*

 

La nuit est tombée depuis quelques heures maintenant sur Octavia.

 Isis vient de finir de faire sa toilette et elle est désormais allongée à même le sol, sur sa moquette, pourse relaxer en écoutant de la musique. Elle zappe quelques stations radio, avant de s'arrêter sur une chanson en particulier.

 

Gravity of Love ~ Enigma ♪ 

 

Comme souvent, ses pensées reviennent très vite sur Jun mais elle secoue hâtivement la tête comme pour chasser de son esprit ces images qu'elle ne désire plus désormais.

Denzel a bien raison : elle doit absolument tirer un trait sur ce type.

Tiens, lorsque l’on pense au loup, on en entend les pas !

Quelqu’un semble toquer à la porte ; amusée, la jeune princesse lance rapidement :

— C’est ouvert, guerrier en bois ! 

Turn around and smell what you don't see

Retourne-toi et sens ce que tu ne vois pas

Close your eyes ... it is so clear

Ferme tes yeux... c’est si clair 

— Méchante ! Marmonne Denzel en pénétrant dans la pièce. — Et puis, "En bois" ??? Alors qu’aujourd’hui, je t’ai quand même bien aidé !! 

Here's the mirror, behind there is a screen

Voici le miroir, derrière il y a un écran 

On both ways you can get in.

Des 2 façons, tu peux y rentrer

C’est vrai.

Il est souvent là pour elle sur le champ de bataille. Isis s'en souvient.

Il est souvent là pour se prendre les coups ainsi que les attaques, à sa place.

Il donnerait surement sa vie pour elle, si un jour il en avait l'occasion. 

Il tiens tellement à elle, lui au moins...

Don't think twice before you listen to your heart,

Ne réfléchis pas à deux fois avant d’écouter ton cœur

Follow the trace for a new start.

Suis la trace pour un nouveau départ 

— Tu viens déprimer avec moi sur la moquette ?? s’exclame-t-elle joyeusement, sans se retourner.

— Hummm, je veux bien venir sur ta moquette oui, rit-il sans attendre — mais pas pour déprimer ! 

Quelques secondes plus tard, ils sont allongés côte à côte devant le petit poste de radio. La conversation est difficile à entretenir : les sujets de discussions reviennent sans cesse aux combats ou à la météo du jour. 

What you need and everything you'll feel

Ce dont tu as besoin et tout ce que tu ressentiras

Is just a question of the deal.

C’est juste une question de l’affaire 

Soudain, Denzel se lance en lâchant d’un coup et presque sans respirer ;

— Tu veux diner avec moi, ce soir ? 

Isis se sent gênée par cette proposition, car elle n’est pas amicale et sans arrières pensées. Isiis le connait bien, ce petit fripon de Denzel. 

In the eye of storm you'll see a lonely dove

Au cœur de la tourmente, tu verras une colombe solitaire 

Elle hésite à répondre et Denzel ne montre aucune insistance. Il se contente d’admirer le papier peint du mur en se triturant les doigts. 

La jeune princesse se mordille désormais les lèvres ; et pourquoi n’accepterait-elle pas sa proposition, après tout ? Denzel est un homme bien... A ses côtés, elle serait sans doute heureuse.

Alors pourquoi s’entêterait-elle à ne penser qu’à un prince idiot et trop prétentieux, quand elle pourrait avoir une perle rare a ses côtés ? 

The experience of survival is the key

L’expérience de la survie est la clef 

Ne dit-on pas que la meilleure façon d’oublier c’est de remplacer ? 

To the gravity of love.

Pour la gravité de l’amour

— C’est d’accord, souffle-t-elle enfin à son ami d’enfance, avec un sourire timide.

 ~ The path of excess leads to the tower of Wisdom ~

~ Le chemin de l’excès mène à la tour de la sagesse ~ 

Mais ayant l'esprit ailleurs, Denzel ne réagit pas à sa réponse. Isiis en est aussitôt vexée. Elle reprend donc,

— Hey ! J’ai dit « c’est d’accord » !

