• 072

     

    *

     

    072

    - Ce soir, on sort! clame joyeusement Eva aux deux amours de sa vie : son frère, et sa meilleure amie.

    - De quoi? Toi, tu veux sortir?? n'attend pas pour s'étonner Paula d'un air amusé : cela faisait longtemps que son binôme de toujours ne lui avait plus ainsi annoncé son désir d'aller faire la fête!

    072

    - Nous allons faire trembler la nuit, fidèle compagnons !!! Nous allons même aller dans la boîte où j'ai rencontré l'autre tâche !!

    072

    - Tu es sûre? Au blues? s'interloque Paula, - ça va te rappeler son existence et ça va te gâcher la soirée !

    - Ca ne va rien me rappeler du tout! Car j'ai tourné la page, ayé! Et récupérer ma boîte préféré est la dernière étape de mon traitement "A-Mort-Roméo" !!

    - Moi j'aurais bien aimé une petite soirée pépère, tranquillou, grommelle tout bas Jeffrey en resserrant l'emprise de ses mains autour de sa petite amie, confortablement assise sur ses genoux.

    - Han, tu n'as pas honte d'insinuer de telle chose devant une jeune fille pure et célibataire?? le gronde amicalement et illico, sa soeur jumelle, - pfiouh, je suis outrée ! Et pour la peine je vais me changer pour sortir!

    072

    - Va, mon enfant, va! lui rit aussitôt Paula en la regardant disparaitre de la chambre en direction de la salle de bain.

    - Tu penses qu'on a combien de minutes, rien que tous les deux? susurre tout bas Jeffrey, une fois qu'il se retrouve seul avec sa petite amie ; qui se relève doucement de ses genoux pour lui faire face, se cambrer dans ses bras avec sensualité, tout en lui caressant délicatement les cheveux.

    072

    - Tututu, petit pervers, sois sage. Car ce soir, on est trois.

    - Me dit-elle tout en me mettant ses seins sous le nez!!

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    - C'est pour que tu aies hâte qu'on rentre tout les deux, chez moi, à la fin de la soirée! Hihi.

    - Euh, tes parents étant là en ce moment là, et les miens non, il ne vaudrait pas mieux qu'on vienne finir la soirée ici?

    - Et Eva?

    - Pas dans cette chambre, banane! Mais dans celle de mes vieux!

    072

    - Ce.. Ce n'est pas un peu culotté? questionne en retour la jeune fille, tout en se délectant des baisers humides que son interlocuteur lui dépose sur le bout des seins.

    - On s'en fout, ils n'en sauront jamais rien.... Et, hum.. Hummm... Tu as les seins qui dardent comme des fous, là... Et ça, ça veut dire que ce qu'il y'a en bas me supplie de venir lui rendre visite!! Oh oui, Jeffrey, oh ouiii!!

    - Sois sage! Eva ne va plus tarder à revenir maintenant!

    - Gniii! Et si on allait l'abandonner sur l'autoroute ?? 

    - Je propose plutôt de la découper en rondelles, avant d'aller enterrer ses restes dans une forêt sombre !!

    - On fait comme ça !!!

     

     

    *

     

     

    072

    - Nikolas, non! Tu.. Tu m'avais promis! boude ce soir une jeune femme dans les bras de son époux ; Lena Keller, conjointe comblée de Nikolas Keller.

    - Je lui ai dit que je n'en avais pas fini avec lui, Lena. Alors je dois retourner le voir. Pour qu'on discute.. On a tant à se dire, lui et moi.

    072

    - Tu m'avais promis de tourner la page, de n'aller le voir qu'une seule fois.. Nikolas!! Pourquoi? Pourquoi t'accroches-tu autant à tout ça.. A ce passé...Pourquoi..

    - Lena, il a détruit ma vie, tout de même! Alors il est hors de question qu'il s'en tire ainsi.

    - Il... a détruit ta vie? C'est finalement ce que tu penses que nous?

