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    — Rah, bordel, c'était à prévoir, on aurait dû appeler avant de venir, grommelle Eva aux côtés de son frère, devant la porte TroubleMaker. En effet, la jeune femme s'est rendue ici en son unique compagnie, laissant son ami Samuel faire plus ample connaissance avec la fiancée de son jumeau. Les deux avaient eu une bonne approche, au premier contact. Ils semblaient avoir pas mal de points communs ; un goût pour l'art très prononcé et surtout pour le dessin, la peinture. Cela faisait tellement longtemps qu'Ana n'avait plus approché un pinceau qu'elle s'est retrouvée ravie de rencontrer quelqu'un qui a presque une passion presque similaire à la sienne.


    — On va les attendre ici, c'est pas grave, informe tranquillement Jeffrey en s'adossant, l'air nonchalant, contre le mur derrière lui, démontrant par ce geste qu'il est prêt à patienter jusqu'à ce que mort s'ensuive -ou pas, en fait. Parce que si ces bons à rien de musiciens du dimanche pouvaient se dépêcher de rentrer chez eux, cela l'arrangerait, il doit bien l'avouer. Surtout que vu l'heure qu'il constate à son poignet, 8 h du matin, il trouve très étrange qu'il n'y ait pas un chat dans cet appartement apparemment fantôme! À moins que ces crétins de musiciens soient tous encore en train de dormir...? Dans ce cas, ils auraient dû se faire réveiller par la sonnette sur laquelle il y est allé franco.


    Réfléchissant à tout cela, Jeffrey soupire et juste après, la porte coulissante de l'ascenseur s'ouvre soudain pour laisser apparaître derrière elle, Jane, qui reviens de son habituel petit boulot de baby-sitter. La jeune femme est bien entendu plutôt surprise de constater les deux Beckers en ces lieux, mais qui se presse cependant de les saluer comme il se doit, de quatre bises chacun.

    — Je suppose que vous êtes venus voir Raphaël, qu'elle leur sourira très vite en enfonçant ses clefs dans la serrure de l'appartement pour déverrouiller par ce geste la demeure TroubleMaker, — ça va vraiment faire plaisir à Raph' de vous voir, parce qu'il est un peu malade en ce moment.

    — Heinnnn? Mais qu'est-ce qu'il a ?! se fige aussitôt d'effroi Eva, — il lui est arrivé quelque chose ?!

    — Non, il est juste un peu cloué au lit avec une bonne grippe ! Rien de bien méchant, ne t'inquiètes pas.


    — Où est-il ?! Demande avec empressement Eva une fois à l'intérieur avec son frère, derrière les pas de son interlocutrice qui lui répond dans attendre,

    — Tu prends la porte là devant et c'est la deuxième chambre, à gauche. Je te laisse y aller? Il sera content de te voir à son chevet. Moi je vais faire du café, tu en veux, Jeffrey?

    — Pourquoi pas, répond le concerné avec un hochement de tête et un sourire, tandis qu'Eva se presse déjà ; après avoir jeté son manteau sur un dossier de tabouret ; vers l'antre de son Raphaël que celui-ci a récupéré le temps de sa maladie, troquant son canapé clic-clac pour son ancien grand lit beaucoup plus confortable.


    — Et sinon, c'est vraiment rien ce qu'il a, Raph? Demande poliment Jeffrey une fois seul avec Jane, — parce que je l'ai rarement vu malade, lui.

    — Même les plus grands peuvent parfois montrer des signes de faiblesses, sourit Jane, l'air innocent, naïf, voire idiot, selon Jeffrey, — le moral joue toujours beaucoup sur la santé, reprend Candide, — je pense que retrouver Eva lui fera beaucoup de bien pour se remettre. Il a eu une vie très agitée ces derniers temps et ne s'est pas vraiment ménagé, donc...


    — Je vois, soupire Jefrey, blasé par l'innocence agaçante de son interlocutrice.

    À ce moment, il réalise en effet quelque chose dont il se doutait pourtant déjà depuis un moment : son demi-frère de sang est tout sauf entouré, ici, dans cet appartement. Le jeune Beckers ne trouve pas normal que son interlocutrice soit en ce moment en train de remplir la machine à café avec indifférence, telle une enfant, une gamine qu'il aurait envie de gifler, corriger sévèrement. Ne devrait-elle pas se rendre dans la chambre du malade afin de se renseigner sur son état de santé? Jeffrey en arrive à se demander si le Roméo de sa soeur possède réellement des amis, ici, dans cette demeure. Il se presse alors de faire part de son début de mauvaise humeur à l'unique personne ici présente avec lui,

    — une chose est sure, s'il en claquait, tu ne te suiciderais pas de désespoir.

    Cette petite pique est intelligente et elle fait aussitôt rougir le visage de Jane qui bafouille très vite et honteusement,
    — Mais Raphaël a juste pris froid! Il, il est juste patraque.

    — Ne te fous pas de moi, vous êtes tous une bande de gamins immatures dans cette baraque, et je me demande ce que fout Raph au milieu d'une bande de clampins pareils. Lâche Jeffrey sans aucune retenue. Pourquoi en aurait-il après tout? Les courbettes ne sont pas sa spécialité.

    — Écoute Jeffrey, j'ai beaucoup de respect pour toi, mais on ne se connait que de nom, Et de loin, alors je vais devoir te rappeler que nous n'avons pas élevé les cochons ensemble. Tu t'abstiendras donc à l'avenir d'attaques à mon encontre, ou ça va très mal aller ! Raphaël est l'un de mes meilleurs amis depuis le primaire et il compte pour moi, contrairement à ce que tu penses et insinues de façon aussi honteuse! J'ai plus vécu avec lui que tu n'en vivras jamais, alors tes discours de pseudo-ami, voire grand frère frustré de l'ombre, tu te les gardes et te les fous là où je pense.

    — Attention à ce que tu dis toi, parce que si tu as été habitué à Raphaël qui accepte tout et de la part de n'importe qui, même des pires cruches, ne t'égare pas trop avec moi ou ton joli petit visage plein de fond de teint pourrait très vite afficher des bleus. Menace dans une seule tirade Jeffrey dans un calme olympien tout en avalant une gorgée de café, — t'es une merdeuse, c'est tout, assume, et si t'es pas contente je m'en tape, moi des gamines comme toi, j'en pète deux tous les matins, alors me les brises pas, c'est un conseil.

    — Ça ne sert à rien de me menacer, je n'ai absolument pas peur de toi. Tu te crois intelligent parce que tu as une petite réputation de caïd des rues ? Laisse-moi rire, tu ne m'impressionnes pas du tout.

    — La ferme, met fin à la conversation Jeffrey en allant se jeter dans le canapé du salon, tandis que Jane, vexée, s'enferme dans la chambre qu'elle partage avec son petit ami pour réveiller amoureusement le concerné ; après tout, il y a plus important dans la vie que ce crétin de « Jeffrey »! Son homme, par exemple...

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