— OK ! répond enfin Denzel avec un sourire chaleureux — on se retrouve alors en bas, dans une demi-heure ? 

— Ça marche, lui sourit-elle affectueusement en se relevant du sol. 

Try to think about it...

Essaie d’y réfléchir... 

That's the chance to live your life and discover

C’est la chance de vivre ta vie et de découvrir 

What it is, what's the gravity of love

Ce que c’est, ce qu’est la gravité de l’amour 

Alors que Denzel sort de la chambre de son amie, il tombe malheureusement sur un indésirable... Devant la porte de celle-ci. 

Jun. 

Le soldat octavien déglutit.

Les deux hommes commencent à se dévisager avec un mépris non dissimulé ; cependant, la mine de Denzel est plus rayonnante que jamais et il se met soudain à esquisser un sourire des plus ironiques. 

L’indifférence restant le meilleur des mépris, Jun ne pose pas le moindre regard sur l'idiot qui sort de la chambre de son ex. 

 Une fois que l’octavien a disparu à l’étage inférieur, Jun entre, sans frapper, dans la chambre de la princesse. 

— On avait dit une demi-heure ! s’exclame joyeusement Isis en entendant la porte s’ouvrir, avant de réaliser que ce n’est pas Denzel qui revient plus tôt que prévu, mais Jun qui se croit au dessus de la politesse !

— Qu’est-ce que tu fiches ici ??? l’attaque-t-elle immédiatement en fronçant les sourcils, — tu te crois où ??

— Je venais discuter... marmonne tout bas Jun en s’avançant discrètement, — je pense qu’on doit parler toi et moi... 

Pour essayer de trouver un terrain d’entente. Parce qu’il est fatigué de se battre continuellement contre elle. Parce qu’il aimerait qu’ils redeviennent amis, à défaut de pouvoir être amants...

 — Je n’ai rien a te dire Jun, se contente-t-elle de lui soupirer en revenant se pomponner devant son miroir ; — maintenant si tu peux me laisser, je dois me préparer. 

Look around just people, can you hear their voice

Ne regarde que les personnes autour, peux-tu entendre leur voix ? 

Elle affiche un air maintenant calme et apaisé, pour lui montrer à quel point il est désormais insignifiant a ses yeux ! 

Find the one who'll guide you to the limits of your choice.

Trouve celui qui te guidera aux limites de ton choix 

— Tu sors ? Ose timidement Jun en serrant les dents. — Avec qui ? 

— Denzel. 

— Sans blagues ! boude brusquement Jun, un peu blasé, mais surtout très vexé et sans doute un peu jaloux, — et.. Et vous allez faire quoi de votre soirée ? 

But if you're in the eye of storm

Mais si tu es au cœur de la tourmente 

— Je ne pense pas que cela te regardes. Mais je pense qu'on va baiser comme des bêtes.

Just think of the lonely dove

Ne pense qu’à la colombe solitaire 

— De... De quoi... manque de s'étouffer Jun en l'imaginant déjà dans les bras de Denzel. 

The experience of survival is the key

L’expérience de survie est la clef 

Isiis chantonne désormais en continuant de se coiffer, tout en se trémoussant devant son miroir. Jun l'observe en serrant les dents. 

To the gravity of love.

Pour la gravité de l’amour

 — Tu te moques de moi, Isiis, lui soupire-t-il finalement en haussant les épaules, — je sais bien que ce n’est pas ton genre de te faire sauter par le premier venu... 

Parce qu’avec lui, c’était sa première fois : il l’a bien senti ce soir-là.

Elle était vierge et c’est à lui qu’elle s’est donné. À lui et à lui seul...

— Mon genre ? Se moque-t-elle en continuant de se trémousser devant son miroir — mais qu’est-ce que tu sais de « mon genre » dit ? Pfff ! Allez, sors de ma chambre maintenant, je t’ai assez vu !  

