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— Kyle ? Tu as fini ? Interpelle rapidement Vanessa, maintenant plantée devant la porte de la salle de bain où s’est enfermé le concerné.

— Quasiement, oui. J’arrive !

— J’entre ?

— Eeeeuuuuh... Non ! Va te coucher. J’arrive dans... 

— Dans cinq minutes, oui, je sais. Mais je veux entrer quand même.

— Commence pas à faire ta relou ! Tu peux bien attendre deux minutes quand même... 

— Non. Je ne veux pas attendre. Je veux entrer Kyle ! Je veux être avec toi. Dans n’importe quelle situation, dans n’importe quel moment...Alors je suis désolée, mais j’entre ! Finit-elle avec un sourire, en pressant la poignée de la porte qui la sépare de son petit ami et depuis quelques semaines à peine, fiancé.

 

— T’es chiante, lui rappelle sans attendre Kylian, une fois que son interlocutrice reapparait devant son regard.  

— Combien ? lui fait-elle immédiatement, en le dévisageant de haut en bas — combien ? Combien, combien ?

— Un seul. Je t’ai dit, « un seul », alors je m’en suis fais qu’un seul !

— Promis, juré, craché ?

— Promis juré, craché, oui. 

— Alors c’est parfait, on y arrivera alors ! Lentement, mais sûrement !

— T’es pas obligée de me suivre quand je m’isole quand même... C’est frustrant.

— Tu n’as plus rien à me cacher, non ?

— Non.. 

— Alors ma présence ne doit pas te déranger. Ensemble, et main dans la main, c’est ce qu’on s’est promis, il me semble. Non ? 

— Ouais...

— Tu n’as plus la force de me répondre par des phrases complètes, mon cœur ?

— Nan... Parce que tu me sidères...

— Pourquoi ? 

— Parce que je me demande où tu pars puiser cette force et cette volonté..

— Bah, si tu ne t’en doutes pas, c’est que tu es vraiment pas doué !

 

 

 

*

 

 

HeartStrings — Secret Garden♫

 

Il fallait s’y attendre, dès le lendemain, Sacha s’est rué à l’appartement de son fils pour avoir une petite discussion avec ce dernier. Il est furieux. Terrifié, et honteux.

Honteux de lui avoir fait confiance. Honteux d’avoir réussit a croire qu’il pourrait grandir et évoluer correctement, seul, malgré son passé chargé où il avait déjà eu tendance a plonger dans certaines drogues douces.

« Comme des tas d’ados boutonneux », avait-il justifié à l’époque.

« Ce n’était qu’une passade. Un test. Un essai ».

Menteur ! Quel beau menteur.. Une passade. Un test... Menteur ! Il le savait. Oh oui, il le savait. Lorsque l’on touche aux drogues, c’est parce que l’on a besoin d’aide, même si l’on ne dit rien. Il le savait. Que son fils n’était rien d’autre qu’un paumé menteur qui dissimule ses maux. Pourtant, il y avait crû. Cette fille, cette chanteuse aux allures d’anges, il avait réussi a croire en sa stabilité. Elle était censée apporter à son fils la maturité nécessaire dont tout homme a besoin pour fonder un foyer.

— Je veux que tu ailles en cure ! S’époumone-t-il avec agacement devant son rejeton — et ce n’est pas une proposition, mais un ORDRE !

  

— Je suis majeur, tu n’as plus d’ordres à me donner.

Mais une claque et un coup de pied cul, ça, il peut encore les lui donner par contre !

— Mais pour qui est-ce que tu te prends ? Petit con ! Je suis encore ton père, et je le serai jusqu’à ce que tu pourrisses en quatre planches !

— Alors le plus tôt sera le mieux.

— Je t’en empêcherai ! De gré ou de force !

 

Ils pourraient continuer ainsi pendant encore de nombreuses heures. Ces deux caractères sont forts et inébranlables. Aucuns ne souhaite laisser gagner du terrain a l’autre, oh que non. Les Gutter sont comme cela. Ils ont raison, alors lorsqu’ils parlent, on les écoute et on se tait ! Ils ont la science infuse, même lorsqu’ils ont tort.

