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    == 28 décembre ==

     

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    ♪ Time – Hanz Zimmer ♪

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    D'une main fébrile et plus angoissée que jamais, Éva Beckers pousse délicatement la porte de la chambre d'hôpital d'Erwan Muller, ce matin.

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    Elle est accompagnée de son petit ami, Raphaël, dont elle agrippe soudain et d'un geste vif, le poignet, dès lors qu'elle constate qu'entre ces murs, son beau-père n'est pas seul, en cette matinée plutôt ensoleillée...

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    En effet, Vanessa Beckers se trouve assise à ses côtés sur une sorte de chaise longue qui lui fait sans doute Office de lit très souvent ; au vu de la petite valise en cuir qu'Éva aperçoit très vite dans la pièce.

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    Le regard de la femme d'âge mûr se lève faiblement en direction des nouveaux arrivants et Éva peut ainsi constater à quel point il paraît vide et éteint : sa mère à l'air plus abattu que jamais, elle semble vidée de toute émotion. Elle à l'air d'une coquille vide. Sa détresse est palpable et alors que la jeune chanteuse s'était pourtant juré de ne pas craquer, ses yeux s'humidifient discrètement : peut importe ce quelle verrait dans cette pièce, elle ne voulait pas fondre en larmes dans cette chambre, devant le spectacle de son père de cœur dans un tel état. Elle aurait pensé savoir venir entre dans en ces lieux sans s'écrouler. Elle n'était plus une enfant, après tout, elle pensait donc savoir contenir ses émotions, en acceptant la dure fatalité de la vie.

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    Plus facile à dire qu'à faire... Ses yeux sont déjà pleins de larmes alors que sa mère se relève de sa chaise longue pour commencer à se traîner, tituber, dans sa direction, afin de venir l'attraper par les épaules de ses deux mains tremblantes, tout en lui bafouillant quelques phrases désespérées et maladroites

    — E...Éva...Il..Il..

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    — Je suis là maman...laisse tomber Éva en enroulant sa mère de ses deux bras, tandis que la concernée laisse silencieusement dévaler un flot de larmes sur ses deux joues ; les crevasses qui se sont formées sous ses yeux prouvent au jeune couple qui l'observe qu'elle est à bout nerveusement et sûrement au bord de l'épuisement...

    À cet instant, les conflits et rancoeurs passées semblent déjà et étrangement oubliés. Ou alors figés loin, très loin, dans les esprits.. Au fin fond d'un passé lointain et douloureux.

     Éva ne trouve plus la force d'haïr sa mère pour son constant manque de compréhension à son égard.

    Ses nombreux ratés paraissent déjà oubliés.

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    C'est au fond du gouffre que l'on apprend à dire « je t'aime ».

     Notre vengeance sera le pardon. [Tomas Borge]

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    Vanessa de son côté n'éprouve plus aucun dégoût ni agacement vis-à-vis de sa fille qui l'a pourtant si souvent déçue par le passé. Et même son ventre arrondi ne l'horripile plus. Pourtant, et alors qu'elle serre fort son enfant -devenu apparemment roux depuis leur séparation- dans ses bras, elle la ressent bien, cette petite rondeur naissante sous la veste de sa fille. Un arrondissement dont elle connait la cause et la raison, mais contre lequel elle n'a plus la force de pester. Son enfant, l'un des êtres les plus chers à sont cœur, se tient là, devant elle et dans ses bras. Et de cet instant, Dieu seul sait à quel point elle a pu en rêver, sans jamais réussir à le reconnaître cependant. Il est tellement plus aisé d'avouer la colère que l'affection...

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    Le cœur d'une mère est un abîme au fond duquel se trouve toujours un pardon [honoré de Balzac] 

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    Mais rien ne peut être plus égoïste que le pardon [André Chamson]

    Raphaël serait menteur s'il prétendait que cette scène ne l'émeut pas, car ce qu'il ressent en ce moment même est bien une grande émotion. La preuve, il va même en sortir de la pièce afin de laisser cette mère et sa fille s'enlacer et se retrouver comme il se doit. Mais dans le couloir d'hôpital, pendant qu'il va patienter sagement et seul, le musicien va rester cependant très mitigé face à la bienveillance apparente de Vanessa Beckers, une femme qui ne lui a pas vraiment, au cours de ces dernières semaines, inspiré une quelconque sincérité. Le pardon étant si facile à quémander et plus facile à offrir qu'à refuser, il est rare de voir quelqu'un de meurtri le bouder. Le pardon étant la solution de facilité que s'accordent les âmes brisées afin d'essayer de continuer d'avancer péniblement entre les bouts de verre tranchants, jusqu'au nouvel impact. Jusqu'à la nouvelle déchirure. Raphaël n'est plus idiot aujourd'hui, beaucoup moins altruiste qu'à une époque, plus vraiment aveuglé par une compassion inébranlable et impartiale...

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