« O Fortuna velut Luna »

« O Fortuna velut Luna »

— Non ! Refuse catégoriquement Jun en s’avançant vers elle, pour poursuivre d’une voix presque paniquée, — à quoi est-ce que tu joues avec ce bouffon ? Je... Je sais que tu te fiches de lui ! 

— Mais qu’est-ce que tu en sais ? lui sourit-elle en conservant un calme olympien.

Le moral de Jun est au plus bas et il est en train de lui dégringoler dans les chaussettes ; il ne sait plus quoi répondre et se sent perdu. Et si elle était vraiment tombée sous le charme de cet idiot de Denzel ? Il en a le cœur qui se serre. Non ! C’est impossible ! Elle se moque de lui...

— Tu... Tu te venges de moi... marmonne t-il en se mordant la lèvre inférieure jusqu’à en ressentir de la douleur.

— Peut-être bien que oui, peut-être bien que non, lui répond-elle tranquillement, avant de lui laisser tomber, dans un soupir, — bon tu me laisses maintenant, s’il-te-plaît ? J’aimerai finir de me préparer !

Anxieux à l’idée de la laisser se faire belle pour se sale type, Jun grogne doucement en croisant les bras pour emprisonner un des siens contre son torse. Comme si cela pouvait la retenir près de lui...

Ses yeux le brûlent, il déglutit et se sent de plus en plus mal à l’aise. Il meurt d’envie de la prendre dans ses bras... de lui caresser les cheveux, de l’embrasser, de lui murmurer des mots doux... de lui murmurer pardon...

 Mais elle ne lui laissera pas le temps de tenter tout cela ; rapidement, elle récupère son bras emprisonné et lui soupirant avec lassitude,

— Sors de ma chambre s’il te plaît ! C’est la dernière fois que je te le demande. 

 Il a perdu. L’intonation de sa voix est trop froide pour qu’il puisse espérer un retour. Un come-back. Une deuxième chance...

 Il a perdu.

 — Allez soldat Jun, filez de là ! lui sourit-elle finalement, d’une façon tellement amicale que Jun sent son cœur exploser en mille morceaux.

C’est horrible ! Elle n’est même plus furieuse contre lui, elle ne ressent décidément plus rien !

Ce scénario est le pire que Jun pouvait imaginer, qu'elle l'envoie direct dans la FriendZone !

 Blasé, anéanti, il tourne les talons pour repartir, sans dire un mot de plus.

Ses pas vont rapidement le guider jusqu’au rez-de-chaussée, sans qu’il ne s’en rende vraiment compte.

Mais cela n'est pas plus mal, car il a besoin de s'en aller marcher un peu seul, dans le froid de la nuit.

 

« C’est lorsque l’on perd quelque chose que l’on réalise  finalement son importance sa valeur »

 

*

 

Il fait vraiment froid ce soir, réalise Jun en descendant le grand escalier du château, sans regarder autour de lui. Pour le ferait-il? À cette heure-ci, il n’y a jamais personne qui traîne dans les jardins royaux. Il pourrait danser cul nu ici, la zigounette à l'air, qu'il ne craindrait même pas qu'on le surprenne !

 — Hep toi ! L’interpelle soudain une petite voix plutôt aiguë. Une voix qu’il pense reconnaître...

Asuka !

Tournant la tête vers la gauche, il constate que la jeune guerrière est affalée sur l’un des bancs des jardins.

— Qu’est-ce que tu fais là ? Lui demande-t-il en continuant de descendre pour la rejoindre.

 — Boarfff, rien, marmonne-t-elle les yeux rivés sur la mare devant elle. — T’as vu ? Y’a plus de poissons... Ils ont dû tous crever.

 — Nul n’est éternel, lui soupire Jun en se rapprochant 

— Sympa de me dire ça en temps de guerre, tu sais parler aux femmes guerrières, toi ! 

Asuka soupire et se redresse sur son banc afin de s'y asseoir. 

— Tu as peur ?demande Jun en venant s'asseoir aux côtés de la jeune femme.

— Bof... Oui et non. Je pense qu’on a toute peur de mourir au fond, alors qu’en fait, bah ce n’est qu’une étape. Le plus dur, c’est surtout pour ceux qui restent, je pense. 