 

— Je pourrai parler au média, ruiner ta carrière, si tu ne te fais pas soigner.

Non, Sacha n’apprécie pas d’en arriver là pour faire céder son fils.

Mais il est prêt à tout pour le sauver.

De gré ou de force.

— Tu n’oserais pas, se contente de lui répondre Kylian — tu n’es pas assez con.

 

En effet. Sous la carapace de pierre de son paternel se cache un cœur d’or et en effet, c’est vrai qu’il n’oserait jamais livrer son enfant en pâture aux journalistes véreux qui se presseraient de hurler a tue-tête et a qui veut l’entendre, que le chanteur a succès des Apologize se trouve aujourd’hui sous l’emprise totale de l’une des drogues les plus dures au monde.

 

— Et ensuite ? Ça sera quoi ? L’héroïne ? Lui soupire alors Sacha dans un ultime combat, pour lui faire réaliser sa pitoyable déchéance, — réponds-moi Kyle ! Et ensuite ? Tu as l’intention de te détruire avec quoi ?

— Ptèt bien l’héroïne, oui.

 

Il ne gagnera pas à ce petit jeu. Provoquer Kylian c’est le forcer à se braquer dans la seconde, en rejetant tout en boucle. Il ne doit pas l’oublier. C’est un Gutter. Son fils. Le sang de son sang. La chair de sa chair. Son caractère. Son impétuosité. Sa... Sa grande fierté.

 

— Mais merde Kyle !! Pourquoi es-tu comme ça ? Pourquoi... Pourqu...

 

Il pourrait craquer. À cet instant précis, il pourrait craquer et fondre en sanglots.

Mais non. Son nom de famille c’est « Gutter », alors il va se reprendre. Et cingler avec douleur cet être qui lui ressemble trop, en se mordant les lèvres

 

— Je veux que tu sortes de cette merde Kyle, même si tu en chies, que c’est dur, parce que t’es complètement accro. Je veux que tu en sortes ! Seul... Ou en centre. Ta carrière de petit boybands.. Moi je m’en contre-branle. Ta vie est plus importante !

— Je m’en sortirai, seul. J’ai déjà pris les choses en main avec Vanessa et j’ai pris ma décision papa. Alors, fais-moi confiance.

— Mais je t’ai déjà fait confiance !

— Encore une fois alors...

 

Et si cette requête était désormais impossible à offrir ?

Et si Sacha avait trop mal aujourd’hui pour réussir à lui donner cette nouvelle chance ?

Il ne sait pas. Il ne sait plus. Il a déjà faillit le perdre il y a quelques années, dans cette ZI...

Il en a envie de pleurer. De hurler. De s’effondrer sur le sol.

 

— Papa... Encore une fois. Je t’en prie...

 

 

 

*

 

 

 

Une semaine plus tard, Zell a bien du mal a cacher son euphorie au local et c’est sans attendre qu’il annonce son gain de cinq places pour le concert d’avril Lavigne lorsque celle-ci passera ici, à Berlin, lors de sa tournée européenne. 

Cinq places. Seulement cinq places. C’est ce petit détail qu’Erwan ne va pas tarder a lui signaler, parce qu’ils ne sont plus cinq aujourd’hui, mais huit.

Ces trois bouts de femmes qui partagent leurs vies tous les jours, Vanessa, Tania et Lisa. Il ne les oublie pas, lui. 

 

— Avril lavigne, moi, je suis pas fan, affirme alors Lisa pour ne pas que ses amis se sacrifient à cause de quelques malheureuses places manquantes.

— C’est pas histoire d’être fan ou pas, lui rappelle sagement Erwan sans lever le nez de son synthétiseur — c’est histoire d’être huit, et non cinq. 

— Je prendrai une place supplémentaire pour Lisa, annonce brusquement Zell avec toute la conviction qu’il peut posséder a ce jour, — et pour Vanessa et Tania... Elles ont qu’à compter sur leurs mecs ! 

 

Évidemment, cette exclamation n’a pas laissé l’unique jeune femme ici présente de marbre. Loin de là, puisque son cœur se met brusquement à battre la chamade. Elle en déglutit même, se demandant ainsi pourquoi elle, et pas une autre, et rougissant devant tant de gentillesse.

