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    Plus d'une heure de calins réconfortants plus tard avec son Roméo retrouvé, -parce que son chéri en avait bien besoin, parce que son moral était au plus bas et qu'il n'a fait que lui pleurer dans les bras pendant plus d'une demi-heure, en gémissant et s'agrippant à elle avec désespoir-,

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    Eva finit par lui demander timidement de l'accompagner dans la salle de bain, qu'elle prendrait bien un bain chaud. En effet, depuis sa libération la jeune fille n'a plus pris la moindre douche et elle se sent des plus crasseuses en ce moment, elle doit bien l'avouer...

    — Pas de soucis, se relève très vite son interlocuteur pour l'attraper tendrement et la prendre dans ses bras pour la porter en moins de deux jusqu'à la salle d'eau.

    — Tu peux me poser sur le rebord de la baignoire, je vais me débrouiller!! sourit timidement la jeune fille rougissante une fois arrivée à destination.

    — Je sais que tu es une grande fille qui fait des pieds et des mains pour tout faire comme une grande, toute seule! Hausse les épaules Raphaël en obtempérant affectueusement, déposant sa moitié comme demandé,

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    — mais je peux t'aider si tu le désires.. Ou alors, je t'abandonne ici, comme d'hab, avec ta chaise roulante!

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    — Abandonne-moi, oui, lui tire la langue avec malice son interlocutrice, — comme tu le dis, je suis une grande fille!

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    — Nia nia nia.. Mais j'y pense, ça fait longtemps qu'on a plus pris de bains ensemble, toi et moi...répond Raphaël avec un petit sourire en coin plus que pervers, — alooors ? Ça te dis pas ?!

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    — Euh.... Non merci.. En perd sourire Eva en déglutissant péniblement, — excuse-moi, Raph'...qu'elle bougonne ensuite, timide et honteuse, tandis que le concerné se contente de se rapprocher d'elle pour lui déposer un doux baiser sur les lèvres avant de filer au plus vite de la pièce en lui souriant simplement que, — c'est pas grave, ma puce!

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    « Le pauvre.. Il n'a pas dû comprendre.. » a ensuite bien honte la jeune fille en se déshabillant avec hâte tandis que son bain se remplit doucement, laissant échapper des floppées de bulles de savon.

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    Ses yeux s'humidifient à vitesse grand V alors qu'elle se laisse glisser dans l'eau tel un sac. Le niveau du liquide monte lentement, lentement.. Et peu à peu, elle se surprend à vouloir rester immobile et en apnée. Et si un simple bain mettait fin à toutes ses souffrances? Qu'elle songe en relevant malheureusement la tête.

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    Trop lâche pour mourir... Mais pas désireuse de vivre. En moins de deux, elle fond en larmes. En silence, elle fond en larmes. Que va-t-elle devenir. Sera-t-elle encore quelqu'un désormais. Saura-t-elle encore capable de se regarder dans un miroir après tout ça? Après avoir vécu et subi tout cela...?

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    Impossible. Puisque rien que ces souvenirs la forçent à se prendre furieusement la tête entre les mains pour la secouer vivement. Impossible! Impossible qu'elle soit encore quelqu'un à l'avenir! Comment le pourrait-elle?! Comment saurait-elle assumer?! Oublier?! Elle n'est plus rien de respectable aujourd'hui! Son corps la répugnant tellement depuis peu que sa seule vision lui est bien souvent insoutenable...

    — Eva? Ça va? Tu en mets, du temps! La fait soudain sursauter la voix de son amour à travers la porte.

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    Zut, depuis combien de temps est-elle en train de tremper dans cette eau mousseuse? Ses doigts fripés lui révèlent que cela doit bien faire plus de trente minutes.. Au moins.

    — Ça va, oui! Qu'elle tente alors de rassurer son interlocuteur d'une voix faible en réprimant un nouveau sanglot.

    Mais Raphaël n'est pas dupe et malheureusement pour sa moitié, la porte de sa salle de bain ne ferme pas à clefs. D'ordinaire, le jeune homme est très poli et n'entre jamais si on ne lui en donne pas l'autorisation, mais ce soir... Mais pour ce soir uniquement... Tant pis. Il fera une entorse à son éducation.

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    — Pourquoi me mens-tu ? Qu'il lui grogne sitôt qu'il pénètre dans la pièce, — si ça ne va pas, je suis là, et tu le sais... qu'il reprend, agacé, vexé que sa petite amie lui cache son évident désespoir.

    — Raph', stp.. Je.. Je voudrais rester seule..

    — Pourquoi?

    — Parce que je..je..

    — Requête refusée, désolé, grommelle encore Raphaël en se rapprochant de la baignoire pour s'asseoir sur le rebord et tendre une main en direction de son interlocutrice, — je t'aide à sortir? Tu as assez trempé là je crois!

