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    — ça va ? Demande chaleureusement Aglaé, l'air inquiet, en direction de son ami Raphaël qui émerge lentement sur le canapé du salon qui lui fait office de lit depuis quelques semaines déjà. En effet, la veille, le jeune Tobias a du aider son comparse TroubleMaker a rentrer de soirée, car celui-ci, encaissant difficilement un violent bad trip, n'était plus vraiment en état de se déplacer seul. C'est à peine s'il arrivait à se tenir debout et son ami batteur avait du le trainer jusqu'à son habituel canapé-lit pour l'y coucher, en le bordant doucement, pour attendre ensuite, l'air inquiet, que son protégé s'endorme afin de récupérer de sa douloureuse nuit. Et pour cause, Raphaël, pourtant un adepte des soirées arrosées et même accompagnées de diverses drogues légères, n'avait encore jamais été sensible aux malaises ou bad trip, auparavant...


    — Ma tête, putain... grommelle le guitariste Troublemaker en se remémorant lentement l'historique de sa soirée de la veille, implorant ensuite du regard l'amie qu'il constate à son chevet, tout en esquissant une petite bouille penaude, — tu.. Tu peux m'apporter de l'eau, s.t.p.?


    — Bien sur, lui sourit immédiatement Aglaé en se relevant du sol pour filer vers la cuisine de l'appartement, — c'est dur la bouche pâteuse au réveil, hein! qu'elle le taquine amicalement.


    — Je.. Mouais, lui boude tout bas Raphaël en retour, un peu honteux, — et si ce n’est pas trop exagéré, trop te demander, si tu pouvais me faire une aspirine, stp..


    — Tu as fait un bad trip, hier soir, rappelle nerveusement Aglaé pour réponse, tout en préparant cependant le médicament de son ami. L'expression de la jeune femme est plus sérieuse et ferme qu'il y a quelques minutes, car elle est déçue, de constater que l'un des plus matures jeunes hommes qu'elle n'ait jamais connus, ait finalement abusé de drogues jusqu'à faire un malaise classique d'adolescents stupides et irréfléchis, — tu vois, je le savais, qu'elle te ferait du mal, c'était tellement prévisible, et toi, tu...


    — Rien à voir avec elle, se braque aussitôt Raphaël en récupérant son verre d'Aspégic des mains de son amie, la remerciant d'un timide "merci". Il maugrée ensuite, tout en fuyant son regard, — l'ecksta devait être mal coupée, c'est tout, ce n’est pas de ma faute. Ca peut arriver le monde, quoi...


    — Prends soin de toi, c'est tout, lui sourit simplement Aglaé d'un air triste en ignorant ses justifications qu'elle trouve plus qu'idiotes et alimentées par un égo blessé, — si tu ne le fais pas pour toi, fais-le pour tous les gens qui t'aiment. On s'inquiète pour toi, nous. Alors, pense à nous.. Un peu.


    — Ne t'inquiète pas, cela ne se reproduira plus. Je ferais plus attention à ce que je prends, désormais. Pardonne-moi de te causer du souci, grommelle Raphaël pour rassurer son amie, avant de se recoucher dans son canapé en s'enfouissant sous sa couverture.


    Il est en effet tenaillé par une honte effroyable. Elle l'avait prévenue, elle s'attendait à cela ; et elle ne s'était pas trompée. Raphaël détestait lui donner raison. Son égo venait de se faire gifler, piétiner. Et il sursaute soudain...


    Alors qu'il recommençait à s'endormir, recroquevillé sur lui-même sur son canapé et sous sa grosse couverture molletonnée. Ce n'est qu'Erwan qui apparait soudain sous ses yeux pour lui demander d'une petite voix ; il est arrivé derrière lui tel un ninja et Raphaël réalise que cet homme est tellement discret lorsqu'il le veut qu'il aurait pu l'assassiner dans son sommeil s'il l'avait voulu! Le jeune Bauer s'imagine la scène en grimaçant en se retournant vers l'indésirable empêcheur de dormir en rond, pour lui grogner un bref et plutôt froid,


    — Quoi ?


    Il culpabilise cependant très vite de ce ton glacial employé, au souvenir de certaines cruautés qu'il a balancées il y a peu au pianiste de son groupe. Raphaël doit bien s'avouer qu'il ne cautionne pas lui-même son propre comportement. Parfois, il se fait horreur...


    — Écoute, je... qu'il tentait alors d'une petite voix, en se demandant comment est-ce qu'il pourrait rattraper sa bévue. Il faut qu'il brouille les pistes, fasse oublie au synthé TroubleMaker les informations ; pourtant secrètes ; qu'il lui a malencontreusement révélées, — j'étais en colère, complètement crevé, et voulais te blesser, Erwan. Je m'excuse... Je t'ai vraiment balancé de la merde.


    — Où est-elle? Son adresse? Questionna simplement Erwan avec assurance, comme s'il attendait de son interlocuteur une réponse qui aille obligatoirement dans le sens de sa question ; et de façon positive, en plus.


    — Mais qui? De qui? Endosse immédiatement le rôle du niais ignorant, Raphaël, feignant l'idiotie, espérant ainsi dissiper les doutes de son interlocuteur.


    — Dis-le-moi, je t'en prie... n'est absolument pas dupe Erwan en continuant de supplier, l'air implorant, plus malheureux que jamais ; son but est évidemment de faire en sorte que le jeune Raphaël soit assailli d'une odieuse culpabilité!

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