— Exact. 

— Celui qui part il s’en fiche, il ne souffrira plus. Alors que ceux qui restent... 

— Je peux donc partir en paix, moi, ricane Jun avec un faux sourire forcé ; un sourire aigri qui trahit un mal-être flagrant.

 

— Dis pas ça Jun, lui soupire Asuka, — je suis sûre qu’ils seraient malheureux s’il t’arrivait malheur. 

— Tu parles, ça pourrait être lui qui pourrait me mettre le coup de grâce, continue d’ironiser Jun dans un souffle, — et ça serait juste qu’il tue l’assassin de son frère... Non ? 

— Tu délires Jun, tu délires complètement... Et puis tu ne vas sûrement pas te trouver face à face avec ton oncle, je ne vois vraiment pas pourquoi tu penses à ça. 

— Tu es bien naïve de penser qu’on ne tombera jamais sur Aaron ou Arkan... Ça arrivera un jour ou l’autre, j’en suis persuadé. Ça va me faire bizarre, tu sais... Je vais devoir soit lever la main sur eux ! Ou les rejoindre... et vous abandonner !! 

En finissant sa phrase, il part dans un grand éclat de rire.

Un rire glacé qui fait aussitôt réagir Asuka d’une voix moqueuse ;

— Alors tu serais prêt à l’affronter ? Ta petite chérie blonde ? 

L’ambiance retombe brusquement : les rires de Jun se stoppent, son cœur se serre et son visage se fige.

Ne trouvant rien à rétorquer, il préfère inspirer profondément en fermant les yeux ; pour tenter de s’évader loin du souvenir d’une conversation douloureuse qu’il a eu il y’a moins de dix minutes...

— Alors tu l’aimes vraiment ? Reprends timidement Asuka — je..Je suis désolée. C’est vrai que tu dois détester ce qui est en train de se passer...

 — De quoi parles-tu ? Qu’est-ce qui est en train de se passer ? questionne Jun, subitement perdu dans les propos de son interlocutrices.

 — Ne me dis pas que tu n’as rien remarqué ? Semble s’étonner la jeune fille — je veux dire que... Denzel... Elle ne le regarde plus du tout comme un simple ami... Tu ne t’en es jamais rendu compte ?

— Si... Mais... marmonne Jun en laissant tomber son regard dans le fond de la mare, avant de questionner à son tour, — et sinon, pourquoi est-ce que tu es seule ce soir toi ? C’est pas vraiment ton genre de te lamenter devant une mare sans poissons...

— Moi, moi je me lamente ?!? s’offusque brusquement Asuka en se désignant du doigt, — non, mais ça va pas la tête p’tit gars !

 — Les tiens te manquent, c’est ça ? insiste tranquillement Jun sans faire attention à la gêne grandissante de sa jeune amie.

 — Même pas... Mais ça sera trop compliqué à expliquer.

 — C’est un homme ? Ou... Une femme ?

 — Hey ! Je ne suis pas lesbienne !

 — C'est donc un homme. Est-ce que je le connais ?

 — Mêle toi de ton cul !

 — C’est un soldat ?

— Oui... finit par souffler Asuka en se passant une main derrière, l'aie gêné.

— Ne me dis pas que c’est lui ? Marmonne soudain Jun en affichant un air dépité, — je suis sur que c'est lui...

 — Pas la peine d’en rajouter non plus ! C’est déjà assez dur de se faire devancer par une blonde...

 — Tu parles mal de ta princesse.

 — De ma reine même, car elle est censée être l’égale de Keichi, même si elle en glande pas une dans le royaume !

 — Hey ! gronde soudain Jun — surveille tes paroles !

— Oh pardon mon lapin, j’avais oublié que t’étais fou de miss monde !

 — Hey ! Je vais te laver la bouche au savon toi !

 Ils se regardent soudain et éclatent ensuite de rire, comme des enfants. 