    072

    - Non, bien sûr que non! Mais mon ancienne vie, si. Mon personnage, ce que je suis, tout mon être! C'est tout ça, qu'il l'a détruit. Ruiné. Et fourbement en plus! Si tu savais à quel point je le hais, chérie, si tu savais.. Je me souviens encore de son visage, ce soir-là. J'attendais du secours. Son.. Secours. Je comptais sur lui. Chose normale, vu qu'il était tout de même mon..

    - Arrête, Nikolas! Arrête... Parce que je pense que ton frère a assez payé aujourd'hui. Non mais tu as vu son visage, lorsqu'il t'a vu? Tu l'as bien vu?

    - Il était mort de trouille à l'idée de payer, oui!

    - Il était effondré, plutôt. Parce qu'à mon avis, il paie déjà le prix fort de ta disparition. Et ce, sûrement depuis bien longtemps..

    - Il faut que je lui parle, une dernière fois, au moins. Encore... une fois, Lena. Et ensuite, et ça, je te le promets : je laisserai le passé au passé.

    072

    - Est-ce qu'il y'a une femme derrière tout ça?

    - Comment ça?

    - Réponds simplement, chéri.. Est-ce qu'il... y a.. une femme, dans ce passé regretté?

    - Il y avait, oui. Mais moi, tout ce qui m'importe, c'est lui, chérie. Et rien que lui.

    072

    - Jure-le-moi, mon amour. Jure-le-moi!

    - Je... Je te le jures.


  • 071

     

    *

    *     *

     

     

    071

    - Je ne m'en irais pas! grogne nerveusement Lydia à son ancienne meilleure amie.

    Les deux jeunes filles se sont isolées dans le couloir menant à l'appartement de leurs amis musiciens, pour discuter tranquillement, entre amies... Ou plutôt, ex-amies!

    - Donne-moi une seule bonne raison de ne pas t'en aller, Lydia? ironise alors Jane avec méchanceté, - est-ce que tu te sens bien lorsque tu passes la porte de leur appart'? Est-ce que tu te sens chez toi?

    - Ok, je ne sors peut-être avec aucun d'enter eux, mais cela ne m'empêche pas d'être leur amie!

    071

    - Quedalle, Lydia, quedalle! Tu n'es pas leur amie! Tu n'es rien d'autre qu'une mouche à merde pendue à leurs culs! À tous !

    - Si c'était le cas, ils ne se gêneraient pas pour me le dire!

    071

    - Ils n'osent pas, puisqu'ils sont tout de même gentils, tous les quatre! Mais crois moi qu'ils n'en pensent pas moins! Alors moi, Jane, celle que tu as essayé d'exclure subtilement de ce petit groupe - qui est accessoirement surtout le mien, ceci dit en passant - je me décide enfin a te sortir tes quatre vérités en face! Tu vois, je reste gentille avec toi, malgré tout ce que tu m'as fait! Grâce à moi, tes yeux vont s'ouvrir sur la cruelle réalité que tu t'obstines à refuser : ta vie sans amis! Et grâce à moi, tu pourras peut-être remédier à cette humiliation incessante que tu vis chaque nouveau jour, en te barrant le plus vite possible d'ici!

    - Je t'ai exclue, en refusant de ton donner son numéro, pour te protéger, Jane..

    - Mon cul! Tu as tenté de m'exclure surtout parce que tu es toujours amoureuse de Raphaël!

    071

    - Non.. C'est du passé, tout ça.

    - Menteuse! aies au moins la décence de le reconnaitre, Lydia! Bordel! Tu me prends vraiment pour une cruche tombée de la dernière pluie, ou quoi??

    - Je.. Je...

    071

    - Mais je ne t'en tiens pas rigueur, tu vois! Parce que Raphaël est beau, intelligent, talentueux, et que tu n'es pas la première à être dingue de lui! Mais il serait temps d'ouvrir les yeux, ma cocotte, car rien ni personne ne pourra jamais nous séparer! Rien! Ni personne!

    - Je le sais tout ça, merde! Puisque je te dis que ça fait longtemps que je ne l'aime plus!

    - Tu mens !

    - Et comment peux-tu en être aussi sûre??

