie à lui après-rupture...

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    En effet, elle qui aurait l'aimé le savoir aussi désespéré qu'elle par leur séparation, apprend par-ci par-là qu'il est au mieux de sa forme aujourd'hui et commence même à répondre à certaines avances à sa faculté. Oui, parce qu'à l'époque Paula sait bien qu'il était des plus fidèles et se fichait des nombreuses jeunes filles qui le courtisaient, laissaient tomber leurs trousses devant lui, juste pour pouvoir ensuite s'abaisser sensuellement sous son regard... dans le simple but de lui mettre sous le nez leurs généreuses poitrines.

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    *Syka & Miyako fight for Wilf!

    Oh oui, les filles sont bien habiles et imaginatives en séduction, oh oui.

    Et c'est pour cette raison que Paula craint désormais vraiment le pire.

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    Parce que sa trahison, son horrible trahison, il ne la lui pardonnera jamais. C'est plus que certain.

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    Et en face d'elle et de tout le mal qu'elle a pu lui faire, il y a ces tas d'autres jeunes filles qui l'entourent aujourd'hui pour lui rappeler encore et encore à quel point il peut être un jeune homme séduisant, un musicien talentueux, doté de moult qualités, tout en étant, en plus, célibataire et donc, libre comme l'air.

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    Bref, Paula ne donne pas un mois à son ex-amour pour qu'il l'ait complètement oubliée puis remplacée.

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    Eva la console affectueusement à ce sujet. Comme d'habitude, elle l'a reçu chez elle en larmes et l'air désespéré. Comme d'habitude, sa meilleure amie s'est une nouvelle fois effondrée dans ses bras, lui pleurant qu'il ne lui restait plus qu'elle, aujourd'hui...

    « — Il va redevenir un pauvre quetard de merde!! Tu vas voir! Pfff, il est misérable!!! »

    « — Avec ses connasses à sa fac, là!!! Il va me le payer!!! Je le hais!!! J'vais me débrouiller pour lui pourrir sa vie, il va rien comprendre!!! Je le hais!! J'veux qu'il souffre!! J'veux qu'il soit seul, j'veux qu'il crèèèève!!»

    « — Comment peut-il me zapper comme ça?!? Comment peut-il?!? »

    « — Et comment il m'a parlé ce sale chiennn!!! Tu trouves qu'il a raison toiii ?! Sérieux j'vais le buter!!!! Il se prend pour qui ?!? Il se croit parfait lui peut-être?! Alors qu'il est plein de défauts lui aussi, pauvre bouffon, va!!!! C'est bon quoi!! L'abus!! Raaaahhh, j'le haiiiis!!! J'le haiiiiisssssss!!!»

    «  — Après tout ce qu'on a vécu ensemble!! Comment il peut se remettre aussi vite ?!?»

    « — Aucune décence!! Il pourrait attendre un peu avant d'aller lorgner sur les premières poufs du coin quand même!!! »

    « — Et il disait que j'étais la femme de sa vie!!! Abruti, va!!! »

    « — Evaaa! Aideee moi!!! Il m'a réellement oublié, tu crois?! »

    «  — Qu'est-ce que je vais devenir, moi, maintenant? »

    « — Il faut que tu m'aides, Eva, je t'en prie!!! Raphaël pourrait lui parler?!! Tu pourrais faire passer subtilement des messages par Raphaël?! »

    « — Tu crois que si je jouais à -fuis moi, je te suivrais-, il me suivrait?! »

    «  — à ton avis, sincèrement, c'est mort?! »

    « — Evaaaa, aide-moi!!! »

    « — J'ai besoin de lui!!! »

    « — Ce connard quand même!! Il m'avait demandé de l'épouser un jour!!! »

    «  — Je fais quoi moi maintenant?... »

    «  — J'ai besoin de lui... Eva... Je l'aime.»

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    Alors la jeune Beckers fait tout son possible pour réconforter son amie de toujours, tenter de l'aider à se relever, lui rappeler que la vie mérite encore d'être vécue... même si son interlocutrice lui sanglote souvent que « sans lui, elle n'est plus rien... ». Parce qu'il faut qu'elle y croit. Parce que certes, les ruptures amoureuses sont les plus grandes souffrances que l'être humain ne pourra jamais endurer, mais une chose est sûre et certaine, tout le monde s'en remet un jour et sa meilleure amie ne fera pas exception à la règle.

     

     

     *     *

    *

     

     

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    La veille de Noël est enfin arrivée. La célèbre, nuit du vingt-quatre décembre... qui se passe généralement en famille, n'est-ce pas.

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    Mais encore faut-il en posséder une...

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    Alors, Eva Beckers se fera héberger, le temps d'une nuit, au sein de celle de son Raphaël.

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    En effet, elle et son petit ami s'en sont allés passer cette nuit magique avec la mère de celui-ci, dans leur petite maison sur Klausdorf.

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    Oh bien sur, qu'elle aurait bien aimé aussi passer ce réveillon avec son frère adoré, mais...

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    Mais elle ne doit pas oublier que lui aussi a une vie de famille, aujourd'hui.

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    Une fiancée enceinte et un petit garçon.. Avec qui il est logique qu'il passe cette soirée-là.

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    Mais de toute manière Eva Beckers ne trouve rien à redire au fait de passer son vingt-quatre décembre à découvrir un peu le monde dans lequel à vécu l'amour de sa vie. Ce petit port de pêche... ce minuscule et charmant petit village de pêcheurs.

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    La soirée est donc des plus agréables pour chacun des participants et vers vingt-trois heures, Tobias se mêle même à la fête pour souhaiter un joyeux Noël à tout ce petit monde ; le jeune homme étant sur Klausdorf pour ce jour, lui aussi, cela serait un comble qu'il ne passe pas faire un coucou à son comparse musicien, tout de même !

    Jeyne profite discrètement de l'arrivée impromptue, mais très agréable cela dit, du jeune Tobias, pour « kidnapper » affectueusement son fils et s'en aller discuter avec lui à l'extérieur.

    « Elle a besoin de se retrouver un peu toute seule avec son roudoudou », qu'elle trouve pour justification pour ne pas intriguer les deux autres convives.

    « Ils ne seront pas longs, ils ne vont faire que marcher un petit peu, rien que tous les deux, comme au bon vieux temps.. » qu'elle prévient ensuite, dans l'espoir de ne pas éveiller deux esprits paranoïaques.





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