    — Raph'...arrête, je.. Marmonne la jeune fille en détournant le regard, honteuse, — je, je..

    — Allez hop, fini le bain! Insiste Raphaël en se relevant pour attraper sa moitié par la taille afin de la tirer vers le haut pour la forcer à sortir de son bain et s'asseoir sur ses genoux alors qu'il s'assoit, lui, sur le rebord de la baignoire.

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    — Raph'.. Je vais bien, ne t'en fais pas.. déglutit timidement Eva en tremblant et dissimulant tant bien que mal sa poitrine, toujours enserrée par les bras de son interlocuteur qui la tiennent tendrement.

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    — Non tu ne vas pas bien, mais à chacun son tour d'avoir besoin de l'autre, alors que tu le veuilles ou non... Je suis là.

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    — Je..Je... Merci...

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    — Uhuhhhh! Qu'est-ce que j'aime quand tu es toute nue dans mes bras!!

    — Tssss, idiot, va!! se surprend à sourire la jeune fille en reprenant ensuite d'une voix plus triste, la tête posée contre le torse de son amant, — je crois que tu avais raison, la dernière fois... Je..Je.. J'ai besoin de voir quelqu'un...

    — Je te l'avais dit, mon ange.. Mais je suis content que tu en reparles... sourit tendrement Raphaël, — demain si tu veux, on te cherche ensemble le meilleur psychiatre! En attendant, tu veux que je t'habille?

    — Nan, c'est bon, tu t'es déjà assez rincé l'oeil comme ça, pervers! Tire la langue la jeune fille, soudainement apaisée et plutôt de joyeuse humeur, — si tu peux me passer mes vêtements?!

    — Une voix me parle?! Feins d'ignorer Raphaël, pas vraiment désireux de laisser s'échapper de ses bras sa poupée nue comme un ver.

    — Tsss! ça m'est égal moi que tu me gardes sur tes genoux, mais tu fatigueras avant moi, car 55 kilos sur les couilles, au bout d'un moment, ça va commencer à peser!

    — Oléééé, la grâce incarnée!!! fait semblant de se choquer Raphaël en étouffant un petit rire amusé devant le langage des plus soutenus de sa belle.

     

     

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    Quelques heures plus tard, le lendemain très exactement, Vanessa reçoit la visite impromptue d'un visage connu et pas spécialement aimé de sa personne..

    — Qu'est-ce tu fais là? Qu'elle se presse alors de lui grogner, à ce sale con. Ce maudit Franz qu'elle aimerait tant voir rôtir dans les flammes de l'enfer!

    — T'annoncer ce que je pense être une bonne nouvelle! Lui fait sans attendre son interlocuteur avec un clin d'oeil, — parce que j'ai eu vent de certains évènements qui se seraient passés sur Paris, et.. Oui, j'ai de nombreux contacts, ne cherche pas à comprendre, tout cela serait bien trop compliqué pour ta petite tête de blonde !

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    — La ferme et accouche, abruti !

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    — Eh eh ! Une réplique digne de la connasse que tu es, j'aime ! Je reprend donc : alors d'après ce dont j'aurais eu vent, je suis en mesure de t'affirmer aujourd'hui avec certitude, pour te rassurer -oui, tu constates à quel point je suis gentil, tout de même?- que ton fiston semble désormais tiré d'affaire. Ça doit t'enlever une épine du pied, n'est-ce pas? Je suis trop bon. Je savais que cela te ferait plaisir de l'apprendre.

    — Parce que tu crois que tes conneries m'intéressent? Ronchonne Vanessa, en cherchant cependant un lien entre son fils et son interlocuteur. Que pouvait bien faire son fiston malpoli sur Paris...? Connaissant la bestiole, elle craint évidemment le pire. Connaissant la tête de mule, la tête de linotte, l'inconscient toujours prêt à se jeter la tête la première dans le premier danger qui pointe le bout de son nez... ; exactement comme son père, en fait. À ce souvenir, la mère de famille soupire en silence.

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    — Je sais qu'elles t'intéressnte au fond et que même si tu ne le dis pas, tu es ravie de ce que je viens de t'apprendre! Que ton fifils est un bon petit, assez impressionnant même, avec ses amis. Sur ce, ma belle, mais toute ridée cela dit, je vais devoir te laisser. Je suis un homme très occupé !

    — Dégage ! Et plus vite que ça!

    —A la prochaine, Satan !

     

     

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    Les jours s'écoulent lentement et Eva Beckers reprend sagement ses cours de rééducation à l'hôpital Tartalazoie, tout en continuant de vivre chez son Raphaël. La jeune fille est redevenue brune aux cheveux mi-longs entre temps! Vive les teintures et les rajouts! Son demi-frère ne supportait vraiment plus ce blond qui lui rappelait de bien fâcheux souvenirs... : leur rupture... et surtout, cet abruti de Terry et l'influence plutôt néfaste qu'il a eu sur la femme de sa vie..

