• 045

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     De son côté, Kylian arrive enfin chez sa petite amie.

    045

     Bien sûr, il prie pour éviter de croiser la sœur de celle-ci ; prière entendue puisque Emma lui saute au cou, à peine a-t-il pressé le bouton de la sonnerie.

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     — Enfiiiiin, tu es là, trépigne-t-elle encore agrippée amoureusement à lui, tu m’as manqué, tu m’as manqué, oui depuis hier tu m’as manqué!! 

     — Toi aussi, toi aussi, toi aussi, répète-t-il sur le même ton qu’elle pour la taquiner.

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     — C’est pas gentil de se moquer, éclate-t-elle de rire ensuite, avant de proposer avec un immense sourire,

    — On passe toute la journée ensemble hein?? Ici, et ensemble!! Rien que tous les deux!! Ma sœur est sortie alors on a la paix!!

    — Oh, mais tu veux pas qu’on aille au squat rejoindre les autres ?

    Cette phrase surprend immédiatement l’adolescente et elle n’attend pas plus de deux secondes pour répliquer, en affichant un air perplexe

    — Qu’est-ce qu’il y’a ? Tu as pris goût au shit, c’est ça ?

    Il rougit et semble très terriblement gêné,

    — Eeeuh, non...

    — Menteur ! le coupe-t-elle vivement, t’aimes bien ça, fumer !

    — OK je l’avoue, j’aime bien l’effet que ça procure, laisse-t-il tomber en fuyant son regard, avant d’y revenir pour la rassurer,

    — Mais je jure que je suis pas accro !

    — Moui... marmonne-t-elle tout bas, pas du tout convaincue.

    — Et puis toi tu dois avoir envie de voir Hugo et Franz non ? demande innocemment Kylian en sifflotant.

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     Tristement, elle se recule et baisse la tête, en répondant en toute franchise

    — Au squat, je suis avec lui, et tu le sais... Et aujourd’hui j’aurais voulu n’être qu’avec toi..

    Terriblement touché par le visage attendrissant qui a formulé cette phrase adorable, il fait un bond en avant pour serrer la jeune fille dans ses bras, en s’excusant timidement ; 

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     — Désolééééééééé! Tu as raison, je suis trop bête, on reste ici, rien que tous les deux!!

      Trop heureuse et émue, elle se contente de se blottir tendrement contre lui, en murmurant ensuite tout bas

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    — Le plus beau jour de ma vie fut celui où tu y es entré...


  • 044

     

    *

     

     

     Aujourd'hui il y'a un beau ciel ensoleillé et sans nuages sur Berlin, et ce temps est bien agréable en ce beau Dimanche. 

     Mais malgré la belle journée qui se lève, Claire est maussade ce matin ; Sacha n'est pas rentré de la nuit.

    Normalement elle le retrouve toujours écroulé sur son canapé, après ses folles virées nocturnes.

    Mais aujourd'hui il a découché..

     Avec qui? Cette question la hante.

    A t-il fait "le faux pas"? Apparemment oui... 

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     La sonnerie de l'entrée retentit soudain pour la tirer de ses songes ; tel un automate, elle se relève du sol pour aller ouvrir. 

    Pourvu que ce soit lui...
    Mais non, ce n'est pas possible, car il a sa clef personnelle ! Il n'aurai pas pris la peine de sonner...
    A moins qu'il l'ai perdu?
    Oui, c'est ça, admettons qu'il l'ai perdu !
    Alors oui, pourvu que ce soit lui !

    C'est en espérant fortement cela qu'elle ouvre la porte, pour laisser apparaître un jeune homme.
    Un adolescent. 

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     L'adolescent à la moto.

    — Bonjour, salue t-elle avec un sourire, je te reconnais toi, tu viens voir Tiphanie, non? 

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    —  Bonjour madame, répond poliment son interlocuteur, je m’appelle Kurt. Et oui, je viens voir Tiphanie, si c'est possible... 

    — Bien sûr mon petit, bien sûr, reprend Claire, mais entres voyons, sois pas timide. Les amis de Tiphanie sont ici chez eux.