 — T’es con quand même ! Rit amicalement Jun, — quand on te voit comme ça, on dirait vraiment pas que t’es aussi con !

— Je peux te retourner le compliment, bouffon ! Pouffe Asuka en réponse, avant de figer son regard vers le porche du château — hey, regarde, je crois qu’on a de la visite.

— Hein ? s’étonne aussitôt Jun en se tournant vers ce que sa camarade dévisage ; de loin, on dirait une enfant... Une jeune fille.

— Je la connais elle, affirme tout bas Asuka à son ami, — elle était avec le prince Arkan, ce soir-là.

— Ah bon ? Mais c’est qui ? Tente de s’informer Jun, un peu perturbé ; c’est la première fois de sa vie qu’il ignore quelque chose sur Arkan.

 — Qu’est-ce que tu veux maintenant ? Grogne froidement Asuka en direction de la jeune fille toujours plantée sous son porche.

— Arrête, soupire tout bas Jun — tu ne vois pas qu’elle est terrorisée ? Viens, on va la voir.

Il finit sa phrase en se levant pour rejoindre l’enfant apeuré.

Asuka préfère guetter la scène de là où elle est ; elle n’a absolument pas confiance en cette gamine, qui est liée à leur ennemi, Arkan Daemon.

— Eh bien, qu’est-ce tu as, à trainer ainsi toute seule, en pleine nuit ? sourit amicalement Jun en se dirigeant rapidement vers l’adolescente.

 

— Je... Je... balbutie timidement la concernée — c’est vous... Jun ? 

— Oui, c’est moi, Jun ! Mais tu peux me tutoyer tu sais, je ne mords pas ! 

Il est intimidant et la jeune fille se sent de plus en plus mal à l’aise d’être ici ; il faut avouer qu’elle s’est un peu précipitée sans réfléchir, ne sachant pas vraiment comment le retrouver.

 — Tu cherches quelque chose ? Quelqu’un ? Reprends Jun en réalisant que son interlocutrice n’ose plus prononcer le moindre mot — Arkan ? Tu cherches Arkan, c’est ça ?

 Il vient de lui retirer un poids énorme ; il a compris tout seul ! Soulagée, Tenma se décide alors à lui répondre, tout vas — Oui, en fait.. Il faut que je le vois... Mais je ne sais pas comment, alors j’ai pensé à vous... Son grand frère ?... 

Elle termine sa phrase en affichant un air penaud ; un air inquièt, un air innocent qui fait immédiatement sourire et répondre Jun

— Tu veux que je t’emmène à la maison, c’est ça ? Sur Eternia ? 

« À la maison »... En prononçant cela, il n’a pas pensé que ce terme lui déchirerait ensuite le cœur. « À la maison...” C’est vrai qu’autrefois, la maison Daemon était aussi la sienne...

— Te laisse pas avoir Jun ! Arrive brusquement Asuka en dévisageant Tenma avec suspicion — elle est avec eux ! Elle veut juste que tu retournes là-bas ! Ils veulent que tu nous abandonnes !

— N.. Non... Pas du tout, essaie de se défendre Tenma, — c’est juste pour.. Pour..

— Pour Aaaaarkaaaan ! La cingle méchamment la jeune guerrière en lui lançant des regards assassins, — mais dis-moi petite, tu saurais me rappeler tes origines ? 

— Octavienne, mais.... 

— Alors tu n’as rien à foutre avec notre ennemi ! 

— Arrête Asuka ! L’arrête vivement Jun, — l’amour n’a ni frontière, ni d’âge ni sexe, je te pensais assez intelligente pour le savoir.

 — Mais, mais, mais, mais tu es de son côté !!! Râle Asuka en tapent du pied, — tu ne vois pas qu’elle essaie de te ramener là-bas ??

 — Et alors ? lui soupire Jun en haussant les épaules de dépit, — à la limite, elle aurait bien raison non ? Je suis eternien à la base....

 Sa phrase réduit sa camarade au silence qui accuse difficilement le coup.