    - Parce que si tu ne l'aimais pas encore, tu serais encore ma meilleure amie! Parce que si tu ne l'aimais pas encore, tu aurais été la première à me conseiller pour que je sauve mon couple! Tu aurais été la première à m'aider à recoller les morceaux, parce que tu me connais et tu sais à quel point je l'aime! Bref, tu aurais été une amie! Une vraie! Tu sais, celles qui restent sincères et fidèles!! Tu sais, dis?? Que ton comportement a complètement différé de celui des amies normales?? Tu veux que je te rafraichisse la mémoire pour te rappeler tout ce que tu m'as fait??

    - Jane.. Je.. Je..

    - Tu m'as répété sans arrêt que ce n'était qu'un pauvre type! Qu'on n’avait rien à faire ensemble! Qu'il fallait que je tourne la page très vite! L'oublie définitivement! Et m'éloigne de lui et des autres!

    - Mais je le pensais! Parce qu'il t'avait fait du mal, et je..

    - Et en parallèle, tu te rapprochais de lui et du groupe!... Jusqu'a ce que tu sois surprise par Wil' en train d'embrasser Raph' dans le couloir de la corp!!

    - C'était un accident, Jane, merde!!! Et ça n'a même pas duré dix secondes, en plus! Alors arrête avec ça, putain!!

    - Ça n'a pas duré plus de dix secondes, car Raphaël n'a jamais été intéressé par toi, Lydia!!! IL N'A JAMAIS été intéressé par toi, JAMAIS!! Mais ça, tu refuses toujours de le comprendre!! Tu n'as même pas la jugeote nécessaire pour le réaliser !!

    - Pfft, crois ce que tu veux, après tout, je m'en fiche! De toute manière, avec toi, je ne peux qu'avoir tort!

    - Parce que tu ne te comportes qu'en sale garce allumeuse!

    - Ta gueule, maintenant, merde! Parce que tu n'as jamais été à la place du vilain petit canard, toi!! Tu n'as jamais été celle qui aime dans l'ombre! Celle qui pleure tout les soirs, parce que le garçon dont elle est folle est dans les bras de sa meilleure amie!! Ouaiiis, c'est ça que tu voulais entendre?? Que j'aimais Raphaël a la folie?? Que je n'ai jamais autant envié quelqu'un que toi?? Bah voilà, tu l'as entendu!! Ouaiiis, je suis un monstre, une garce!!! Qui a, et je veux bien l'avouer, ouaiiiiis, tenté sa chance avec le garçon dont elle est amoureuse! Ouaiiisss! Vas-y, crache-moi dessus! La miss monde aimée de tous! La miss monde qui n'a jamais pleuré seule dans un coin de sa chambre, parce que jamais elle ne verrait ses rêves se réaliser!

    071

    - Tu te trompes, Lydia..

    - Ah ouais??

    071

    - Parce que j'ai pleuré seule quand j'ai rompu avec Raphaël. Seule, parce que tu n'étais pas là, toi, la soi-disante amie.. Après, je veux bien croire que tu l'aimais à sens unique, et que c'est douloureux... mais dans ces moments là, tu aurais dû te souvenir qu'avant l'amour, il y a l'amitié.

    - C'est facile à dire pour toi, ça!

    071

    - Moui.. Et je crois que nos chemins vont se séparer ici.

    - Ouais, je vais rentrer tout à l'heure pour faire ma valise, t'inquiètes. Je vais rentrer sur Klausdorf.

    - Merci.

    071

    - Ne me remercies pas, car ce n'est pas un cadeau que je te fais, en te laissant seule ici...Car tu seras plus seule que jamais, entre ces murs... Et je vais en plus te donner un dernier conseil d'amie...

    - Vas-y, je t'écoute..

    - Détache-toi doucement de lui, parce que votre nouvelle histoire ne durera pas.

    - Mmmh...

    071

    - La façon dont il regarde Eva Beckers ne trompe pas, Jane.. Et même si aujourd'hui il pense t'aimer encore, il finira par te tromper à nouveau, avec elle cette fois. Et ça, ça me fait chier. Vraiment... Parce que même si tu ne me crois surement pas, je tiens à toi...

    071

    - Eh bien... J'espère alors que tu seras à la gare de Klausdorf pour me récupérer, lorsque je reviendrais le coeur brisé...