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    Alors depuis leurs merveilleuses retrouvailles, et tel un vrai petit couple modèle, les deux jeunes gens vivent ensemble et sont presque tout le temps collés l'un à l'autre.

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    Enfin, pas vraiment pour le moment, puisque le jeune homme du couple s'en est très vite allé passer quelques jours dans son village natal pour aider sa mère à se remettre du tragique décès de Jakob Eiche. Tous les deux se remettent difficilement, en effet, de cette cruelle disparition. Pour Jeyne Bauer, perdre cet homme tant aimé est presque insurmontable et elle ne s'en remet pas, tandis que pour son fils, l'épreuve est beaucoup moins douloureuse à digérer.

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    Parce qu'en effet, lui, il lui reste son Eva...Tandis que sa mère, elle, n'a plus que lui à qui se raccrocher.

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    Et il en a pleinement conscience. D'être aujourd'hui la dernière raison de vivre de sa mère. Son dernier soutien.. la dernière chose qu'il lui reste.

    Il se jure donc de faire le nécessaire pour être présent pour elle dans les semaines à venir. Elle aura besoin de lui. Sombrera sans doute. Mais il sera là. Elle pourra compter sur lui...  Il lui doit bien ça. Après tout ce qu'elle a fait pour lui, cette année... : le laisser monter sur Berlin à contrecoeur. Le laisser accomplir son rêve. Ne pas rechigner alors qu'il se rapprochait des ex-Apologize. Rester toujours compréhensive et rangée de son côté...

    Non, vraiment, le jeune homme n'a pas à se plaindre. Il possède tout de même une mère des plus exemplaires...

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    — Je t'aime, maman, qu'il lui souffle tout bas, tandis qu'elle lui pleure encore dessus, s'agrippant de toutes ses forces à son tee-shirt délavé et froissé : oui mais sans aucun doute son préféré !

     

     

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    À Berlin, Eva n'est pas toute seule dans le petit appartement de son amant et demi-frère, oh que non! Puisque tous les jours, son frère adoré vient lui rendre visite pour qu'ils passent ensemble de longues heures à parler de tout et de rien, devant la télévision bien souvent. Comme à l'époque, où ils n'étaient encore que les jumeaux infernaux dans le domicile familial...

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    Un bien doux souvenir pour les jeunes gens qui regrettent, parfois, cette vie d'antan.

    Mais comment en sont-ils tous arrivés là, finalement?

    Comment leur famille a-t-elle pu s'éclater ainsi sur le douloureux bitume des embûches de la vie?

    Comment de leur propre mère ont-ils su s'éloigner si vite, en se brouillant si furieusement avec? Des erreurs ont été commises. 

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    Eva regrette profondément toutes ces fâcheuses tournures d'évènements.

    Jeffrey se contente d'hausser les épaules, lui. Il n'est plus concerné. Sa mère n'est plus qu'un lointain souvenir, à ses yeux...

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    Sa soeur le gronde légèrement. Malgré tout ses défauts, elle reste leur mère et ils n'ont pas toujours été très agréables avec elle.

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    Le ton monte. Jeffrey s'agace. Il déteste que l'on le contredise! Surtout sur un tel sujet... : une sorcière capable de renier ses enfants!

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    Eva bougonne. On ne peut vraiment rien dire à son frangin.

    Jeffrey confirme. Sur ce sujet-là, il sait qu'il a totalement raison.

    Alors, les jumeaux décident de parler d'autre chose.

     

     

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    Depuis quelques jours, lorsqu'Eva n'est pas avec son frère en train de rire et discuter de tout et de rien, entre deux séances de rééducation, elle est aussi suivie par sa nouvelle psychiatre. Mademoiselle Annouche TeTouches. Une jolie blonde aux cheveux longs qui ne quitte jamais ses barrettes en forme de fraises. Des goûts qui effraient un tantinet, tout de même, n'est-ce pas. Mais taisons-nous. Nous pourrions la vexer.

    Bref, mademoiselle Annouche suit donc depuis peu la jeune Eva Beckers et l'aide à livrer ses maux les plus douloureux, pour les éplucher ensuite avec attention afin d'en retirer les éventuelles raisons et forces qui pourraient pousser la jeune fille à se relever. Car en effet, et la jeune femme blonde -qui est fan de Terry, encore une preuve de l'insolite de ses goûts!- n'a pas mis longtemps à le réaliser : sa patiente n'a pas connu que des moments roses dans sa vie, et ce malgré son pourtant début de célébrité que beaucoup d'artistes montants rêvent de posséder un jour!