    - Merci, se contente d'ajouter Kurt.

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     — C'est au premier, première porte a gauche, indique alors Claire en se préparant a retourner d'où elle vient, au salon, je te laisses y aller car je suppose que tu n'as pas besoin de ma présence dans tes pattes pour retrouver Tifou?

    — M..Merci, répète Kurt en s'avançant doucement vers l'escalier. 

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     Tout en gravissant les marches en bois de l'objet, il se met a réfléchir a un scénario correct a raconter a sa petite amie : il faut qu'il justifie le fait de l'avoir abandonnée chez lui, comme celui de lui avoir raccroché au nez, a trois reprises. 

     Arrivé au premier, il constate que la première porte a gauche s'ouvre devant lui.
    Tiphanie? espère t-il aussitôt, avant d'apercevoir un jeune adolescent a la place ; son petit frère.

    Kylian, si sa mémoire est bonne... 

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     — Salut, lance celui-ci, en constatant l’invité planté devant la chambre qu’il occupe avec sa sœur.

    — Elle est a l’intérieur, informe-t-il ensuite, sans même attendre que son interlocuteur le lui demande.

    — Salut, et merci, se contente alors répondre Kurt, plutôt satisfait qu’on lui indique tout sans qu’il ne demande rien. 

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     Sans hésiter, il rentre alors dans la fameuse chambre, où il repère vite celle qu’il recherche, plantée au téléphone. 

     Avec qui parle-t-elle ? se demande-t-il immédiatement, en espérant que ce soit avec une fille..
    Jaloux ? Lui ? Peut-être en fait... 

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     — Je... Je te rappelle, fait Tiphanie dans son téléphone, après avoir sursauté en constatant cette arrivée surprise.

     Il s’avance, sans dire un mot. Vite, qu’elle raccroche ! Elle a pas besoin de parler autant à Anja de toute façon...

    — Oui, oui, bisous, je te rappelle, promis, termine-t-elle avant de raccrocher.

    — C’était qui ? demande immédiatement Kurt. C’est sorti tout seul...

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     — Bonjour d’abord, non ? Lui rappelle Tiphanie en enfouissant son téléphone dans sa poche ; il est tellement minuscule qu’il se glisse dans toutes les poches ! Même les plus moulantes ! C’est ça la nouvelle génération des téléphones portables, ils sont tellement fins qu’on peut les ranger partout !

    — Excuse-moi, bonjour.. Se reprend Kurt, en s’avançant discrètement jusqu’à ce que leurs corps se frôlent, sans se plaquer l’un contre l’autre pour autant. 

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     Elle détourne la tête pour éviter son regard magnifique qui la ferait succomber immédiatement.

    — Comment je dois le prendre ? essaie-t-elle de demander sur un ton des plus sérieux.

    — Je l’ai retrouvé en sang dans sa cuisine et je l’ai amenée à l’hôpital, où j’ai passé la nuit, car elle pleurait beaucoup, informe-t-il sans hésiter.

    Victoire, elle y croit ! se rassure-t-il en constatant qu’elle ramène tendrement son visage vers le sien, en murmurant,

    — Qu... Que... C’est vrai?..

    — Bah oui... continue-t-il de mentir avec beaucoup d’aisance.

    — Mais.. Mais je t’ai appelé trois fois et...

    — J’ai du raccrocher, car j’étais déjà dans l’hôpital, l’interrompt-il, je suis désolé...

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    — Ah d’accord... reprend-elle avec un sourire et en se rapprochant de plus en plus pour se plaquer tendrement contre lui, avant de murmurer à nouveau,

    — J’avoue que je me suis fait beaucoup de films..

    — Ça m’étonne pas... Tu es une fille ! taquine-t-il gentiment.

    Et lui un menteur. Mais ça, elle ne le saura jamais !

    Il ne veut pas la perdre pour une soirée ridicule où il s’est simplement perdu dans d’autres bras... Ça ne se reproduira plus.  