 — On va aller à la maison petite, reprend Jun vers Tenma — je te téléporte et je te laisse là-bas. Ça te va ? Tu veux juste voir Arkan, c’est ça ? Tu sauras gérer si je te laisse sur place ?

— Oui.. Merci ! Merci ! Merci beaucoup, sourit affectueusement l’adolescente, heureuse et émue de voir qu’il existe encore des gens qui savent tendre la main dans ce monde.

 — Alors ça roule, lui fait une dernière fois Jun, avant de revenir s’adresser a son amie derrière lui, — je reviens dans moins d’une heure Asuka, tu sauras survivre sans moi ?

— Évidemment, tocard ! Marmonne celle-ci, en essayant de se donner un air aigri, alors qu’en fait elle est ravie qu’il ait affirmé qu’il serait rapidement de retour vers eux.

 Peut-être est-il vraiment un allié après tout...

Maintenant qu’il a disparu, en entrainant la jeune Tenma dans son aura bleutée, la guerrière octavienne laisse échapper ce sourire qui la tiraillait depuis maintenant quelques minutes.

Elle est heureuse. Heureuse d’avoir des amis. De voir Octavia aussi soudée.

 Peu après, Jun pose le pied sur le balcon de la maison Daemon en tenant fermement la main de Tenma qui n'est pas rassurée d'apparaître ici, en terres ennemies. Et si des soldats Eterniens la surprenaient et l'attaquaient à vue ?!

Sur Octavia, sa patrie mère, on dit que les eterniens sont des bœufs assoiffés de souffrance et qu’ils tuent sans hésiter quiconque n’est pas des leurs !

 

— Voilà on est arrivé, informe Jun a la demoiselle a ses côtés, — la fenêtre tout à droite, c’est notre chambre, et vu qu’on entend sa basse, on peut en déduire qu’il est là.

 — Il est là ?? Tout à droite, il est là ?? Tremble Tenma, un peu intimidée à l’idée de le revoir dans ces conditions.

 — Oui, il est là. Mais c’est bien pour ça que tu voulais que je t’emmène non ? Pour le voir, n’est-ce pas ?

 — Oui, mais... mais... mais..

 — Oui, mais ? s’étonne Jun — tu ne veux plus le voir ? Tenma ?

 — Vous croyez qu’il va me jeter ?? Ose brusquement l’adolescente en tirant une grimace qui en dit long : que fait-elle ici ? Qu’elle idée saugrenue a-t-elle eu de vouloir venir le chercher, sur sa planète, dans sa maison ? Serait-elle complètement folle ?

 — Non, il ne va pas te « jeter » Tenma, soutient sagement Jun — Arkan a des défauts certes, mais ce n’est pas un monstre. Bien au contraire.

 — Je lui ai dit des choses horribles l’autre fois... souffle Tenma avec douleur — vraiment horribles... Il doit me détester maintenant...

 — Non, je ne pense pas. Se contente de lui répondre Jun, — allez je te laisse, et toi tu prends ton courage a deux mains et tu vas toquer a la porte !

 — Vous..Vous partez ? Panique presque Tenma, apeurée à l’idée de se retrouver seule sur cette planète de sauvages.

— Oui Tenma, je m’en vais, souffle Jun en s’entourant de son aura de téléportation, — ce n’est plus chez moi ici...Arkan s'occupera de toi.

 — Non !!! Emmenez-moi avec vous !!!!

 — Non, tu restes ! Je me suis pas déplacé pour rien !!

Ca y’est, il a disparu avec sa lumière bleutée.

Il a disparu en la laissant seule ici !

Tenma est terrifiée mais désormais qu'elle est toute seule sur c balcon, elle n'a plus d'autre choix que de s'avancer vers la fenêtre de la chambre des princes Daemon afin de voir Arkan ! 

Paniquée, elle tente de se répéter qu'Arkan ne la tuera surement pas, il doit avoir trop d'honneur pour lever la main sur une fille ! 

 Au pire.. Il l'humiliera juste puis l'enverra balader ! Elle s'en remettra !