     

     

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    Paula Leiner est elle aussi très souvent fourrée chez sa meilleure amie, Eva Beckers! Dès qu'elle sait que celle-ci est sur place, en fait, elle s'y précipite! Les deux jeunes femmes se sont sérieusement réconciliées, en effet. Et Paula se surprend à parfois confesser à son amie ses doutes récents au sujet de son couple pourtant presque idyllique, avec son Wilfrid...

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    — Vous êtes faits l'un pour l'autre Pao! Il n'y a pas d'âge pour rencontrer le bon et il vaut mieux que ce soit à 18 ans plutôt qu'à 30 ! rassure Eva. Elle déteste voir sa comparse douter ainsi d'un jeune homme aussi exceptionnel que Wilfrid Mülher. Ancien bad boy, voire carrément sale type, devenu avec le temps jeune homme respectable aux mille qualités.

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    — Et si jamais c'était pas le bon?! Des fois on se dispute hein! Tout n'est pas rose non plus! Persiste souvent Paula, pas vraiment convaincue par le fait qu'a 18 ans on puisse déjà, affirmer haut et fort qu'on a trouvé la perle rare qui nous suivra jusqu'à notre lit de mort.

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    — Et si jamais c'était le bon et qu'en continuant ce petit jeu, tu le perdais?

    — Si je peux le perdre, ça veut dire que c'est pas le bon, le seul, l'unique! CQFD!

    — Quedalle! Regarde, Raph est le bon pour moi et pourtant... Si on laisse certaines choses nous dicter nos choix et décisions, si l'on ne se laisse pas guider par nos coeurs en préférant suivre la raison, et bah.. On ne serait plus ensemble aujourd'hui. Alors que je sais que c'est le bon, le seul, l'unique! Donc CQFD pas du tout. Tu peux perdre ta perle rare!

    — La loi du « le coeur a ses raisons que la raison ignore », ce n'est que dans les films qu'elle existe, Eva! Et on est tellement différents avec Wilf' que des fois je me demande... Il est tellement à fond dans sa musique, truc que moi je ne partage absolument pas! Tu le vois, notre avenir, toi? Admettons qu'un jour ce soit une vraie star, tu m'imagines, moi, à la maison avec trois mouflets, attendant désespérément que mon homme rentre de tournée?! Attends, arrête, sérieux!!! C'est pas mon avenir, ça !!


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    Tous les soirs, Raphaël prend soin de téléphoner à sa moitié restée sur Berlin. Le forfait défile à vive allure, mais les amoureux n'y font pas attention. Ils se parlent enfin.. Eux qui détestent tellement être séparés autant de temps... 

    — Tu reviens bientôt? Soupire d'une petite voix Eva dans le combiné, l'air triste. L'absence de son Roméo lui est de plus en plus insupportable.

    — Oui, je pense, ma puce! Disons que.. Allez, je reste encore trois, quatre jours au pire, et après je rentre, promis.

    — Sérieux? C'est génial ça! Sans faute, hein?

    — Oui, oui! Et toi sinon, totalement hors sujet, mais est-ce que tu as vu ou passé du temps avec Silvia récemment?

    — Silvia? Non elle n'est pas passée à l'appart depuis mon retour et j'avoue j'ai pas eu le temps d'aller la voir. Pourquoi?

    — Tant mieux alors. Parce que je ne veux plus que tu la fréquentes. C'est fini avec elle. Cette garce sort de nos vies.

    — Hein?! Pourquoi dis-tu ça?!

    — T'es débile pour ne pas l'avoir compris toute seule ou tu fais semblant?

    —…

    — À ton avis?!

    — Elle.. Qui?... Vers toi..?

    — C'est quoi cette question? Genre tu a réussi à penser une seule seconde que MOI j'aurais pu aller vers ELLE?

    — Mais elle a quelqu'un, alors je...

    — Elle a mytho ! Ou elle voulait le tromper, j'en ai rien à cirer. En tout cas, c'est rien qu'une garce et ça l'a toujours été depuis le début ! Alors, tu ne la fréquentes plus !

    — Je comprends maintenant pourquoi elle ne vient plus.. Merci de me l'avoir avoué. T'étais pas obligé.

    — On se dit tout, il me semble.

    — C'est vrai.

    — Je vais aller aider ma mère, moi, elle doit être en train d'écailler ses truites, là! Alors, je t'embrasse fort et je te dis à demain mon bébé! Bonne nuit, fais de beaux rêves.

    — Merci, toi aussi! Bisous. Je t'aime.

    — Moi aussi, je t'aime! Byouuu!