Elle ne s’attendait vraiment pas à ce que ce soit lui qui annonce une chose pareille, vu qu’en temps normal, c’est à peine s’il la remarque.. 

Décidément, les rouquins d’Apologize ne font que la surprendre : entre Gérald qui la traite comme une moins que rien, pour ensuite ignorer totalement son existence et Zell qui semble toujours indifférent à sa personne, pour brutalement lui montrer qu’il existe et est très sympathique...

 

— Yo les moisis, crie soudain la voix du roux que Lisa apprécie le moins, pendant qu’il pénètre à grandes enjambées dans le local, — vous êtes que deux ? Où sont Yann et Kyle ? Ils se font des petits plaisirs sous la douche au lieu d’être à l’heure aux répétitions, c’est ça ??

— Ça te dit, un concert d’avril Lavigne ? Lui fait sans attendre Erwan, pour obtenir son avis sur le sujet. 

— Mouais... Bof. Je sais pas si j’ai envie de cramer des thunes pour son concert, même si c'est classe qu’elle passe à Berlin, lui répond avec honnêteté le jeune batteur.

— J’ai gagné cinq places à un concours, n’hésite pas à lui apprendre rapidement Zell, — alors ça serait bête de s’en priver...

— Cinq ? Hausse les épaules Gérald en jetant un œil vers son ami pianiste qui ne décolle toujours pas de son synthétiseur. À croire qu’il le lui a été greffé a la naissance.

— Je prends une place de plus pour Lisa, apprends à nouveau Zell — et en ce qui concerne les autres filles, je me disais qu’elles avaient leurs mecs...

 

« Je prends une place de plus pour Lisa », cette phrase manque de faire s’étouffer Gérald et il ne manque pas de fusiller aussitôt du regard cet interlocuteur bien trop envahissant à son goût.

Que cherche-t-il à faire avec, cet empaffé ?

Le gentil pour se faire bien voir ?

Le galant pour la séduire ? La petite peste du groupe... la chipie, la casse-couilles, la moche... la moche... la moche ?

 

Hummm.. La moche... Non. Ceci est un mensonge, car il est vrai que depuis qu’elle s’est décidée à prendre soin d’elle, depuis qu’elle s’est mise à travailler au studio, depuis qu’elle s’est mise à s’épanouir avec l’amitié d’Erwan et des autres, il est vrai, et il doit bien le reconnaître... Elle n’est plus du tout moche.

Mais lui, jamais il n’acceptera de le reconnaître ! Jamais ! 

Même si cela commence à l’énerver profondément de la voir esquisser des sourires niais à cette espèce de Don Juan des campagnes.

 

— Alors, Gégé, ça te dit ? Vient le réveiller brusquement Erwan, alors qu’il se trainait d’un air las vers sa batterie, — le concert, ça te tentes, toi ?

— Comme vous voulez, je m’en contrefous.

 

 

 

*

 

 

 

Ce n’est pas parce que leurs petites amies respectives sont absentes ce soir que Yann et Kylian ne vont pas profiter pleinement de ce concert d’avril Lavigne. 

De toute manière, elles avaient déjà décidé d’aller ensemble au spectacle d’un célèbre humoriste, avant même que leurs hommes ne leur annoncent qu’ils allaient tous voir la grande Avril Lavigne lors de son passage à Berlin. 

Soit, ils n’ont pas été greffés les uns aux autres dès leurs naissances, alors ils peuvent très bien se faire des soirées séparément. 

En plus, les deux amies doivent bien avouer qu’elles n’ont jamais été de ferventes admiratrice d’Avril Lavigne. 

Un avantage flagrant que les Apologize ont eu depuis peu la joie de découvrir est celui d’être devenus des invités VIP lors de représentations comme celle-ci.

Des salons privés, un bar privé, des balcons spacieux, avec une vue plongeante sur l’artiste qui se produit droit devant... On ne peut pas nier que ce sont là des avantages uniques, réservés à une maigre communauté : les stars.