 Elle déglutit donc et se met en face de la première fenêtre qu’elle trouve sue son chemin : il est là ! Derrière des rideaux en dentelle. Jun ne s'était pas trompé !

 Il est là ! En train de jouer de la basse... Il est là ! Toujours aussi beau ! Il est là ! L’air apparemment très concentré sur sa musique !

 Peu à peu et sans qu'elle ne s'en rende compte, elle esquisser un doux sourire en l'observant...

Il ne l’a apparemment pas encore remarquée, puisqu’il ne semble pas lever la tête de son instrument ; tant mieux, cela retarde la crise, les hurlements, et sans doute la déchirure d’un cœur.

 « La déchirure d’un cœur ».... C’est sans doute ce qui va se passer, se met soudain à songer Tenma en redescendant peu à peu de son nuage.

  Ses yeux s’humidifient doucement et ses doigts deviennent moites.

Seigneur dieu, que fait-elle ici ? Sur cette planète, devant cette fenêtre ?

Quelle idiote, quelle idiote, mais quelle idiote...

Que.. Que.. Le regard d'Arkan vient de pivoter dans sa direction. 

Il l’a vue ! Il l’a vue !

 Il se raidit en l'apercevant ; il a l’air blasé et hausse les épaules.

 Il l’a vue !! Il la vue ! Quelle honte !

 La jeune fille en a les joues qui se colorent et elle se remet à trembler comme une feuille.

 Seigneur dieu, il l’a vue ! Il l’a vue ! Quelle honte ! La honte ! La honte !

Tiens, il pose sa basse....

Pour se diriger vers la sortie de sa chambre !

 Seigneur dieu ! Ca y’est, il vient la chercher pour la tuer !

La noyer !

 L’éventrer !

 L’écarteler !

 — Qu’est-ce que tu fous là ? L’attaque-t-il méchamment dès qu’il l’a rejoint sur le balcon. — Et comment est-ce que tu as fait pour venir ici ?

 — Ton frère... ton frère... arrive à peine a lui déglutir Tenma en fuyant son regard assassin. — C’est ton frère qui m’a....

 — Je n’ai pas de frère.

 — Jun Daemon quoi... Ton... Ton...

— C’est le fils du frère à mon père, ce n’est donc qu’un cousin, raconte froidement Arkan, comme s’il avait déjà renié celui qui a toujours tout partagé avec lui depuis le berceau.

 Mais Tenma n’est pas dupe, elle sait bien que Jun Daemon représente plus qu’un simple cousin a ses yeux.

 

— Bon, et sinon, tu me dis qu’est-ce que tu fous là? Reprend méchamment Arkan en se plantant devant elle, les bras croisés, et les jambes bien raides pour se montrer ferme et impitoyable.

 — J’en sais rien... marmonne honteusement Tenma — en fait j’en sais rien.. Je voulais juste te voir...

 — Pour ?

 — Pour... j’en sais rien...

 — Tu es sûre ?

 — N.. Non..

 — Alors je t’écoute.

 — C’est bon, tu as gagné ! s’impatiente Tenma en trépignant, — je m’excuse voilà. Je ne pensais pas une seule de ces horreurs que je t’ai balancées... Je m’excuse, voilà ! Et je m’excuse aussi pour Angeal... Pardonne moi s'il-te-plait !

 — Tu n’as pas à t’excuser, lui fait simplement Arkan comme s’il était complètement imperméable à sa déclaration de sentiments — c’est moi qui vous ai attaqué, c’est moi qui ai frappé ton chéri.

 — Parce que tu étais jaloux, non ? Ose timidement la jeune fille en essayant de revenir dans son regard.

 — Non.

 — Menteur !

 — Tu me traites de menteur ?? Moi ?? s’agace Arkan.

— Si tu n’étais pas jaloux, tu n’aurais pas fait tout ça ! Tu.. Tu serais parti et tu m’aurais zappée, tout simplement, non ?!

Son interlocuteur préfère garder le silence en dirigeant rapidement son regard vers le ciel ; il fait si beau aujourd’hui ! Le ciel est bleu et empli de nuages... 