    C'est le coeur gros que la jeune fille raccroche son téléphone après sa conversation avec son Roméo, pour fixer ensuite et pendant de longues minutes, le plafond tout blanc de la pièce. Elle médite. Sagement, elle médite et repense à sa comparse Silvia. Avec douleur, elle réalise... Qu'une fois de plus, elle a décidément été bien naïve et aveugle.

     

     

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    Paula Lehnard est ravie de cette situation où son ancienne comparse, Silvia, vient d'être déclarée persona non grata dans l'appartement de sa meilleure amie ! La brunette jubile, même ! Il n'y a désormais plus de concurrence entre elle et son amie d'enfance ! Parce que le fameux petit trio, pour être honnête, Paula vous avoue qu'elle n’y a jamais cru, en fait ! Mais elle faisait hypocritement bonne figure pour « faire bien », elle doit bien l'admettre...

     

      

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    Au fil des jours et à son psychiatre, Eva Beckers ose de plus en plus confesser ses maux et torts passés. Au début, elle n'osait marmonner que peu de choses devant cette femme, pourtant des plus chaleureuses. Mais aujourd'hui qu'une réelle complicité commence à naitre entre les jeunes femmes, l'adolescente Beckers se permet de révéler ses peines les plus profondes. Et son médecin la cerne très vite. La conseillant ensuite, du mieux qu'elle peut.

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    — Il est clair que ton souci est que tu jamais su te sevrer de ton frère. Depuis toujours, la vie d'adulte vous fait terriblement peur et aujourd'hui encore, ti aimerais revenir dans le passé. Rien que pour vivre à nouveau au sein de cette famille, la seule que tu n'as encore jamais connue. Tu as l'impression de n'être rien sans ton frère, car tu ne t'es jamais forgé ta propre personnalité. Toute ta vie, tu n'as vécu qu'à ses côtés en ne faisant que le suivre aveuglément.

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    — C'est normal, on est jumeaux!

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    — Mais deux personnes à part entières.

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    — Merci, mais j'étais au courant.

    — Alors, il ne faut plus vivre que pour lui. Mais aussi pour tout le reste, Raphaël, par exemple, ou encore la musique!

    — Je ne vis pas que pour lui, tu n'as rien compris!

    — C'est tellement limpide que ça en crève les yeux pourtant. Eva tu dois absolument apprendre à vivre par toi-même, te construire par toi-même, te détacher légèrement de lui, couper ce lien qui vous étouffe. D'après ce que tu m'as dis, Jeffrey l'a fait lui par contre, il découvre la vie de son côté, il a une femme, un enfant adopté, bientôt un autre en route... Il avance ! Mais et toi Eva ? Quand est-ce que cela sera à ton tour de faire tout ça ? 

    — Mais... Il a besoin de moi... comme j'ai besoin de lui.

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    — Et c'est là que tu te trompes! Vous n'avez pas besoin l'un de l'autre pour exister. Ton frère est un grand garçon et te l'a prouvé récemment, non ?

    — Ce n'est pas vrai! Il a besoin de moi pour le protéger! Autour de lui, il y a des gens malfaisants qui ne souhaitent que sa perte! Il n'a personne d'autre que moi sur qui il puisse réellement compter!

    — Mais ce n'est pas à toi de réparer ces erreurs! Ce n'était pas à toi de rendre justice à Angelika! Et tu le sais très bien au fond de toi même, car c'est pour cette raison que tu n'arrives pas à te pardonner ton geste ! 

    — Je...

    — Laisse ton frère vivre sa vie et vis la tienne pleinement ! Tu peux très bien être fusionnelle avec ton frangin sans te sentir obligée de lui rendre justice dès que quelqu'un lui fait du tort, ces réactions ne sont pas normales ! 

    — Tu n'as pas le droit de dire ça.. Parce que lorsqu'il était dans le coma, je.. je..

    — Je sais, Eva. Je sais! Mais ce n'était tout de même pas à toi de lui rendre justice. Tu savais très bien que tu devais laisser cette fille payer sa sentence par la justice mais pourtant, tu es allée t'immiscer dans la vie de ton frère... Ce n'était pas une réaction normale. 

    — Lui aussi il.. il est toujours là quand.. Quand...

    — Tu es une brave fille, je le sens, mais crois moi, cette fusion avec ton frère doit vraiment cesser. Ou alors elle finira par causer ta perte...A toi toute seule. Et c'est ça, le pire.

    — À lui aussi... Mais ça, tu ne le crois pas, je te dis qu'il a besoin de... 

    — Non. Tu aimerais que ce soit le cas, mais non, Eva. Il n'a pas besoin d'un tel lien, il n'a besoin que d'une soeur. Vous n'avez pas besoin l'un de l'autre pour exister! Tu n'as PAS besoin de lui pour exister! Tu es une personne à part entière! Tu es quelqu'un! Alors vis, pour toi avant tout! 