    071

    - Je... Je... Oui... Bien sûr. Que je serais là..


  • 070

     

    *

     

    070

    - Hey, toi, là!! vient taquiner Raphaël, ce matin, en direction de son amie, Eva, pendant la récréation de dix heures.

    070

    - Tiens, tu me parles, toi, maintenant ? à l'air de s'étonner son interlocutrice, l'air boudeur, tout en pianotant sur les touches du distributeur a boissons.

    - Qu'est-ce que ça veut dire, cette ironie?! Je t'ai toujours parlé, moi.

    070

    - Ouais! C'est vrai! "Bonjour!","A plus!", "Salut!".

    - Il paraît que tu as largué Terry?

    - Ça.. Ça ne te regarde absolument pas.

    070

     

    - C'est un sujet de conversation comme un autre. Et ça change de "Salut!", "Bonjour!", et "A plus!"

    - Écoute, tu es bien gentil et tout, Raphaël, mais tu es la dernière personne a qui j'ai envie de parler de ma rupture.

    - Et pourquoi donc?

    - Tu es complètement débile, ou tu le fais exprès?!

    070

    - Euh... en est immédiatement interloqué le jeune homme, puis réduit au silence, - Je..

    - Allez, va rejoindre ta copine. Et moi, je vais aller retrouver mes amis.

    070

    - Eva, euh.. Ne me dis pas que tu as laissé tomber Terry pour... ?

    070

    - Raphaël! Qu'est-ce que tu fais? Je te cherchais partout!! arrive d'un pas pressé la petite amie de celui-ci ; qui se retourne rapidement dans sa direction en balbutiant un bête et honteux,

    070

    - Oh, euh, je.. je tapais la causette!

     

    070

    - Tu me présentes? n'attend pas pour lui ordonner son interlocutrice avec subtilité, en dévisageant de haut en bas la brunette qui se tient devant elle : la fameuse Eva, évidemment.

    La fille à nattes.

    070

    - Euh, oui, bien sûr! Alors j'te présente Eva, fait aussitôt Raphaël : après tout, il n'a rien à cacher à sa petite amie et se comporter différemment éveillerait aussitôt les soupçons de sa petite fouine.

    070

    - Enchantée, Eva. Moi, c'est Jane, en sourit la concernée de satisfaction, tout en continuant d'observer celle à qui elle s'adresse : une rivale qui doit savoir dès aujourd'hui qu'elle n'est pas de celles qui se laissent écraser sans rien dire, ayant déjà, par le passé, déjà fait trop confiance aveuglément.

    070

    - Enchantée, lui répond simplement - et en retour - la jeune Beckers, plutôt mal à l'aise.

    070

    - Euh, ma puce, se retourne vivement Raphaël vers sa petite amie, - en fait là, il faut qu'on parle d'un sujet embêtant avec Eva, alors si tu pouvais m'attendre à l'autre distributeur? Je te rejoins dans cinq minutes!

    - Hum? ne semble pas convaincue la concernée, tout en fusillant habilement son homme du regard.

    070

    - C'est à propos de son frère! Elle a des soucis avec et me demandait conseil! Alors tu penses bien que je ne peux pas continuer d'en parler si tu es là!

    - Mouais, c'est normal, ne peux qu'abdiquer la jeune fille, tout en passant délicatement sa main gauche sur la hanche de son petit ami pour le caresser du bout des doigts, avec un petit sourire en coin, - cinq minutes, hein ? Je chronomètre !

    Oui, Jane est tout sauf idiote.

    Oui, Jane soupçonne évidemment le pire, lorsque son petit ami cherche ainsi à l'éloigner d'une probable rivale.

    Oui, Jane remarque bien la fourbe anguille dissimulée sous sa roche.

    Oui, c'est en s'en mordant les lèvres de jalousie qu'elle tourne maintenant les talons pour repartir d'où elle vient.

    070

    Parce que malgré tout, elle décide de lui accorder encore sa confiance.

    Parce que malgré tout, elle y croit toujours.

    Parce que malgré tout, elle ne sombre pas encore dans la paranoïa.