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     D’ailleurs, il va lui prouver qu’il ne tient qu’à elle : sensuellement, il lui mordille le lobe de l’oreille, avant de lui déposer de légers baisers humides dessus, avant de se diriger vers ses joues, ses yeux, son front..

    Elle frémit à cette approche délicieuse et glisse ses mains dans son dos, pour le serrer tendrement contre elle, avant de chercher ses lèvres pour un baiser des plus passionnés. 

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     Baiser qu’il accepte et qu’il approfondit rapidement. 

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     Elle est à lui. Quand elle est dans ses bras, il se sent revivre.
    Oui c’est ça. Avec elle, il se sent vivant.

    Ce moment est magique et semble durer une éternité.  

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     Tiphanie est aux anges, il est là, plus tendre que jamais, dans ses bras

     Pourtant, ce baiser délicieux lui en rappelle un autre.
    Celui d’Hanz.
    Et là, c’est le drame : une honte infinie s’empare d’elle et lui déchire le cœur.
    Qu’a-t-elle fait hier soir ?
    La conne.
    Oui, elle a fait la conne.
    Il n’y a pas d’autre mot. 

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     Sans réfléchir, et tenaillée par cette sensation d’être salie et mauvaise, elle se décolle légèrement de ses lèvres pour murmurer timidement,

    — Kurt... Je.. Je..

    — Oui ? lui murmure-t-il à son tour, avec un adorable sourire.

    — Hier..Je.. Je.. 

     — Oui ? commence-t-il à s’inquiéter, qu’est-ce qu’il y’a eu, hier ?

    Mon Dieu ! Qu’est-ce qu’elle a fait ! songe-t-elle maintenant avec effroi, en réalisant cette nouvelle gaffe.

     — Mais je pensais être célibataire hein ! se justifie-t-elle tout d’un coup. Et puis j’étais malheureuse, tu venais de me raccrocher au nez, alors moi je pensais que... que tu m’avais larguée !

    Il serre les dents et perd son air tendre, pour en adopter un complètement abattu.

    — Avec qui.. ? Comment....? 

     — C’était juste pour être gentil qu’il m’a proposé d’aller au Cotton...

    — De quoi ? L’interrompt vivement Kurt en la foudroyant du regard, tu as vu mon frère ?

    — Need une corde.. Marmonne honteusement Tiphanie en grimaçant, mais il est arrivé juste après ton départ et... 

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     — A demain, l’interrompt une dernière fois Kurt avant de la lâcher pour sortir rapidement de la pièce.

    Paralysée par la honte et sa bêtise, elle le regarde bêtement partir en claquant la porte. 

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     Plus cruche tu meurs ! s’autoblâme-t-elle en soupirant.

    Et c’est à ce moment-là qu’elle découvre que parfois en amour, il faut savoir dissimuler certains faits...


  • 043

     

     

    *

      

     

     Le lendemain, c’est un dimanche, pour une fois ensoleillé, qui se lève sur Berlin, et sur une petite maison de banlieue.. 

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     Elsa est aux anges ce matin : se réveiller dans les bras de celui qu’on aime est ce à quoi aspirent toutes les femmes au monde.

    Cette nuit a été bien remplie, ils ont fait l’amour longuement, avant de s’endormir l’un sur l’autre, épuisé, à même le sol, sur la moquette du salon.

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     — Je t’aime, lui murmure-t-elle tendrement en lui embrassant sensuellement le torse, — je t’aime, je t’aime, je t’aime.. 

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     Ces mots sont magnifiques... Mais ils ne l’atteignent pas ce matin ; il s’est réveillé en sueur, après de nombreux cauchemars, et il réalise à présent l’ampleur de sa lâcheté, de sa nullité, et de son manque de personnalité. 

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     — On grignote quelque chose ? Reprends Elsa, tout sourire, malgré un pincement au cœur de constater le visage fermé de son compagnon.

    — Non merci... J’ai pas faim, se contente-t-il de laisser tomber.

    — Qu’est-ce qu’il y’a.. ? ose-t-elle enfin demander, en retenant ses larmes. —Tu regrettes, c’est ça ? 