    — À vous entendre ça semble si facile à faire, tssss... Mais moi, co.. co..Comment voulez-vous que...

    — Commence à le voir moins souvent. Force-vous à le voir moins souvent. Tous les jours, c'est beaucoup trop. Préférez passer du temps avec votre meilleure amie, Paula, plutôt qu'avez lui. Et vous verrez que petit à petit, vous...

    — Il ne comprendra pas que je m'éloigne. Et puis la vie nous a déjà séparés pendant des durées parfois très longues et je sais ce que ça m'a fait.. Je.. Je ne veux pas revivre ça! Je ne saurais pas.

    — Parce qu'à l'époque tu ne voyais que lui et n'avait pas la volonté de te sevrer de sa présence. Alors qu'aujourd'hui, tu as compris qu'il y a quelque chose qui cloche, aujourd'hui tu as réalisé que tu aimerais devenir quelqu'un! Parce que tu as un jumeau, mais pas un siamois !

     


     

    *N.B, le secret professionnel chez les médecins :  : Pour René Pandelon [...] également expert pour la Justice, les médecins sont soumis "à une double obligation, parfois en contradiction". "— Nous sommes tenus au secret professionnel et aussi tenus au devoir d'éviter la commission d'un crime, confirme-t-il. Avant la commission de l'acte, on doit tout faire pour l'empêcher, mais s'il est commis, nous n'avons aucune obligation de lever le secret sauf si l'on soupçonne qu'il puisse être réitéré".

     

     

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    Comme l'expliquait la dernière fois Paula à sa meilleure amie, sa vie de couple avec son Wilfrid est loin d'être tout les jours rose et ensoleillé, oh non, loin de là...

    Les deux jeunes adultes ne se comprennent plus. Ils se lassent peu à peu de leurs différences qui s'accentuent de plus en plus au fil des jours.

    Ces études qu'ils poursuivent tous les deux de leurs côtés. Wilfrid en faculté. Paula toujours au lycée...Et lors de leurs retrouvailles, quand enfin ils peuvent se retrouver quelques heures ensemble, rien que tous les deux, voilà qu'ils finissent toujours par se heurter par des sujets de conversations évasifs et hésitants. L'un est passionné de musique et s'éloigne peu à peu de ce qu'il était à l'époque, le fêtard dragueur qui boit jusqu'à plus soif lors de sorties amusantes et arrosées. Quand l'autre, est.. Toujours la même, en fait. La jolie jeune fille qui aime la vie, les sorties entre copines et les soirées entourées d'amis et de son homme.

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    «  — Wilf', on sort ce soir, on fait la fête et ensuite on rentre chez moi? »

    «  — Euh non, ce soir on répète avec les gars! Tu sais qu'on va peut-être faire une tournée prochainement? »

    «  — Génial... »

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    « - Hein? Cache ta joie, quoi! »

    «  — Nan, mais j'aurais aimé passer du temps avec toi ce soir, et comme d'hab tu vas me planter pour les autres! Ça saoule. »

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    «  — Excuse-moi d'avoir un but dans la vie et de m'y consacrer. Et puis rien ne t'empêche de venir au local avec nous »

    «  — Qu'est-ce que tu as insinué, là? Que moi j'ai pas de but dans la vie? »

    «  — Bah pour l'instant t'en as pas, non. À part aller au bahut et kikoololer, tu m'excuseras... Alors que moi j'oeuvre déjà pour mon vrai avenir !»

    «  — Tu parles, quel avenir, kikoo guitare z'avec mes potos, dzouaing dzouaing! »

    «  — Tu me gaves, je vais au local. A plus. »

    «  — C'est ça, à plus! »

     

      

     

    *

     

     

      

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    Depuis quelques jours, et à cause du petit succès que connait son Single « Raphaël » dans les bacs, Eva se retrouve très souvent confrontée à de nombreuses interviews dès qu'elle a le malheur de mettre un pied dehors. Comme par exemple lorsqu'elle tente de se rendre à ses cours de rééducation...Il y a dans ces moments-là toujours un abruti de journaliste qui traine dans le coin.

    Les questions fusent, évidemment. Le Raphaël de sa chanson serait-il par hasard le Raphaël des TroubleMaker, passé ensuite Unknown Soldier? Et si oui, comment cela se fait-il? Puisque le jeune homme a été révélé comme enfant de Gutter Kylian, son père à elle!

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    Eva s'amuse de ces questions. Elle prend plaisir à y répondre, mais sans vraiment y répondre. Faire tourner en bourrique tout ces curieux est devenu son nouvel passe-temps.