    Sachant très bien les sentiments fous qu'il a pour elle.

    Parce que malgré tout, elle ne veut surtout - et surtout - pas lui faire réaliser qu'elle doute de lui.

    - Cinq minutes, pas plus! qu'il lui assure amoureusement, tandis qu'elle disparait déjà dans le couloir de sa classe.

    070

    Puis, et une fois qu'il se retrouve seul avec Eva Beckers, Raphaël reprend rapidement ; et de manière infantile,

    - Bon, Evaaaa, il faut qu'on parle!

    070

    - De quoi ? a l'air de se montrer complètement indifférente la concernée, en serrant un peu plus fort sa canette de Liptonic dans sa main.

    070

    - Tu as laissé tomber Terry, donc.

    - Euh.. Oui, mais ce sont des choses qui arrivent.

    070

    - Jamais je n’aurai imaginé que tu ferais une telle chose, Eva. Car à aucun moment, tu ne m’as laissé penser que tu le laisserais! Alors moi, forcément...

    070

    - Mais je n'attendais rien de toi quand j'ai rompu, alors arrête de te prendre pour le centre du monde!

    - Mais j'y suis quand même pour quelque chose, n'est-ce pas?

    -Je n’en sais rien. Peut-être.. Et puis ça ne te regarde pas d'ailleurs ! Seigneur! Mais de quoi est-ce qu'on est en train de parler, là?? Tu ne manques pas d'air toi, décidément!

    070

    - Eva, Jane et moi, c'est une histoire qui dure depuis tellement longtemps, qu'elle fait aujourd'hui partie de moi, et... Euh.... Enfin, je... je... Arg, non, c'est une histoire de fous, parce que si elle n'était pas revenue, tu peux être certaine que je t'aurais invitée ce soir, mais...

    070

    - Mais je le sais, tout ça! Et je t'ai dit que je n'attendais rien de toi!

    - Oui, mais je suis responsable de ta rupture, et ça me fais chier. Sincèrement! Car je t'aime bien, moi. Et j'adorais que tu viennes chez nous après les cours. Chose que tu ne fais plus depuis que tu as quitté Terry!

    - Normal en même temps, j'ai plus rien à foutre là-bas, moi. Et puis je crois que ton petit groupe d'amis est reformé maintenant, alors...

    - Mais tu fais partie de ce petit groupe, m'enfin. C'est bête que tu veuilles couper le cordon aussi brutalement. On s'éclatait bien tous, pourtant.

    - Ma bande, a moi, c'est mon frère et Paula, Raph'. Ce sont eux, mes amis.

    - Humpf, ok, bah, si tu le dis... Après tout, tu as peut-être raison. Il vaut peut-être mieux qu'on reste des potes de loin qui ne se disent que "salut", "au revoir", "bye bye", et "plop plop"!

    - Voilà.

    - Très bien alors, la miss. Bah, sur ce, je vais te laisser moi, car les cinq minutes sont largement écoulées là.

    - Pas de soucis. A plus Raphaël.

    - A plus.


  • 069

    *      *


    *

     

    069

    Quelques jours plus tard, et alors que Raphael donne son premier cours de musique a sa première élève, Tobias et Jane se retrouvent seul a seule dans le petit local qu'ils habitent. Le jeune homme - travaillant habituellement au fast-food du coin certains soirs de la semaine - étant justement de repos, aujourd'hui.

    - Ca fait plaisir de te revoir parmi nous, tu sais? a moi, tu m'as manqué, fais amicalement Tobias à destination de sa jeune interlocutrice, plantée a quelques mètres devant lui ; et qui va s'empresser de lui rappeler que,

    - Pourtant, toi non plus tu ne me répondais plus au téléphone, après ma rupture avec Raph'.

    - Arg, je te reconnais bien là, bichette! Toujours a remuer la vase au lieu de laisser le temps panser tranquillement les plaies!

    - On est comme on est.

    - Je suis désolé pour le boycott que l'on t'a fait subir, sincèrement.

    069

    - Ce n'est pas grave. Je ne vous en veux plus. Même si j'ai encore la haine de voir à quel point vous m'avez remplacée par Lydia.