— Casse-couilles va ! Lui lance maintenant Tenma en faisant un pas en arrière et en détournant la tête — le pire c’est que j’étais vraiment contente de te voir... J’ai adoré ta réaction, même si elle était très moche..

 — Moué... fait semblant de bouder Arkan, avant de revenir plus subtilement — si tu m’embrasses tout de suite, j’oublie tout !

— Carrément ! Lui soupire Tenma, — mais on a autant de torts l’un que l’autre, alors finalement j’ai pas à m’excuser ! Et puis est-ce que tu mérites un baiser ?! Ce ne serait pas plutôt moi qui en mériterai un ?! Pour avoir bravé la garde royale pour tes beaux yeux ? Pour avoir cherché à parler à un type que je connais même pas ? Pour toi ! Tu te rends pas compte de tous les dangers que... 

Elle est obligée d’interrompre brusquement sa phrase, car Arkan vient de l’attraper vivement par les hanches pour la ramener vivement vers lui.

Elle déglutit et reste silencieuse, le regard maintenant perdu dans ses beaux yeux bleus qui lui expriment maintenant un désir croissant. Ses bras sont ballants le long de son corps, elle n’ose pas encore l’enlacer ; ou alors elle attend simplement que ce soit lui qui fasse tout. Que ce soit lui qui lui prouve maintenant qu’il tient a elle et qu’il l’a veut.

Faire le premier pas ? Cela ne pose aucun problème à Arkan. C’est sans hésiter qu’il se jette sur les lèvres de sa partenaire pour s’en emparer et entamer un long baiser passionné.

Ravie, Tenma lui passe enfin les bras autour du cou, pour l’enlacer tendrement.

 Elle est vraiment au comble du bonheur. Et dire qu’il y’a moins de dix minutes, elle regrettait presque d’être venue ! Quelle folle ! Avoir osé se présenter ici est sans doute la meilleure décision qu’elle ait prise de toute sa vie entière !

    — Tenma... lui murmure-t-il soudain, interrompant ainsi leurs jeux de langues — ça va être délicat maintenant, nous sommes en guerre... 

— Et alors ? On s’en fiche, tu es toujours le bienvenu à l'école alors..

 — Humm non. Elova m’a bien fait comprendre le contraire tu sais, et elle n’a pas tort... Nos peuples se haïssent...

 — Je m’en fous, car moi je t’aime.

— De.. De... balbutie Arkan en devenant rouge écarlate de honte ; c’est la première fois de sa vie qu’on lui dit une telle phrase...

 — T’u est encore plus chou quand tu rougis dis donc !! le taquine-t-elle immédiatement avec un sourire amusé.

 — Mais arrêteuuuuh ! Tu me gênes ! Continue de rougir Arkan — et puis je parlais sérieusement !! Comment est-ce qu’on va se débrouiller tous les deux ?! Ça va être impossible !

— Ne me laisse pas !! lui ordonne-t-elle en le serrant encore plus fort contre elle — tu as vu tout ce que j’ai fait pour te retrouver ?? Alors tu n’as pas le droit de me laisser maintenant !!! Pas à cause d’une guerre à deux balles !!!

 — Je... Je... tente Arkan en réfléchissant à des solutions qui pourraient leur convenir.

 — Arkan ! Appelle soudain une voix qui vient de l’intérieur de la maison ; une voix que le concerné a immédiatement reconnue, puisque c’est celle de son père.

 — Qui est-ce ? Demande timidement Tenma, encore agrippée à son petit ami.

 — Mon père.

 Aaron Daemon ? songe avec terreur la jeune octavienne ; cet homme est sois-disant l’eternien le plus cruel et il paraît même que c’est lui qui rend malsain son peuple !!

— Arkan ! Appelle à nouveau Aaron en poussant la porte du balcon, pour apparaître devant le concerné, 

 — Arkan ? Redemande-t-il alors, l’air intrigué par les formes qu’il arrive à distinguer derrière son fils. — Qui est-ce ?