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    « — Pourquoi pas? »

    « — Si ça se trouve, hein! »

    « — Mais non, absolument pas! Ce n'est que mon demi-frère »

    « — Je l'apprécie, comme un frère »

    « — On s'était connu avant que je sache! »

    « — Mais non, vous vous faites des films! »

    « — Et admettons que si, qui cela pourrait-il bien déranger? »

    « - On ne choisi qui on aime.... Mais non! Je n'ai pas dit ce que vous pensez! »

    « — Déduisez ce que vous voulez! Qu'en pensez-vous, vous? »

    « — Je n'en sais rien! »

    « — Il est beau gosse mon demi-frère, hein! »

    Etc, etc.

    Mais les journalistes ne sont jamais dupes et reviennent sans arrêt à la charge. En plus, l'adolescente a été très souvent connue pour chanter des chansons d'amour pour midinettes et tous sont désormais persuadés que « comme des enfants », « printemps », par exemple, n'était que destiné au fameux demi-frère!

       

     

     

    *

     

       

    En effet, les deux tourtereaux incestueux font parler d'eux en ce moment, en effet. De nombreux magazines pour jeunes n'arrêtent plus les articles à leur sujets. Les langues se délient par-ci, par-là. Les plus tolérants applaudissent et sont émus par ce couple « hors-normes ». Les plus coincés et attachés aux moeurs et valeurs grognent et méprisent sans complexes.

    Et le pire dans tout cela, c'est que les deux principaux concernés de ce début de boucan médiatique ne détestent pas ce phénomène... qui agace pourtant prodigieusement certaines personnes.

    Les ex-Memories, par exemple...totalement outrés par l'idée même que les enfants de leur ancien comparse puisse fricoter ensemble. 

     

     

    *

      

     

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    Raphaël est encore sur Klausdorf ce soir, lorsqu'en retournant chez lui pour rejoindre sa mère, il croise soudain, et salue immédiatement et le plus chaleureusement possible, une vieille amie, ex-petite amie, ancien grand amour de sa vie...

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    — Je viens du cimetière là... Je suis désolée d'avoir manqué son enterrement. J'avais appris pour Jakob mais je n'étais pas sur Klausdorf..

    — Tu n'as pas à t'excuser, c'est pas grave.

    — Sisi, quand même.. Je l'aimais énormément, moi aussi! Enfin bref.. Ça va toi? Tu tiens le coup? Et ta mère?! Elle doit être anéantie..

    — C'est plutôt elle qui m'inquiète, oui. Mais elle va s'en remettre, ne t'en fait pas.

    — Tu es adorable d'être revenu sur Klausdorf après ça.

    — Quand même! C'est la moindre des choses!

    — Bah, pour toi, oui! Parce que t'es un gentil!

    — Humm... Et sinon, toi, ça va aussi? Qu'est-ce tu deviens après tout ce temps?!

    — Impec! J'ai rencontré quelqu'un, Lydia aussi, la rentrée se passe bien, etcétéra, etcétéra quoi. Et toi? Tu rentres bientôt sur Berlin ou tu restes un peu avec nous qu'on traine un peu ensemble comme à l'époque?

    — Eh eh, je suis content pour vous! Et moi, bah.. Rien n'a changé, tout se goupille tranquillou, rien à signaler quoi!! Aussi, je pense rentrer sur Berlin demain.. Dommage, on va devoir remettre tes projets à plus tard!

    — Demain? Déjà? Et ta mère? Tu vas la laisser de nouveau toute seule après le drame...?

    — Pas vraiment, parce que je reviendrais beaucoup plus souvent. Je pense un week-end sur deux, donc..

    — Ah c'est plus que génial ça! On va vraiment se revoir régulièrement alors! Lydia va être aux anges, car vous nous manquiez!

    — Eh eh, ouais en effet, y a des chances qu'on se revoit régulièrement! Les autres, par contre, n'y comptez pas trop. D'après ce que j'entends de Tobias...Klausdorf est désormais la dernière de leurs priorités!

    — Je sais, je lui parle assez souvent aussi! Bah, de leur part je m'en doutais! Laissons les vivre leur folie Troublemaaaker sur Berlin! Nous tant qu'on te retrouves c'est l'essentiel!

    — Eh eh, c'est gentil ça!

    — En parlant de folie et compagnie, tu le prends comment tout ça, en ce moment.. Je veux dire, ces rumeurs, ces articles de journaux étranges et inquiétants, etcétéra, etcétéra....!

    — Pourquoi étranges et inquiétants?

    — Arrête! T'es obligé d'être choqué tout de même! Que tout ça soit révélé comme ça? Tu ne trouves pas que ça craint un peu? Ça se fait clairement pas quoi.. Ça ternit un peu ton nom une histoire pareille!

    — On n’a rien insinué de concret nulle part et à personne, se braque d'un coup Raphaël avec sévérité, — alors, vous pensez ce que vous voulez. Le monde pense ce qu'il veut. On n’en a rien à foutre.