    - Tu déconnes? Comme d'habitude, c'est elle qui nous colle! Mais on ne va pas la jeter, tout de même.

    - Si, jetez là, ouais! Et si elle veut, je peux lui trouver un pont confortable! Y'en a des sympas sur Berlin. Et si elle est pas contente, bah je lui paie même le ticket retour pour Klau'!

    069

    - Ahhh ces petites piques délicieuses, tu sais qu'elles m'avaient manqué??

    - J'espère bien! Même si ce ne sont que des piques réalistes. Faut qu'elle dégage, cette folle. Non mais elle s'est cru où? Elle s'est imaginé que vous étiez ses potes, ou quoi?

    - Tu la hais maintenant, toi, dis donc! Toujours à cause de cette soirée-là?

    - En partie, oui, mais aussi à cause de son double visage de saloperie! Elle est fourbe qu'elle en peut plus!

    069

    - Pour changer de sujet, Jane.. Toi et Raphaël, c'est redevenu du solide?

    - J'aime pas quand tu fais le suspicieux, Tob'. Qu'est-ce que tu veux dire par là?

    - Que c'est moi qui l'ai ramassé a la petite cuillère quand tu l'as jeté, et donc que je n'ai pas du tout envie de voir le scénario catastrophe se reproduire. Si tu vois ce que je veux dire..

    069

    - Tu es limite en train de dire que c'était moi la méchante dans l'histoire? Alors que c'est lui qui m'a trompée?

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    - Je n'ai jamais dit qu'il était tout blanc, attention! C'est juste qu'avant ton retour, il avait commencé à se relever. Sans toi. Et que je n'ai pas envie de revivre sa chute. Parce que quand ça va mal entre vous, c'est pépé Tobias qui recolle les morceaux!

    - Qu'est-ce que tu veux dire par, “il a commencé a se relever sans moi?” Est-ce que tu insinues là, avec quelqu'un ?

    - Ah, la fouine est lancée! Tu sais que j'attendais que tu soulignes ce passage-là de ma phrase?

    - Réponds, pépé!

    - Non, il ne t'a pas remplacé.

    - Mais il y avait une fille, dans le coin? Putain, si tu me dis que c'était Lydia, je te jure que je pars la buter!

    - Ce n'était pas Lydia. Mais Eva.

    - Eva? Euh.. Rafraichis-moi la mémoire?

    - L'ex de Terry, une petite brune. Avec deux nattes! Elle est dans la classe de Raphy.

    - Euh.. Ah ouais. Je l'ai déjà croisée, dans le couloir, au lycée, il me semble. Hum, et tu dis qu'il y'a eu un truc louche entre elle et Raph'?

    - Non. Mais il y aurait pu. Disons que tu es revenue à temps.

    - Et elle vient de larguer Terry, c'est ça? Depuis quand exactement, en fait?

    - Rappelle toi la tête qu'il tirait le jour de ton retour. Et ça répond tout de suite a ta question!

    - Hum... Et tu viens de me dire qu'il aurait pu se passer un truc... mais que je suis revenue a temps... humm..

    - Non, je ne pense pas! Eva et Terry étaient bien ensemble. Elle ne l'aurait pas largué pour Raphaël, c'est certain.

    - On larguerait n'importe qui pour Raphaël, Tobias. Mais merci de l'info! Je sais maintenant qu'il faut que je garde un oeil sur le truc à couettes.

    - Hey, la traumatises pas, hein! Elle est gentille, Eva.

    069

    - Pas de soucis, je vais rien lui faire! À part si elle touche à Raphaël. Là, je l'énuclée sur place.

     

     

    *

     

     

    069

    - Ce soir, tu sors avec nous?! propose affectueusement Jeffrey a sa soeur jumelle, peu après leur retour du lycée.

    En effet, leurs parents venant de repartir en tournée, il n'ont plus le moindre frein pour recommencer a sortir tout les soirs, jusqu'à pas d'heures.

    - Non merci, se dépêche de grommeler Eva en haussant les épaules, - j'ai pas vraiment envie de tenir la chandelle, si tu vois ce que je veux dire!!