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     — Oui, répond-il avec une franchise qui perfore le cœur de la jeune fille allongée à ses côtés.

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     — Tout est ma faute.. Reprend-il en changeant de position pour se mettre en tailleur devant elle.

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     — Je veux me sevrer de toi, moi ! poursuit-il a nouveau, — je veux qu’on arrête tout ça... Que tu n’aies plus besoin de moi pour vivre... termine-t-il d’une voix de plus en plus faible.  

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     — Mais toi et moi on est lié, je, je ne saurais jamais vivre sans toi... Et toi non plus au fond ! fait Elsa, les yeux humides, — qu’est-ce qu’il me manque pour te plaire Kurt ? Dis-le-moi... 

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     — Rien Elsa, il ne te manque rien, soupire-t-il en se redressant, — le problème vient de moi, tout simplement. Toi, tu es parfaite, vraiment parfaite..

     — Alors, aime-moi ! Aime-moi comme je t’aime Kurt ! Aime-moi ! Aime-moi... Aime-moi, mon amour...

    — Tu es si mignonne... à penser que c’est si facile... lui sourit-il tendrement, avant de se reprendre, — je vais devoir y aller, j’ai plein de choses a faire aujourd’hui, alors je te dis a demain, au lycée... laisse-t-il tomber en se relevant doucement.

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     — Comment est-ce que je dois le prendre, ça ? Prononce difficilement la jeune fille, au bord de la crise de larmes.

    — J’ai plein de choses a faire a la maison Elsa, tente-t-il de la rassurer en lui caressant les cheveux, avant de commencer a s’éloigner. 

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     — À demain alors... réussit-elle a souffler, avec un désespoir évident dans la voix, — je.. Je t’aime.

     Il continue son chemin, se baisse pour récupérer ses vêtements, éparpillés un peu partout dans la pièce, avant de s’habiller le plus rapidement possible. À croire qu’il prend le train, songe tristement Elsa.  

     La porte d’entrée claque doucement, il s’en va. Sans un mot, sans un sourire.
    Il regrette amèrement cette nuit, c’est évident.

    Le cœur en miette, la jeune fille se relève péniblement du sol pour se laisser tomber sur le canapé du salon.  

    043

     Elle écoute tristement la musique que la chaîne Hi-Fi diffuse actuellement.

     

      ~ Musique ~

     


     On me dit que nos vies ne valent pas grand-chose,
    Elles passent en un instant comme fanent les roses
    On me dit que le temps qui glisse est un salaud
    Que de nos chagrins il s’en fait des manteaux,
    Pourtant quelqu’un m’a dit que...  

    043

     Que tu m’aimais encore,
    C’est quelqu’un qui m’a dit que tu m’aimais encore.
    Serait-ce possible alors ?

     À croire qu’elle a été écrite pour elle...

     On me dit que le destin se moque bien de nous
    Qu’il ne nous donne rien et qu’il nous promet tout
    Parais que le bonheur est à portée de main,
    Alors on tend la main et on se retrouve fou
    Pourtant quelqu’un m’a dit...

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     Les larmes aux yeux, elle se met à chantonner en chœur, avec la chanteuse, Carla Bruni. 

    Que tu m’aimais encore,
    C’est quelqu’un qui m’a dit que tu m’aimais encore.
    Serais-ce possible alors ? 

     Mais qui est-ce qui m’a dit que toujours tu m’aimais ?
    Je ne me souviens plus c’était tard dans la nuit,
    J’entends encore la voix, mais je ne vois plus les traits
    « Il vous aime, c’est secret, lui dites pas que j’vous l’ai dit »
    Tu vois quelqu’un m’a dit...

    Que tu m’aimais encore, me l’a-t-on vraiment dit...
    Que tu m’aimais encore, serait-ce possible alors ?

    On me dit que nos vies ne valent pas grand-chose,
    Elles passent en un instant comme fanent les roses
    On me dit que le temps qui glisse est un salaud
    Que de nos tristesses il s’en fait des manteaux,
    Pourtant quelqu’un m’a dit que...