    — Oulà, le prend pas comme ça! Je ne voulais pas te froisser. Je disais juste ça comme ça, pour toi, rohh...

    — Il faut que je rentre, je te laisse, à demain sans doute!

    — Oki doki, à demain!

    « — Ils n'en ont rien à foutre? » est bien obligé de songer très vite Jane en retournant chez elle après avoir conclue affectueusement sa conversation avec son interlocuteur et vieil amant.

    « — Mais jusqu'à quand, en auront-ils rien à foutre? »

    La jeune fille jubile. Le couple de son éternel amour ne tiendra jamais le coup face à ces articles qui deviennent de plus en plus honteux au fil des jours!

     

     

    *

      

     

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    Eva prend les devants, ce soir. Avant même que son frère ne lui téléphone pour discuter de tout et de rien, avant de lui annoncer l'heure de sa future visite le lendemain, elle se presse de l'appeler elle-même pour lui dire que dès le début de la matinée, elle aura de nombreuses choses à faire.

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    Il ne pourra donc pas passer ce jour-là. Ils ne pourront donc pas se voir, cette fois-ci. Jeffrey est évidemment déçu et cherche une autre plage horaire qui pourrait éventuellement convenir un peu mieux à sa jumelle, mais la jeune fille reste fidèle à sa décision de départ : moins voir son frère. Elle lui répond donc négativement, avec de la tristesse dans la voix tout de même. Elle sera vraiment très, très occupée... Sa rééducation, suivie de nombreuses interviews en studio. Elle n'aura vraiment pas une minute à elle!

    Ce n'est pas grave, ils se verront une autre fois, après tout. Jeffrey finit par se résigner.

     

      

    *

      

     

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    Le lendemain après-midi, le jeune Beckers prend une initiative banale de son point de vue, mais surtout dangereuse pour sa future conception des relations qu'il entretient avec sa soeur jumelle...

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    En effet, arrivé en bas de chez sa jumelle, il ne met pas longtemps à apercevoir deux têtes à travers un bout de la fenêtre de l'appartement qu'elle occupe avec son demi-frère. Raphaël. Les deux amoureux semblent dans les bras l'un de l'autre en train de se faire des papouilles, surement.

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    Raphaël semble la maintenir debout et droite comme il le fait souvent, mais là n'est pas le problème... Qui lui est bien plus douloureux pour le jeune Beckers. Sur le coup, il ne comprend pas, évidemment. Sa soeur était censée ne pas être sur place, aujourd'hui. C'est bien ce qu'elle lui avait certifié la veille, il s'en souvient bien.

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    Alors tel un paranoïaque blessé par une vision dérangeante, il dégaine son téléphone portable de sa poche pour se presser de téléphoner à son affreuse jumelle qui semble bien s'être payé sa tête aujourd'hui!

    — Coucou, Jeff! Qu’elle lui répond très vite, et toute joyeuse, en plus.

    — Yop.. Dis donc, toi, tu n'es pas à tes interviews, aujourd'hui?

    — Si, pourquoi? Je suis au studio, là.

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    Pourquoi un tel mensonge?

    Le jeune Beckers en reste bouche bée et se remet très vite à marcher ; mais pour s'éloigner de l'immeuble qu'habite sa jumelle, cette fois. Il accélère le pas. Tout en gardant le combiné de son téléphone contre son oreille. Plus un mot ne sort de sa bouche. Il n'en a plus la force. Il réfléchit hâtivement. Ses lèvres en tremblent. Son coeur en bat la chamade et ses yeux le piquent. Il ne comprend pas. Il réalise le mensonge, bien entendu, mais il ne comprend pas. Ils ne se sont jamais menti, avant ça. Même lorsque l'un voulait simplement passer du bon temps avec quelqu'un d'autre. Avant, ils savaient se le dire... Alors pourquoi ce mensonge? Pourquoi ne pas lui avoir dit directement qu'elle était avec Raphaël et qu'elle voudrait simplement rester avec lui? Voir que lui pourrait passer les voir quelques instants? Après tout, lui aussi apprécie bien Raphaël...

    — Jeffrey? T'es là? Qu'elle ose soudain lui reparler. Lui demander.

    — Oops, oui. Désolé, je.. Erf, mais je suis occupé là, je te laisse, bisous! Je te passais juste un coucou.

    — Oki!! Bisous alors.

    — C'est ça, bisous...

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    Elle était vraiment pressée de se débarrasser de lui, n'est-ce pas? Jeffrey l'a bien réalisé.

    Il hâte un peu plus le pas. Il faut qu'il rentre à l'hôtel qu'il habite encore avec sa fiancée. Il sera alors seul pour réfléchir quelques heures. Pierre étant à l'école et sa moitié chez le gynécologue...





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