    069

    - Je ne m'approcherai pas de Pao à moins d'un mètre, promis! insiste immédiatement Jeffrey avec un large sourire, - allez, il faut que tu bouges un peu tes fesses de la chambre! Ou tu vas finir par sentir le renfermé!

    069

    - Oui, mais non, j'étais en train d'essayer d'écrire une chanson, là! Et je te promets que je suis bien devant mon chauffage, là, avec la chaine hi-fi! Et j'ai vraiment pas envie d'aller me préparer pour sortir, pfiouh! Rien que d'y penser, ça me saoule déjà.

    - Une chanson? Le truc "printemps-machin", c'est ça?

    - "Printemps-machin", comme tu l'appelles, tu sais qu'Erwan va me la faire enregistrer à son retour, pour la mettre ensuite en bonus sur le prochain album du groupe??

    069

    - Pffft, alors je sors tout seul avec Pao, donc? Arg, t'es lourde. Et j'ai l'impression qu'on ne fait plus rien ensemble à part aller au bahut maintenant! C'était déjà pas la fête quand tu allais rejoindre tes vieux potes, mais maintenant que tu les vois plus, c'est presque pire qu'avant!

    069

    - Mouais.. Mais le fait de faire une soirée me rappelle celle où je l'ai rencontré, et ça me perturbe. Je crois que l'alcool, les soirées, et moi, on fait pas bon ménage!

    - Hum... Tu ne m’avais encore jamais dit que tu étais amoureuse du gars de la rose. Pas mal! Tu vois, tu progresses.. Tu recommences à me parler!

    - Mais je ne suis pas amoureuse!!!

    069

    - Donc on fait une soirée maison? Moi je ne suis pas contre. On peut revoir le spectacle de gad !

    - Mais je ne suis pas amoureuse!!!

    - Ou celui de Salomon?

    - Mais je ne suis pas amoureuse!!!

    - Bigard?

    - Mais je ne suis pas..

    - Lemoine?

    - Ok! Va pour Lemoine!

    - Et le gars de la rose, il craint, Eva. Il a un air efféminé! Moi, j'suis sûr qu'il est bi!

    - Jeff!!

    - D'accord, ça roule pour Lemoine!


  • 068

    068 

    Un coup de poing lancé avec violence. Voilà, ce qu'elle lui exprime soudain.

    L'hallucination.

    068

    L'image de son frère jumeau, Kurt Cobain, décédé il y'a bien longtemps.

    D'une agression d'un voyou. D'un coup de couteau dans l'abdomen ; alors qu'ils étaient tous les deux ensemble, ce soir-là. Et qu'il n'a strictement rien tenté pour lui sauver la vie pendant qu'il se vidait de son sang - sous ses yeux -. 

    068

    - Tu.. Tu.. Comment as-tu.. reprend Hanz après avoir chuté lourdement sur le sol, sous l'impact du coup de son frère, - Je.. Je dois être en train de rêver.. C'est impossible...

    Sa voix est si faible, que l'on pourrait croire qu'il sanglote de désespoir : abattu par l'idée que tout cela ne pourrait finalement bien être qu'une hallucination ; et non le retour réel de celui qu'il a tant regretté tout au long de ces années.

    068

    - Est-ce qu'il y a un problème ? intervient soudain un homme en arrivant vers les deux frères : l'un des employés du fast-food juste derrière, pas vraiment désireux de voir débuter une bagarre de rues sur son lieu de travail.

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    - Ce n'est rien, le rassure rapidement Kurt - sans se retourner - avec un sourire en coin, - une simple petite dispute entre frangins.

    - Je.. Je.. Oui, ce n'est rien, se met étrangement à appuyer Hanz en forçant un sourire ; comme s'il n'était pas terrorisé ; comme s'il 

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    - Dans ce cas, calmez-vous tout de suite, ou je fais appel aux vigiles. Vous êtes devant un restaurant, ici, tout de même, reprend inébranlablement l'employé, avant de tourner les talons pour retourner illico presto d'où il vient ; pas vraiment rassuré l'animal : légèrement penaud de s'être mêlé ainsi à une bagarre.

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    - Qui êtes-vous..? Vous ne pouvez être mon frère... recommence a douter Hanz avec douleur, une fois que l'intrus indésirable s'est complètement éloigné de la zone, - alors pourquoi faites-vous cela..

    - Tu as détruit ma vie, Hanz. Tu le sais, ça, au moins? Est-ce que tu arrives à te regarder dans le miroir, le matin, lorsque tu t'en souviens??

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    - Arrêtez!! Arrêtez!! Vous n'êtes pas mon frère!! Mon frère est mort!! se met cette fois à craquer Hanz, en retombant sur le sol à genoux, des larmes plein les yeux, - mon frère est.. Mon frère est..

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    - Nikolas! appelle soudain une voix de femme ; rousse, plantée à quelques mètres des deux hommes ; - je t'en prie, s'il te plaît..

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    Sans attendre, son interlocuteur ; qui n'est apparemment que le sois-disant frère revenu de par les morts ; commence a se diriger dans sa direction - d'un pas plutôt rapide - .

    - K.. Kurt? se dépêche alors d'appeler timidement Hanz, en déglutissant de tristesse, - que.. que...

    « Que fais-tu? Qui est-elle? Qui es-tu? Es-tu bien mon frère? »

    ...

    « Je t'en prie, réponds moi! Rassure-moi.. Raconte-moi, comment... »

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    - Ce n'est que partie remise, Hanz.. Car tu vas payer. Oh que oui.. Crois-moi... Que tu vas me le payer.

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    Sont les derniers mots que le concerné va finalement entendre des lèvres de l'image de son frère jumeau.

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    Image qu'il tente désespérément de ne pas perdre de vue, même si celle-ci s'éloigne de lui de plus en plus vite ; en s'enfonçant dans la nuit noire, aux côtés de la jeune femme rousse qui l'a rappelé.

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    Le regard perdu, il voudrait lui crier sa joie de le revoir.

    Il voudrait essayer de comprendre, la raison de ce miracle.

    Il voudrait... surtout... surtout...

    Lui demander pardon.

    Trouver la rédemption...

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    Pour pouvoir, ensuite, dormir l'esprit tranquille. Et non sans cesse tourmenté par le souvenir de cette horrible nuit ; où il a laissé mourir à petit feu, sans tenter quoi que ce soit pour le sauver, l'être le plus cher à ses yeux.

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     « Mais.. Et si, tout cela n'était finalement qu'une simple hallucination? »

    Un simple rêve. Un vil et cruel petit jeu de son imagination, nourrit par sa propre culpabilité.

    Après tout, il dort mal depuis longtemps et cela n'est pas la première fois qu'il rêve de son frère défunt, assassiné par sa propre lâcheté.

    « Non, c'est sûr.. Ce n'est pas la première fois. »

    Qu'il hallucine ainsi.

    Même si, ce soir, cette nuit, tout lui semble vraiment réel.

    Vraiment.

    Tellement...

    A tel point, qu'il s'y laisserait presque prendre.

    Presque...

    Alors il doit - et une nouvelle fois - s'obliger à se rendre à l'évidence.

    « Que son frère est mort et qu'il ne reviendra plus! »

    Jamais!

    « Parce que les fantômes ne reviennent pas à la vie! »

    Jamais!

    Et ce, même s'il la ressent encore! Cette douleur a la mâchoire engendrée par le violent coup de poing qu'il a reçu - et donc sûrement imaginé - de cette hallucination!

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    Et ce, même s'il peut désormais constater que ses mains ne s'arrêtent plus de trembler!

    Mains qu'il se met rapidement à contempler - comme souvent, d'ailleurs - pour se souvenir que ce sont elles, qui auraient pu le sauver. Ce frère agonisant.

    Si elles avaient su, à temps, attraper vivement son téléphone portable pour appeler les secours. Pour faire venir au plus vite une ambulance et sauver, ainsi, la vie de son frère jumeau.

    Et si.. Et si.. Et si..Et si...

    « Mais avec des si... l'on refait le monde. »

    « Entre deux moments de réalisme. »